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Inédit à Saint-Cyprien : Une usine d’ultrafiltration des eaux traitées, remède contre la sécheresse ?

Inédit à Saint-Cyprien : Une usine d'ultrafiltration des eaux traitées, remède contre la sécheresse ?

Article mis à jour le 21 février 2025 à 18:32

En France, près de 65% de l’eau potable est puisée dans les nappes souterraines, selon la BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières). Face à la sécheresse qui frappe toujours le département, la Communauté de communes Sud Roussillon mène une expérimentation inédite dans les Pyrénées-Orientales.

Depuis le 17 février 2025, la première usine d’ultrafiltration des eaux traitées tourne à plein régime au sein de la station d’épuration de Saint-Cyprien. Chaque année, près de 1,2 milliard de litres d’eau recyclée permettront l’arrosage des espaces verts, l’alimentation de la zone technique du port et même l’arrosage des plans agricoles. Un système unique en France.

Une eau réemployée pour divers usages dans les Pyrénées-Orientales

Après huit mois de chantier, Sud Roussillon n’attend que le feu vert de l’ARS (Agence régionale de santé) pour distribuer cette eau « brute », qui transitera dans l’ancien réseau BRL (Réseau hydraulique régional). Ainsi, six communes en bénéficieront. « Nous allons étendre ce réseau au sein de notre communauté de communes pour l’usage domestique des particuliers et l’entretien des espaces verts », confirme Thierry Del Poso, maire de Saint-Cyprien et président de Sud Roussillon.

Si ce réseau d’adduction permet déjà de distribuer l’eau dans ces communes, il manque un petit tronçon, dont la construction sera achevée fin mai. Pour le président de Sud Roussillon, le gros enjeu est aussi de mettre cette eau à disposition de l’Association syndicale autorisée (ASA) de Villeneuve-de-la-Raho, pour l’envoyer aux agriculteurs. « D’autant plus que le réseau BRL ne nous permet plus d’avoir assez d’eau, notamment à cause des conditions météorologiques. »

Inédit à Saint-Cyprien : Une usine d'ultrafiltration des eaux traitées, remède contre la sécheresse ?

De gauche à droite : Nicolas Bataille, ingénieur de la CC Sud Roussillon, Élisa Pastor, chargée d’affaires à Polymem, Thierry Del Poso, président de la CC Sud Roussillon, Jérôme Busson, conducteur de travaux au sein de l’entreprise T.A.E.H.

Chez certains habitants de Saint-Cyprien, l’eau arrive par deux tuyaux différents : le premier est destiné à l’eau potable, le deuxième à l’eau dite « brute ». « Cette eau brute est par exemple utilisée pour arroser de petits jardins », nous explique Thierry Del Poso, qui a imposé aux lotisseurs d’installer dans chaque nouveau lotissement ce double réseau.

Aujourd’hui, un arrêté « permanent mixte » permet d’utiliser l’eau recyclée. « Le préfet nous donne l’autorisation permanente de produire et d’utiliser l’eau pour différents usages, comme l’arrosage des golfs ou des espaces verts. » Un autre usage, en essai depuis deux ans, vient d’être validé : il s’agit de la défense incendie. L’intercommunalité compte 500 hydrants (bornes d’incendie). Dès cet été, un poteau incendie sur deux sera alimenté en eau recyclée. Leur couleur devrait changer pour permettre aux services d’urgences de les repérer plus facilement. 

Comment fonctionne ce système de filtration ?

L’eau en sortie de station passe dans un trou de 0,015 millimètre, via l’effet d’un gros filtre sous pression. « Dès que l’eau arrive dans le module, elle entre directement dans la fibre, le filtrage est instantané », nous explique Élisa Pastor, chargée d’affaires à Polymem, référence en matière d’ultrafiltration. « L’idée, c’était non seulement de respecter la classe A, mais aussi de montrer qu’on était capables de produire de grosses quantités d’eau à une qualité quasi d’irrigation », révèle Jérôme Busson, de l’entreprise T.A.E.H, mandataire du groupement. « On est quasiment sur de l’eau potable », renchérit Thierry Del Poso.

Inédit à Saint-Cyprien : Une usine d'ultrafiltration des eaux traitées, remède contre la sécheresse ?

Ce système de filtration, qui permet de retenir virus, bactéries, macromolécules organiques et pollutions azotées, est doublé d’un système de traitement UV. « Il n’y a pas de produits chimiques pour traiter l’eau. C‘est très intéressant en termes de coûts d’exploitation », assure Jérôme Busson. Loin des bassins gigantesques, la station d’opération tient dans un tout petit bâtiment. La communauté de communes Sud Roussillon a investi 3,4 millions d’euros pour ce projet d’économies d’eau.

Les Pyrénées-Orientales, véritable territoire pilote

Malgré des petites pluies intermittentes, « le département est toujours confronté à une sécheresse inédite », rappelle Nicolas Bataille, ingénieur Eau et Assainissement à Sud Roussillon. « Il y a d’énormes efforts qui ont été faits et réalisés par les collectivités sur la ponction de nos réserves. Aujourd’hui, Sud Roussillon vend  2,2 millions de mètres cubes d’eau. « On en prélevait 2,9 millions de mètres cubes par an dans les nappes profondes. Avec la sécheresse, il y a des résolutions qui ont été prises par les mairies et un arrêté qui a induit certaines choses. On est passé de 2,9 millions de prélèvements à 2,4 millions », se satisfait l’ingénieur. 

« La réaction des services de l’État n’est pas la même qu’il y a quelques années en arrière », ajoute Thierry Del Poso. « On a un appui des services de l’État, à travers le plan Résilience. Nous sommes soutenus par l’Agence de l’eau, la Région Occitanie et le Département dans le cadre de ce programme. » 

En cas de besoin, la communauté de communes assure qu’elle pourrait rendre cette eau brute potable. En attendant, le département des Pyrénées-Orientales continue de s’organiser pour économiser l’eau.

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