Article mis à jour le 28 décembre 2022 à 20:00
Plusieurs semaines après la fin de l’enquête publique sur le projet éolien de Passa, le commissaire enquêteur Jacques Zocchetto a rendu son arrêt. « J’émets un avis défavorable au projet d’implantation de six éoliennes à Passa« . Un avis clair, net et précis basé sur plusieurs critères dont la forte mobilisation contre ce projet d’implantation. En effet, l’enquête publique de Passa a généré au total 2.737 contributions pour 96,67 % d’avis défavorables.
Désormais, c’est au Préfet des Pyrénées-Orientales de prendre position dans ce dossier des éoliennes de Passa. Philippe Chopin dispose de 3 mois à compter de la fin de l’enquête publique pour se prononcer. Nous ferons évoluer cet article à la suite des réactions des différentes parties.
♦ « Imaginez des éoliennes à proximité du Mont Saint Michel ? »
Concernant l’impact visuel et paysager du projet de la société Éléments, Jacques Zocchetto n’y va pas par quatre chemins. Il soupçonne la société Eléments, porteuse du projet, d’avoir inséré dans son dossier des photomontages qu’il juge « non réalistes ». Montages qui « minorent la présence des massifs montagneux qui font le charme du terroir des Aspres ».
La société Eléments sur ce point se borne à répondre qu’ils n’ont fait que suivre la réglementation. Une législation qui, selon eux, « n’impose pas des photomontages à chaque saison. Mais que ces derniers soient proportionnels aux sensibilités locales et représentatifs ». Le fait qu’ils aient été réalisés par « un bureau d’études tiers expert en la matière » suffit selon la société à clore le débat sur leur fiabilité.
Quant à l’impact, Éléments assume « l’idée qu’un projet éolien s’insère dans des paysages et apporte une nouvelle dynamique ». Comparant l’implantation de ces structures (mesurant jusqu’à 152 mètres) à la construction d’un lotissement ou d’une zone d’activité en périphérie. Pour la start-up basée à Montpellier, l’éolienne n’est « qu’une des composantes paysagères d’un paysage, au sein d’une vue où le regard retient d’abord d’autres informations visuelles ».
Ces réponses n’auront pas suffi à convaincre le commissaire enquêteur. Pour ce dernier, « le projet impacte fortement le paysage des Aspres aussi bien les vues sur le massif du Canigou que celles sur le massif des Albères et la montagne de Céret ».
Rajoutant même : « Indéniablement, la présence d’éoliennes dans cet amphithéâtre naturel que sont les Aspres viendrait interférer sur la qualité des paysages. Le classement du massif du Canigou comme grand site de France s’en trouverait affaibli. Imaginez des éoliennes à proximité du Mont Saint Michel ? ».
♦ Une mobilisation rare et des permanences consultatives prolongées de plusieurs heures
L’enquête a connu une participation exceptionnelle du public, des associations et des élus des communes voisines du projet.
Cette participation « record » s’est vérifiée lors des cinq permanences où les créneaux horaires prévus ont dû être prolongés de plusieurs heures afin que chacun puisse rencontrer le commissaire enquêteur, au vu du nombre d’observations portées sur les cinq registres à disposition du public en mairies (126 contributions), compte tenu du nombre très important de courriers adressés directement au commissaire enquêteur (75 lettres) et de courriels accompagnés de nombreux documents sur le site internet de la préfecture (543 contributions).
Une pétition spécifique au projet de Passa portée par l’association « Le vent tourne » a réuni près de 1.942 signatures. Une autre pétition du lotissement « Le panoramique » a rassemblé 24 signatures contre le projet. Au total, l’enquête publique a généré 2.737 contributions pour 96,67 % d’avis défavorables.
♦ Les éoliennes de Passa cristallisent-elles toutes les tensions ?
Cette enquête publique a mobilisé fortement et suscité du débat dans les villages mais également dans les médias. Jacques Zocchetto considère donc que l’enquête publique a atteint ses premiers objectifs. Informer le public et susciter son intérêt afin de recueillir son avis sur le projet.
Mais selon Jacques Zocchetto, l’enquête publique s’est déroulée dans une ambiance tendue. Notamment du fait de l’inquiétude, voire de l’hostilité, de très nombreux habitants des Aspres face aux projets éoliens annoncés dans la région. Questionné sur cette thématique par l’enquêteur, le Docteur Charles Leemans de Banyuls-Dels-Aspres témoigne :
« J’exerce en tant que médecin généraliste à Banyuls-Dels-Aspres depuis 26 ans. J’observe depuis deux ans une tension qui monte au sein de la population locale entre la majorité des personnes opposées aux projets éoliens et une minorité intéressée. Un climat d’inimitié s’est installé durablement. Les colères exprimées ou contenues sont vives et délétères pour la cohésion sociale. Je vous laisse imaginer le climat définitivement toxique, une fois le dispositif installé. »
♦ Les prochaines étapes du dossier des éoliennes de Passa
Désormais, le Préfet du département a jusqu’au 27 décembre pour statuer sur les éoliennes de Passa et publier un arrêté. En effet, la législation prévoit un délai 3 mois après la clôture de l’enquête publique pour la publication. Un arrêté qui pourra être favorable ou défavorable au projet éolien de Passa. Durant ce laps de temps, la Commission Départementale de la Nature, des Paysages et des Sites devra également rendre un avis dans ce dossier.
Après la publication de l’arrêté préfectoral, s’il est défavorable, Eléments pourra faire appel devant le tribunal administratif dans un délai de 2 mois. Les tiers (opposants, habitants) auront, quant à eux, 4 mois pour faire appel d’une décision.
Contacté à la suite de la publication de la décision du commissaire enquêteur, un membre du collectif le vent tourne se dit satisfait de cette première victoire. Mais il reste sur la réserve compte tenu des possibilités de recours, mais aussi des autres projets à l’étude sur le secteur des Aspres.
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