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Jimmy Paradis, confession du porte parole des sans-voix

Jimmy Paradis, confession du porte parole des sans-voix

Article mis à jour le 8 septembre 2022 à 14:07

Jimmy Paradis, jeune homme de 38 ans qui a fait siennes les valeurs humanistes des évangiles, a bien voulu être la première figure perpignanaise à inaugurer cette rubrique interview. Un brin d’inquiétude, de part et d’autre pour cette première rencontre et nous voilà parti pour une heure d’entretien.

Enlevé à sa mère prostituée à l’âge de 2 ans, Jimmy a été confié aux services sociaux. Un système qui était censé lui fournir une structure stable et accueillante capable de se substituer à une famille. Mais qui a échoué en le « trimballant » de foyers en familles d’accueil aussi peu structurants que le milieu duquel on prétendait le protéger !

A la fin de l’adolescence, un choix de vocation s’offre à lui. Il hésite entre l’entrée au séminaire de Saint Anne d’Auray (Morbihan), convaincu que sa voie est là, et la vie professionnelle dans le secteur de l’hotellerie-restauration. Ce sera le tablier de serveur plutôt que la soutane. Le suicide de son frère de 24 ans en 2000 a été pour lui un évènement de plus qui l’a conduit à quitter son Alsace natale pour venir à Perpignan, « une rupture le plus loin possible de ses racines ».

Il fait le choix déroutant de la prostitution pour vivre l’expérience subie par sa mère et tenter de la comprendre sans juger

Pour se mettre dans la peau de celle que tous traitaient de « Pute ». Pour subir ce regard sans compassion, ce regard moralisateur, ce regard qui cloue au pilori « les pêcheurs ».  Ce jugement de valeur sans connaître l’humain qui a meurtri Jimmy, son frère et sa mère…

Il pratique activement « la prostitution en travesti » durant 5 ans. Il lui faudra 5 autres années pour « en sortir » grâce à l’aide de prostituées.
« Elles m’ont tendu la main et le combat que je mène depuis 4 ans contre la loi de pénalisation des clients est une façon de leur rendre la pareille. Je porte la parole de celles et ceux qui ne peuvent pas s’exprimer auprès des politiques qui se prétendent experts mais qui ne font que lire des rapports sans écouter l’humain. Il faut faire la différence entre la prostitution et les prostitués ! ». Une différence, bien au-delà des mots, que la plupart des gens n’ont su saisir, trop enclins aux amalgames.

Un débat éthique de fond existe depuis de nombreuses années en France et en Europe. Entre ceux qui sont

  • pour l’abolitionnisme, comme la ministre Najat Vallaud-Belkacem qui alors, qu’elle était à la tête du ministère, très éphémère, du droit des femmes déclarait : « Mon objectif, comme celui du PS, c’est de voir la prostitution disparaître » et
  • les règlementaristes qui prônent un encadrement du métier qui aurait, selon eux, pour effet de sortir les prostitués, qui le souhaitent, de la précarité et aux autres de gagner une certaine reconnaissance sociale.

Jimmy est militant actif du STRASS, syndicat des travailleurs du sexe qui s’est positionné contre la loi sur la pénalisation des clients de prostituées, définitivement adoptée en avril 2016. Une vie de combat dictée par ses valeurs et sa foi en l’humain. La foi qui l’a mené aux portes du séminaire à 18 ans a toujours guidé ses pas, comme une somme de lois inscrites dans le marbre qu’il tente de suivre lui-même.

Contre la pauvreté et la précarité tu te battras !

Pour Jimmy, il est inimaginable d’avoir faim ou de vivre dans des conditions insalubres aujourd’hui à Perpignan. Car grâce à son expérience de vie, il connaît la précarité « des hommes et des femmes qui subissent, qui souffrent et qu’il faut respecter en tant qu’être humain. Aujourd’hui leur situation les déshumanise aux yeux de tous ! Il ne faut pas les juger ou préjuger de leur besoins il faut les écouter, les entendre et porter leur parole au plus haut niveau ! ».

C’est aussi le point de départ de son engagement politique au sein de Désobéir, soutenu par Jacqueline Amiel Donat, ancienne élue d’opposition à la mairie de Perpignan. Jimmy a fondé ce mouvement et était candidat aux élections départementales de Mars 2015.

Un combat quotidien pour plus de justice sociale : « Si j’ai envie de politique c’est que je pense que la politique n’appartient pas aux politiciens. Je préfère être acteur d’une nouvelle politique que spectateur d’un naufrage en cours ».

La bonne parole tu porteras !

Malgré des rapports parfois compliqués avec l’église, Jimmy veut suivre sur les pas d’autres bâtisseurs avant lui, et s’engage. Bien « qu’écarté » de certaines activités paroissiales, son envie de lutter et de toujours se présenter face à « ceux qui font des déclarations d’amour en oubliant les preuves d’amour » est intacte ! Une parole qui prône plus de tolérance et de réconciliation, et prêche notamment pour la reconnaissance des homosexuels dans l’église catholique.

Un autre combat pour Jimmy, une nouvelle main tendue …

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Maïté Torres