Visa pour l’image animera Perpignan du 30 août au 14 septembre. Entre reportages de guerre, portraits de société et récits environnementaux, notre sélection met en lumière les rendez-vous incontournables de l’édition 2025.
International : les yeux sur Gaza
Jusqu’à ce qu’elle soit elle-même tuée par une bombe israélienne, Fatma Hassona, une jeune femme qui venait d’avoir 25 ans, documentait de l’intérieur les ravages des frappes menées par l’Etat hébreu sur la bande de Gaza. Avec son œil à la fois tendre et intransigeant apparaissent tour à tour des clichés montrant des instants de vie et de mort à Gaza et qui interrogent : Comment tient-on sous le siège ? Comment vit-on sous les bombes ? Jusqu’à sa mort, elle a illustré la vie civile à Gaza, couvrant les évacuations forcées, la destruction due aux bombardements, les pertes humaines, les funérailles, mais aussi des scènes de résilience comme des enfants jouant au milieu des ruines. En l’absence de journalistes étrangers, elle était l’une des rares voix locales à témoigner visuellement des réalités du conflit.
Fatma Hassona, « l’oeil de Gaza ». Couvent des minimes.
Visa pour l’image honore également le travail de Saher Alghorra, photographe et photojournaliste palestinien, lauréat Visa d’or humanitaire du Comité International de la Croix-Rouge. Avec son appareil, il montre les réalités inhumaines imposées aux civils palestiniens depuis le 7 octobre : les déplacements du nord vers le sud, puis du sud vers le nord, le rythme incessant des bombardements, des frappes aériennes et des opérations terrestres, la famine, la maladie et la perte d’êtres chers. Le poids de l’histoire résonne dans chacun de ses clichés.
Saher Alghorra, « Sans issue – Bande de Gaza, 7 octobre 2023 – 18 mai 2025 ». Couvent des Minimes.
Environnement : l’ère des méga-feux
Dans notre région, durement marquée cet été par les incendies de l’Aude, le thème des feux de forêt est incandescent et doublement marquant. Cette année, Visa met à l’honneur le photographe américain Josh Edelson qui propose « Californie : une décennie au cœur du brasier ». Basé à San Francisco, Josh Edelson couvre depuis 2015 les incendies pour l’Agence France-Presse.
Le photographe travaille régulièrement au plus près des zones sinistrées, souvent seul, en autonomie, dans des environnements extrêmes. Son travail rend palpables les effets d’un dérèglement climatique devenu tangible marqué par des feux plus précoces, plus intenses et plus dévastateurs. Un douloureux rappel des menaces qui pèseront à l’avenir sur nos départements du pourtour méditerranéen, marqués par des épisodes de sécheresse et de vagues de chaleur de plus en plus extrêmes.
Josh Edelson, « Californie : une décennie au cœur du brasier ». Eglise des Dominicains.
Enjeux agricoles : nourrir la planète
En dix ans de travail de terrain dans plus de quarante pays et sur tous les continents, ce projet de George Steinmetz explore l’origine de notre alimentation au travers des modes de production et de leurs impacts écologiques et éthiques. Alors que l’agriculture occupe déjà 40% des terres, que 90% des populations de poissons ont disparu depuis 1950 et que l’alimentation génère 30% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, la production devra encore doubler d’ici 2050 pour nourrir 9,7 milliards d’humains.
Entre serres futuristes et pêcheurs traditionnels, ce travail passionnant réalisé avec des drones et des planeurs pour survoler les systèmes mondiaux de production alimentaire afin d’en révéler l’échelle et les enjeux, met en lumière un enjeu crucial : nos choix alimentaires quotidiens façonnent l’avenir de la planète. Une thématique passionnante au regard, notamment, de l’actualité des dernières années en France et notamment des débats portant sur l’usage de la ressource en eau au profit du monde agricole et des oppositions que cela peut susciter lorsque le modèle agricole en question s’avère « productiviste ». Les mobilisations de Sainte-Soline, en 2023, contre les projets de mégabassines ont montré toute la centralité et l’actualité de ce sujet.
George Steinmetz, « Nourrir la planète ». Couvent des minimes.
Société : 40 ans de photographie sociale
Depuis quarante ans, Jean-Louis Courtinat s’attache à photographier ceux que la maladie, la misère ou la rue ont fragilisés. Avec délicatesse, il redonne corps et dignité à ces hommes, femmes et enfants que son objectif arrache à la marginalité. Héritier de l’humanisme de Robert Doisneau, avec qui il a travaillé, le photographe s’interroge sur la juste distance entre photographe et photographié : combien de temps faut-il pour que la confiance s’installe, pour que l’image reflète une vérité ? Son œuvre rappelle que chacun fait ce qu’il peut, le photographe comme ses sujets. Cette approche, loin de la résignation, ouvre un champ des possibles. Et dans cette attention aux détails, dans cette pudeur du regard, se dessine une morale discrète : celle d’un monde où la délicatesse nous aide à faire société.
Jean-Louis Courtinat, « 40 ans de photographie sociale ». Couvent des Minimes.
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