Article mis à jour le 30 janvier 2025 à 11:38
Lundi 20 janvier 2025, l’association de cyclistes Vélo en Têt engageait un recours gracieux contre la mairie de Cabestany. Les usagers dénoncent depuis plusieurs années le manque de sécurité des aménagements cyclables de la ville.
À Cabestany, la guerre d’usure contre le manque d’aménagements cyclables
« Dans cette ville, 99% des aménagements cyclables se résument à des pictogrammes vélo sur le trottoir », dénonce Lanza Bertucci Domergue, membre de l’association Vélo en Têt. En 2023, les cyclistes locaux tentent de se faire entendre. La mairie propose alors des ateliers pour travailler sur ces problématiques. « Sauf que deux ans après, il n’en est rien ressorti », dénonce Lanza. « Ce qui est problématique, c’est que la majorité des aménagements est illégale, du point de vue du code de la route. »
La même année, Vélo en Têt, qui représente les usagers de la bicyclette localement, rencontre l’élu en charge des mobilités. « Nous avons tenté de le convaincre de la nécessité de remettre les modes actifs au centre de la politique de mobilité de la ville. Malgré les enjeux et le bilan objectivement catastrophique de la commune, aucune suite n’est donnée », écrit l’association sur sa page Facebook.
« J’ai entendu des opinions personnelles qui prévalaient sur des études chiffrées, comme le retour du baromètre vélo, qui est l’enquête nationale organisée par la FUB (Fédération française des Usagers de la Bicyclette) », regrette Lanza. Selon le site « Villes.plus », qui établit une note et un classement à chaque ville de manière automatisée, Cabestany obtient la note de 0,2/10. Cette évaluation mesure la part de pistes cyclables sécurisées pour se déplacer dans la commune. En 2023, la ville ne possède que 2,21% de vrais trajets vélo sécurisés.
« Un pictogramme sur le trottoir n’est pas une piste cyclable »
Si la commune de Cabestany compte peu d’aménagements cyclables, une piste cyclable relie tout de même Saleilles à Cabestany. « Les enfants de Saleilles peuvent aller au collège à vélo », indique Édith Pugnet, maire (PCF) de Cabestany. « À chaque fois que l’on refait des voies, on les équipe également de pistes cyclables au fur et à mesure. »
Ce qui ne convainc pas de nombreux cyclistes. En novembre 2023, une manifestation est organisée pour dénoncer le manque d’équipements cyclables dédiés au vélo dans la commune. « Du point de vue du code de la route, un pictogramme sur le trottoir n’est pas considéré comme une piste cyclable. Ce n’est ni réglementaire, ni conforme aux recommandations officielles », affirme Lanza.
« Comment peut-on espérer que les gens vont se mettre au vélo avec ce genre d’aménagement ? », interroge l’association sur son site. Pour rappel, le gouvernement se donne comme objectif d’atteindre 12% de part modale à vélo, d’ici 2030.
Un recours gracieux déposé contre la mairie
Le recours juridique déposé il y a une semaine porte sur les doubles-sens cyclables. « L’avantage, c’est que cela nécessite très peu d’investissements de la part de la commune. Et pour les cyclistes, c’est très utile parce que cela permet de se déplacer rapidement d’un point A à un point B, dans les zones 30 », nous explique Lanza.
Ce dispositif, qui existe depuis 2008, permet d’emprunter la chaussée dans le sens opposé à la circulation automobile. « Si ce système a fait ses preuves, la commune de Cabestany refuse de se mettre en conformité. » D’après Lanza, l’obligation vise à installer un panonceau rectangulaire sous le sens interdit, qui indique « sauf vélo ».
« On attend simplement que les choses soient faites correctement pour favoriser la mise en selle. Le but, c’est que les gens abandonnent leurs voitures pour des trajets courts, en tout cas à l’échelle d’une agglomération. Et pour que cela fonctionne, il faut qu’on ait des conditions de circulation qui soient confortables, sécurisées et des itinéraires continus », revendique Lanza.
À Cabestany, le double-sens cyclable fait débat
À Cabestany, vélos, piétons et voitures circulent donc sur des voies partagées. « Nous concertons régulièrement les habitants de Cabestany sur ces questions, notamment lors de réunions publiques », confirme Édith Pugnet. « Ce qui en ressort, c’est que les usagers ne sont pas du tout unanimes sur le double-sens. »
Le collectif de cyclistes souhaite passer l’avenue Jean Jaurès en double-sens cyclable. « Cet axe offre une magnifique opportunité de traverser rapidement et en sécurité le centre-ville », souligne Vélo en Têt. Une proposition qui n’a jamais abouti, jugée « trop dangereuse » par l’équipe municipale et certains usagers.
« C’est une rue ancienne du centre-ville de Cabestany. Si on met un vélo en face, ça ne passe pas, c’est trop étroit… Nous avons décidé de mettre en place un autre itinéraire avec PMM (Perpignan Méditerranée Métropole). » La mairie suggère de baliser par des pictogrammes vélo un itinéraire de contournement, situé 200 mètres plus loin. « En tant qu’élus, nous veillons à la sécurité de tous, nous travaillons pour l’intérêt général de toute la population, qu’on soit en véhicule, en vélo ou à pied », se justifie l’édile. Une aberration pour Vélo en Têt.
En 2014, la ville de Perpignan a déjà été condamnée en appel pour le déploiement incomplet des doubles-sens cyclables en centre-ville. Si le recours gracieux précède souvent toute poursuite judiciaire, Lanza espère que les doléances des usagers soient entendues. Pour rappel, lorsque la vitesse maximale autorisée est inférieure ou égale à 30 km/h, les chaussées sont à double sens pour les cyclistes, sauf décision contraire de l’autorité investie du pouvoir de police.
« D’après une enquête menée par l’INSEE au moment du recensement, 94% des habitants de Cabestany se déplacent en voiture. On ne peut pas laisser la place qu’aux vélos, et ne plus exister. On serait tous ravis de le faire, mais aujourd’hui, la réalité, c’est que dans ce département, on est obligés d’être véhiculés pour se déplacer », se défend la mairie. Si certains habitants laissent entendre qu’ils souhaiteraient se déplacer davantage à vélo, à pieds ou en bus, la mairie ne donne aucun signe d’une volonté de changement. Le bras de fer entre la municipalité et Vélo en Têt n’est pas prêt de se terminer.
- Aménagements cyclables à Cabestany : cette association emprunte la voie juridique pour se faire entendre - 30 janvier 2025
- « Meilleure boulangerie de France » : À Perpignan, ce boulanger décroche sa place en finale régionale - 29 janvier 2025
- Ancienne élève à Perpignan, cette jeune chercheuse œuvre pour guérir le cancer des globules blancs - 26 janvier 2025