Alors que les parades de Noël défilent dans les communes des Pyrénées-Orientales en ce mois de décembre, les travailleurs du monde du spectacle jouent une part essentielle de leur chiffre d’affaires. Derrière les costumes de Père et Mère Noël, lutins et rois mages, ils jonglent avec un marché précaire fait de contrats courts et d’incertitudes.
Pères Noël intermittents du spectacle, lutins autoentrepreneurs et parade de prestataires : derrière les costumes des marchés de Noël se cachent une multitude de travailleurs. Pour beaucoup d’entre eux, les festivités de fin d’année sont cruciales dans leur rendement annuel. « La période de décembre, les artistes ne peuvent pas la louper », explique Guillaume Liégeois, de la compagnie des Lutins d’Or et d’Argent. Barcarès, Rivesaltes… ils parcourent les marchés des Pyrénées-Orientales, de la Saint-Nicolas à l’arrivée des rois mages. Les prestations de Noël représentent un quart de leurs revenus annuels.
Quelques semaines concentrent les enjeux financiers de toute une année. Or, ces artistes exercent parfois dans des conditions précaires. Cette année, dans les allées de chalets d’Espira de l’Agly, Anne-Lise propose des ateliers de décoration sur biscuits. Elle est au chômage et cherche à développer son activité. En même temps que ce service, elle a tenté de vendre un spectacle de danse. « Je n’ai pas eu de prestation sur la saison. Aujourd’hui, avec un statut d’intermittence ou d’auto-entreprise, c’est compliqué de se faire connaître ».
Le recrutement intransigeant des boîtes de prestation
Les compagnies dépendent aussi des sociétés de prestation. Des entreprises comme Anim’Passion, à Perpignan. Celles-ci jouent le rôle d’intermédiaires entre les offices de tourisme et les artistes à l’approche de Noël. Cracheurs de feu, échassiers, magiciens… elles embauchent en fonction de la demande. « On est une sorte de boîte ressources pour les mairies et associations », explique son gérant, Olivier Parra. « Sur un mois, on va tourner autour de trois ou quatre Pères Noël. » Lui-même enfile régulièrement le costume. Et le recrutement est implacable.
« On vérifie la qualité du personnage et la qualité humaine. C’est fondamental. Ensuite, on évalue la rigueur de la ponctualité. La mairie est dans l’attente, et derrière, ce sont les enfants », explique Olivier Parra.
Une erreur du Père Noël peut coûter cher. Laurent gère la société Roussillon Événement avec sa femme Laurence. Il joue le tiers de son chiffre d’affaires en décembre. « Je ne vais pas en recruter 36 000. Si vous proposez un mauvais Père Noël à un prestataire, l’année suivante, il ne vous prend plus pour tout le reste ». Le gérant tient à garder à taille humaine l’entreprise qu’il a créée il y a 15 ans.
« Sans noël, il n’y a pas d’équilibre du tout »
« On fait tout nous-même », raconte Laurent. Construction de décors, visites chez des particuliers pendant le réveillon… les périodes de fêtes sont synonymes d’un rythme de travail frénétique. Chaque dépense compte. Sur un marché, Laurent est par exemple Père Noël pour une heure, le temps de la prestation vendue. Puis il enfile un autre costume pour rejoindre la parade. « Quand les cadeaux sont distribués, on s’éclipse et on revient en mascotte. Cela évite de trop embaucher. Les intermittents ne peuvent pas venir pour une heure, ce sont des forfaits ». L’entreprise ne peut pas se permettre de déléguer davantage. Laurent lui-même travaille à côté de son activité d’événementiel. « Sans Noël, il n’y a pas d’équilibre du tout ». Le reste de l’année, ces artistes et compagnies vivent de prestations en particulier l’été, sur des structures gonflables ou lors d’évènements et festivals.
Pour consolider leurs modèles, prestataires et artistes tentent malgré tout de s’appuyer sur l’économie locale. Les Lutins d’Or et d’Argent se produisent dans la région essentiellement. « C’est moins de frais pour nous et pour les organisateurs. » Cela permet aussi de développer les résidences d’artistes. Ils travaillent leur performance tout au long de l’année dans des structures qui les accueillent. Cette organisation facilite une régularité dans les offres d’emploi. « On arrive à créer de la fidélité avec les artistes et techniciens. »
Au cœur de l’emploi flottant, d’année en année, les professionnels tentent de faire tenir la route au traîneau du Père Noël.
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