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Identités de genre dans les Pyrénées-Orientales : l’association LGBT+ 66 sensibilise les encadrants des collèges et lycées

France, Perpignan, 2021-06-15. Illustration, . Photograph by Arnaud Le Vu / Hans Lucas.
France, Perpignan, 2021-06-15. Illustration, . Photographie de Arnaud Le Vu / Hans Lucas.

Article mis à jour le 8 octobre 2025 à 08:44

C’est une première pour notre département. Dans le cadre du plan départemental contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT, des cadres d’établissements publics vont être mieux informés pour accompagner des élèves en questionnement sur l’identité et le genre.

Cette mission de sensibilisation, soutenue par l’Education nationale, devrait commencer prochainement par des demi-journées d’information auprès de responsables d’établissements, CPE et autres cadres des collèges et lycées des Pyrénées-Orientales.

« Tous ont déjà été confrontés à des questions auxquelles ils étaient en difficulté pour répondre » explique Marie-Pierre Delattre, de l’association LGBT+ 66.

L’information portera sur les notions de sexe biologique, d’orientation sexuelle, d’identité de genre et d’expression de genre. L’idée est de permettre une approche de la diversité et surtout d’accompagner tous les élèves vers la réussite quelles que soient leurs situations.

Eviter que des problèmes non résolus pèsent sur le climat scolaire

Exemple parmi les questions abordées, quels pronoms et prénoms utiliser pour un élève inscrit comme fille et en transition pour devenir garçon ? Comme l’explique Marie-Pierre Delattre, l’autorisation parentale va être systématiquement nécessaire dans ce type de problématique. Les questions de mixité dans les toilettes, dortoirs et internats seront aussi soulevées. « L’objectif est de faire en sorte qu’il n’y ait pas de frein à la réussite scolaire lié à des questions qui ne seraient pas résolues. La réussite des enfants passe par leur épanouissement et un bon accompagnement de leur trajectoire. »

Pour Marie-Pierre Delattre, continuer à sensibiliser reste important dans un monde où la haine et la désinformation règnent sur les questions de genre. Elle évoque la transphobie, très à la mode dans les milieux réactionnaires, mais plus généralement l’homophobie qui est loin d’être résolue en 2025.

« Quand on intervient dans des classes on entend encore des élèves dire ‘si mon père apprenait que j’étais gay il me tuerait’. Tout ce qu’on peut faire à notre niveau, ça vaut pour toutes les différences, pour combattre le racisme, la grossophobie, le rejet du handicap. Il y a un retour en arrière sur la liberté d’aimer, et la liberté d’être, tout simplement. »

Selon la représentante de l’association, il reste plus difficile pour les adolescents de dire « je suis gay » que pour les adolescentes de dire « je suis lesbienne » ou « je suis bisexuelle ». « Etre gay, ce n’est pas terrible par rapport aux copains, on s’expose à plus de jugement. »

Les cris d’orfraie des complotistes

La haine est alimentée par une désinformation émanant de minorités contestataires, parfois religieuse, avec une confusion entre égalité et uniformité. Elle a commencé dès 2014 quand des écoles ont expérimenté l’ABCD Egalité contre les stéréotypes de genre. A l’époque, dans les Pyrénées-Orientales, des parents recevaient des textos alarmistes leur intimant de retirer leurs enfants des écoles. Mêmes levées de bouclier avec les EVAR et EVARS (NDLR : voir encadré plus bas) dans les établissements scolaires, des programmes qui abordent entre autres les discriminations sexuelles, les identités de genre, le consentement etc.

Les mouvements et relais d’extrême droite s’efforcent de désinformer en assurant que l’Education nationale encourage des pratiques sexuelles à l’école, comme la masturbation à la maternelle, ou qu’on apprendrait aux petits garçons à se maquiller ou à douter de leur genre.

Sur les réseaux sociaux, les organisations militantes tels que les Mamans louves, le Syndicat de la famille ou SOS éducation diffusent divers appels au boycott des EVARS. Pour elles, les programmes d’éducation à la vie affective et sexuelle seraient des « dispositifs construits avec amateurisme » et des outils de « promotion de la pédophilie ». Pèle-mêle, ces associations se positionnent contre le « féminisme woke », « l’écriture inclusive », « l’infiltration LGBTQUIA+ », « l’institutionnalisation de la pensée queer dès la maternelle », la PMA et autres GPA. Des affirmations qui ne correspondent en rien au contenu des lois et circulaires en question.

Le paradoxe des jeunes, à la fois plus tolérants et plus exposés aux propos transphobes et homophobes

Pour Marie-Pierre Delattre il y a une polarisation des positions. « Il y a un milieu anti-femme, anti-sexualité… C’est un monde très paradoxal car nous rencontrons des adolescents bien plus tolérants qu’il y a cinq ou six ans, et c’est plutôt positif. Et en même temps il y a une libération d’une parole homophobe et transphobe qu’on n’entendait pas et qui maintenant s’exprime. C’est une libération de la parole de haine contre l’altérité. »

Pour Marie-Pierre, plutôt que d’entrer dans les polémiques, il faut souvent se rattacher au concret et au pratique. Sur la question des toilettes et de la transidentité, beaucoup d’élèves se questionnent suite à des messages vus sur les réseaux sociaux. « Dans un restaurant il y a parfois des toilettes mixtes, ça ne pose pas de question. Ce qui compte c’est l’intimité, être seul dans les toilettes peu importe ce qui est marqué sur la porte. (…) Il faut revenir un peu au bon sens. »

Les premières séances d’information au personnel encadrant devraient se dérouler d’ici la fin de l’année.

Quelques programmes autour de l’identité dans l’Education nationale :

2014 : Le programme ABCD Egalité, sur les stéréotypes de genre, est expérimenté dans des écoles, dont certaines des Pyrénées-Orientales.

2018 : Publication de la circulaire Education, Vie Affective et Sexuelle sous le ministre Blanquer (mais avec quelques manques comme la transphobie ou l’IVG, laquelle est finalement entrée dans la Constitution avant d’entrer dans les programmes de l’Education nationale).

2025 : Mise en oeuvre des EVAR (Education à la vie affective et relationnelle) dans le premier degré et EVARS (Education à la vie affective et relationnelle et à la sexualité) au collège et au lycée. Cette approche inclut sur la prévention des violences sexistes et sexuelles, les questions de santé publique comme la contraception etc.

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