Article mis à jour le 7 juin 2024 à 12:24
Ce samedi 18 mai à 11h30, Raphaël Glucksmann, tête de liste Place Publique et Parti Socialiste, sera présent aux pieds du Castillet à Perpignan. Interview de Raphaël Glucksmann et Frédéric Monteil, directeur de cabinet du conseil départemental et 22e sur la liste présentée aux élections européennes du 9 juin prochain.
Selon Frédéric Monteil, l’accueil sur le terrain est positif
Si l’ensemble des sondages place le Rassemblement National largement en tête, la liste portée par Raphaël Glucskamn bénéficie d’une dynamique positive depuis le lancement de la campagne des élections européennes. Et sur le terrain, Frédéric Monteil, seul représentant des Pyrénées-Orientales sur la liste, constate bien le phénomène. À la fois « le niveau élevé du RN et la disparition progressive d’En Marche et des Républicains. »
Selon ce socialiste de la première heure, les électeurs de gauche « accueillent positivement le retour d’une parole socialiste raisonnable ». Pour Frédéric, cette dynamique est une première étape vers la reconstruction de la gauche au niveau national. Même si ces européennes ne préjugent pas des élections nationales à venir, « cela permet d’avoir à nouveau une voix audible dans ce maelström politique », déclare Frédéric Monteil avec soulagement.
Interview de Raphaël Glucksmann, tête de liste Place publique et Parti socialiste
(Made In Perpignan) – Comment se passe cette campagne électorale ?
(Raphaël Glucksmann) – Partout où je me rends, à Amiens, à Morsenx dans les Landes, à Saint-Ouen, à Limoges, à Nantes, à Toulouse, à Lyon, je sens la même ferveur. Nous avons initié une dynamique et partout des femmes et des hommes qui nous soutiennent la font vivre. Cette dynamique repose sur une chose simple, un vote heureux. Avec notre liste, beaucoup de femmes et d’hommes de gauche peuvent faire un choix sans renier aucun de leur engagement.
Nous nous engageons pour la révolution écologique, pour la formation des travailleurs et l’amélioration de leurs droits, pour des causes humanistes comme le “devoir de sauver” les migrants qui traversent, au péril de leur vie, la mer Méditerranée, ou la mise en œuvre, dès le 10 juin, de la clause de l’Européenne la plus favorisée. Nous continuerons, jusqu’au 9 juin, à répondre à cet enthousiasme, parce qu’il est le plus beau moteur de la démocratie.
Quelle est la mesure ou le dossier le plus important et/ou impactant que vous avez eu à défendre ou voter durant la mandature qui s’achève ?
Il est impossible pour moi de hiérarchiser les dossiers, les législations, les résolutions que nous avons adoptées par ordre d’importance. En revanche, si je dois choisir de raconter un combat législatif majeur de mon mandat, c’est celui du bannissement des produits du travail forcé du marché européen. Ce règlement, que j’ai négocié pour le groupe des Socialistes et Démocrates est la matérialisation réglementaire et concrète du projet que nous portons pour l’Europe: mettre la puissance commerciale et la puissance du marché européen au service de nos principes fondamentaux et de nos intérêts stratégiques.
C’est un des instruments qui nous permet de reprendre le contrôle de la mondialisation dérégulée et de protéger nos entreprises contre la concurrence déloyale de la Chine, qui exploite des esclaves Ouïghours pour fabriquer les produits qui inondent ensuite nos marchés à des prix cassés.
Cette législation est une des pierres angulaires du protectionnisme écologique européen que nous nous attellerons à édifier sans relâche au cours du prochain mandat. Il est fondé sur une idée très simple: les biens produits en violant les droits humains, les droits sociaux et en détruisant l’environnement à l’autre bout de la planète ne doivent pas entrer en Europe sans entrave. Nous imposerons aux autres les mêmes règles que nos producteurs européens appliquent ici.
Vous passez dans les Pyrénées-Orientales en coup de vent, est-ce à dire que Perpignan est perdue pour la gauche ?
L’extrême droite n’est pas et ne sera jamais une fatalité. Le sens de mon engagement c’est la défense de la démocratie, attaquée de l’extérieur par des ennemis de l’Europe comme Vladimir Poutine, et de l’intérieur par ses fossoyeurs d’extrême droite. D’ailleurs les deux sont des amis, Marine Le Pen n’est que le vassal du dictateur russe. Perpignan a longtemps voté à gauche, encore en 2012 c’est François Hollande qui arrivait en tête du second tour de l’élection présidentielle.
Dans cette campagne je me rends partout en France, à Montpellier mais aussi à Tournefeuille en banlieue de Toulouse, à Morcenx dans le cœur des Landes, à Saint-Ouen en banlieue parisienne, à Nantes, à Amiens. Je n’exclus aucun territoire parce qu’ils ont tous un lien avec l’Europe. À Perpignan nous ferons un grand meeting de plein air, populaire et ouvert à tous. C’est aussi cela réinventer la politique, revenir au plus près des gens, sur la place publique.
Est-ce que la gauche que vous représentez sait encore parler à Colombe ? Et comment concrètement pourriez-vous changer le quotidien de Colombe et des millions de personnes dans la même situation ?
Le témoignage de Colombe au micro de TF1 est bouleversant. Cette femme raconte, à elle toute seule, la nécessité que nous avons de rapprocher la politique et l’Europe du quotidien de tous les Français. La première chose que je veux lui apporter c’est de la sincérité. À Bruxelles comme à Paris, avec le Parti Socialiste, on dit ce que l’on fait et on fait ce que l’on dit. Je veux dire à Colombe que le RN c’est l’exact inverse. Elle dit défendre les travailleurs, mais elle s’oppose à l’augmentation du Smic à l’Assemblée Nationale. Elle dit protéger l’économie française mais elle vote contre le bannissement des produits de l’esclavage à Bruxelles.
Nos sociétés sont parmi les plus riches du monde et pourtant des familles n’arrivent pas à se chauffer l’hiver, des millions de jeunes font la queue aux banques alimentaires. Nos paysans ne vivent pas dignement de leur travail, et des millions de femmes comme Colombe n’arrivent plus à joindre les deux bouts. Notre projet européen est un projet de rupture. C’est un projet de prospérité partagée. En réformant le marché européen de l’électricité nous ferons baisser les factures des ménages, nous lancerons un grand plan européen d’investissement dans le logement social et abordable pour mettre fin au mal-logement qui touche 4,2 millions de Français et 20 millions d’Européens. Nous instaurerons une tarification sociale de l’eau pour faire payer moins cher les premiers mètres cube consommés alors que 20% des Européens les moins aisés sont en précarité hydrique.
Et nous ferons cela en remettant de la justice fiscale. Enfin les multimillionnaires et les milliardaires seront taxés équitablement. Nous prélèverons 2% de leur patrimoine. Nous taxerons également les superprofits des profiteurs de guerre et des multinationales qui payent moins d’impôts que nos artisans, nos commerçants et nos PME. C’est intolérable, nous y mettrons fin.
Compte tenu des sondages qui montrent le RN toujours plus haut, l’élection est-elle déjà jouée ?
Ne nous trompons pas d’élection. Ce qui se joue le 9 juin c’est la composition du Parlement européen. À Bruxelles les deux forces principales sont la droite républicaine (le PPE) et les sociaux-démocrates, le groupe dans lequel je siège. Le score du Rassemblement National en France est absolument anecdotique au regard du Parlement européen.
L’enjeu c’est de choisir l’Europe que nous voulons. Est-ce que nous voulons une Europe qui se jette dans les bras de Vladimir Poutine et qui détricote le Pacte Vert ? Est-ce que nous voulons une Europe qui continue d’écraser les travailleurs et d’organiser notre impuissance collective en sombrant dans le libre-échange incontrôlé ? Ou est-ce que nous voulons construire l’Europe du XXIème siècle, celle de la révolution écologique, du progrès social, de l’égalité entre les femmes et les hommes, du devoir de sauver les migrants qui se noient en Méditerranée.
En France, l’extrême droite et la macronie sont les deux gencives d’une même mâchoire. Ils cherchent à rejouer le même match, encore et encore. La réalité c’est que les partenaires néerlandais de Valérie Hayer s’allient avec l’extrême droite de Geert Wilders qui propose de fermer toutes les mosquées, de supprimer le Coran et d’organiser un référendum sur la sortie des Pays-Bas de l’Union européenne. Pendant que les macronistes servent de passe-plats, nous serons les leaders du front de résistance à cette vague d’extrême droite en Europe.
Selon vous, quelle est la première mesure forte qu’il est nécessaire de défendre pour la prochaine mandature en Europe ?
L’urgence, dès le lendemain de l’élection du 9 juin est de lancer le processus et les négociations avec nos partenaires pour l’adoption des fonds et la planification des investissements que nous portons pour réussir la transformation de notre continent, la révolution écologique et donner d’urgence à l’Europe les moyens d’assurer sa propre sécurité.
Nous mènerons bien sûr tous ces chantiers en parallèle. S’il s’agit d’une mesure individuelle que nous aurons à cœur d’adopter au plus vite dès le 10 juin: nous proposerons de mettre en place la “Clause de l’Européenne la plus favorisée” imaginée par Gisèle Halimi. C’est-à-dire que nous harmoniserons par le haut les droits des femmes en garantissant à toutes les Européennes les droits les plus protecteurs de l’UE. Et nous le ferons de manière contraignante, tous les États membres seront contraints de l’appliquer.
Par exemple, la durée de congés parentaux sera alignée sur le modèle espagnol, l’égalité salariale sera obtenue grâce au modèle scandinave. Nous ré-enchanterons l’idéal européen en revenant à ses fondamentaux : un espace de progrès partagé où chaque État peut s’inspirer de ses voisins pour faire mieux.
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