fbpx
Aller au contenu

Pyrénées-Orientales : La processionnaire du pin fait son grand retour, comment agir ?

Pyrénées-Orientales : La processionnaire du pin fait son grand retour, comment agir ?

Depuis 2009, l’entreprise catalane La Mésange Verte produit le collier Écopiège dans son usine à Bages. Cyrielle Rimbau et Adrien Duplessy, aujourd’hui à la tête de l’entreprise, nous présentent ce piège mécanique permettant de garder à distance les chenilles urticantes. À partir de janvier, c’est le moment idéal pour les installer sur les troncs d’arbres, avant que les chenilles ne commencent leur descente en procession.

Après 15 ans d’existence, l’entreprise catalane s’est considérablement développée. Aujourd’hui, ce sont près de 55 000 colliers qui sont vendus chaque année. Focus sur ce produit 100% catalan, devenu une référence nationale pour lutter contre cet insecte, de façon écologique.

Retour sur la success-story d’une entreprise catalane

Début 2024, Cyrielle et Adrien, tous deux salariés de La Mésange Verte, rachètent l’entreprise lors du départ en retraite des fondateurs. « C’est Christian Auriche qui a eu l’idée de ce collier. À l’époque, il avait des chenilles dans son jardin et voulait protéger son animal domestique », raconte Adrien. L’ancien chef d’entreprise s’intéresse à la phénoménologie de l’insecte, afin d’étudier le moment le plus propice pour intercepter la chenille. « Il a eu l’idée de mettre un collier autour de l’arbre, en voyant son chien qui portait un collier vétérinaire. » Après une série de prototypes, le collier Écopiège est né. Christian et sa femme, décident alors de créer leur société et commercialisent leur produit.

À ce moment-là, l’INRA (Institut national de la recherche agronomique) n’a pas encore de méthode de protection efficace pour lutter contre la chenille processionnaire. Après une série de tests réalisés par l’organisme, le produit affiche un taux de réussite de 97%. « Ce piège est venu répondre à un besoin très important de protection », assure Adrien. L’installation du collier se calque sur le cycle biologique de la chenille processionnaire.

Au moment où la larve atteint son dernier stade, la chenille entame sa procession pour aller s’enterrer et se transformer en chrysalide. « Elles arrivent dans le collier, tournent un petit moment jusqu’à trouver le tube de descente qui mène au sac rempli de terre. Ce leurre leur permet de croire qu’elles sont au sol », nous explique Adrien. Le piège, qui ne contient aucun pesticide ou attractif, est réutilisable trois ou quatre ans.

Pour lutter contre les chenilles du pin, il existe d’autres pièges comme les phéromones, qui attirent le mâle pour limiter les futures reproductions. Une petite capsule accrochée au tronc d’arbre diffuse l’odeur des femelles. « Vous pouvez aussi pratiquer l’échenillage », suggère Adrien. Dès que le nid est accessible via des perches, il est possible de couper le bout de la branche, là où se trouve le cocon. Utilisée en agriculture, la bactérie Bacillus Thuringiensis peut être ingérée par les chenilles processionnaires. « L’inconvénient de cette méthode de lutte est qu’elle n’est pas sélective à la processionnaire du pin. Cela va également tuer tous les autres insectes », alerte-t-il.

Une chenille hautement urticante, mais essentielle à notre écosystème

« La chenille processionnaire est un lépidoptère, un papillon de nuit », affirme Cédric Alonso, entomologiste. « On élimine cet insecte car il représente un risque sanitaire. Ce sont des chenilles qui se fabriquent un petit nid, où elles vivent en communauté par dizaines, et parfois centaines d’individus. » Surnommées les « processionnaires », elles quittent leur nid à la queue leu-leu et descendent le long du tronc d’arbre, juste avant la formation de leur chrysalide.

Cette chenille hautement urticante est connue pour les blessures potentiellement graves qu’elle peut causer aux humains et aux animaux domestiques. « Sur son dos, la chenille a de petits miroirs, quand elle se sent stressée, attaquée ou vulnérable, elle va lâcher des poils volatiles qui vont venir irriter la peau et provoquer des blessures plus ou moins graves », nous explique Cyrielle. « Il peut y avoir également des risques respiratoires si le poil est ingéré ou des lésions oculaires si le poil vient se nicher dans l’œil. »

Il en va de même pour les animaux de compagnie, notamment les chiens, qui vont venir respirer ou jouer avec la chenille. « Ils peuvent être victimes d’irritation au museau ou de nécrose de la langue. » S’il est infecté plusieurs années de suite, le pin peut également subir des dommages.

Le papillon, lui, ne vit que 24 à 48 heures. « Son but est uniquement de se reproduire et de recoloniser l’arbre l’année qui suit », souligne Cyrielle. Celui-ci n’est pas urticant et ne présente aucun risque. Comme toute espèce animale, les chenilles processionnaires jouent un rôle dans l’écosystème. En effet, ces chenilles rentrent dans la chaîne alimentaire des oiseaux et de certains reptiles. « La mésange ne se nourrit que de l’intérieur de la chenille, qu’elle tapote contre un arbre, avant de retirer la tête et tout le tube digestif », nous apprend Adrien. La huppe va surtout prédater la chrysalide qu’elle vient déterrer.

« Les insectes sont le socle de la ressource alimentaire. Quand vous avez une année où il y a une explosion de chenilles processionnaires dans un boisement de pins, vous allez voir l’année suivante une explosion de nichées de mésanges », explique Cédric. L’entomologiste nous assure que l’Écopiège reste très sélectif et n’impacte pas les autres espèces. « Mais piéger pour piéger n’est pas intéressant », prévient-il. « L’installation de ces pièges ne devient nécessaire que dans des milieux fréquentés, où le risque sanitaire est important. »

Afin d’étudier l’évolution des caractéristiques de la chenille, Cyrielle et Adrien ont installé une série de pièges « tests » à Saint-Nazaire. « Cela nous donne des informations d’une année à l’autre, sur les dates de reproduction, les volumes… On sait par exemple s’il va y avoir un pic de processionnaire ou pas », ajoute Adrien. « On est en recherche et en développement permanent sur ce produit. » Pour rappel, le collier a été breveté en 2009.

Le réchauffement climatique accentue la propagation de la chenille processionnaire

Dans la région, les descentes en procession se font de la mi-janvier à la mi-mars. « Avec le changement climatique, on constate une évolution sur le territoire français. Initialement, la chenille était connue sur le bassin méditerranéen et le pourtour atlantique. Maintenant, on la retrouve sur les trois quarts du territoire français », constate Cyrielle.

« Ce n’est pas un cas isolé, il y a beaucoup d’espèces d’insectes qui suivent ce schéma-là », nous confirme Cédric. « Le réchauffement climatique va permettre à beaucoup d’espèces d’insectes d’effectuer leur cycle dans des régions où, auparavant, elles ne pouvaient le faire. » Selon l’entomologiste, l’Homme a aussi contribué à sa propagation en plantant des pins partout en France.

Pyrénées-Orientales : La processionnaire du pin fait son grand retour, comment agir ?

L’Écopiège permet de réguler la population des chenilles. Une fois capturées, celles-ci s’enfouissent dans le sac rempli de terre pour se transformer en chrysalides. Il est alors possible de détruire le sac en le brûlant ou l’emballant dans un sac-poubelle. Depuis 2022, l’État a fait entrer la chenille processionnaire du pin et celle du chêne par décret sur la liste des insectes où la prolifération est dangereuse pour la santé humaine. De ce fait, chaque préfecture peut éditer des décrets d’obligation de traitement.

« Dans les Pyrénées-Orientales, de nombreuses municipalités font appel à nos services. Nous avons un réseau de distributeurs sur l’ensemble du territoire français qui nous permet de toucher toutes les collectivités », précise Cyrielle. Par ailleurs, l’entreprise était présente au salon des maires et des collectivités, à Paris, en novembre 2024. « Ils sont ravis de pouvoir proposer une protection à leurs administrés, autour des parcs municipaux ou des écoles par exemple. »

Quelles sont les étapes pour installer l’Écopiège ?

L’installation du collier Écopiège ne prend qu’une vingtaine de minutes. Il est important de l’installer à deux mètres de hauteur, hors de la portée des enfants ou des animaux. La première étape consiste à prendre la mesure de l’arbre, afin de bien identifier le diamètre du piège à poser.

Une fois le tube de descente monté et le collier en deux parties assemblé, l’utilisateur peut fixer le piège sur le tronc d’arbre à l’aide des épingles de fixation. « Le côté biseauté va permettre aux chenilles de pouvoir tourner autour de l’arbre avant de trouver la descente », désigne Adrien, qui se prête au jeu de la démonstration. La deuxième étape consiste à appliquer le mastic sur le pourtour du collier, afin de boucher les interstices entre l’écorce et le collier.

« Dans les régions un peu humides, le mastic va mettre plusieurs jours avant de sécher. Mais ça n’empêchera pas son efficacité », assure Adrien, qui répartit le mélange grâce à une poche à douille. Vient la troisième étape : placer la sangle autour de l’arbre, sous le collier. Enfin, Adrien remplit son sac de récolte de terre avant de l’accrocher sous le tube de descente.

Tous les Écopièges sont conçus à Bages, au sein d’une usine de 700 mètres carrés. Cyrielle et Adrien emploient sept personnes, qui produisent ces milliers d’Écopièges chaque année. « Les descentes de chenilles et l’installation des pièges vont commencer au mois d’octobre et se terminer sur le mois de mai. En dehors des descentes, on va produire au maximum pour pouvoir anticiper les ventes futures », nous explique Adrien. Au moment des processions, l’équipe de la Mésange Verte assemble et expédie les commandes.

Si la success-story de l’entreprise catalane fait rêver, Cyrielle et Adrien ne comptent pas s’arrêter là. « On espère grandir dans les années qui suivent », affirme le duo, qui a déjà prévu d’embaucher de nouveaux salariés dès 2026.

Pyrénées-Orientales : La processionnaire du pin fait son grand retour, comment agir ?

Participez au choix des thèmes sur Made In Perpignan

Envie de lire d'autres articles de ce genre ?

Comme vous avez apprécié cet article ...

Partagez le avec vos connaissances

Célia Lespinasse