Article mis à jour le 8 septembre 2022 à 14:59
La crise des migrants marquera à nouveau cette 28ème édition de Visa pour l’image. Jean-François Leroy et son équipe ont sélectionné trois expositions sur le sujet. Le Couvent des Minimes accueillera le travail de Yannis Behrakis – « Les chemins de l’espoir et du désespoir », Aris Messinis (AFP) « Scènes de guerre en zone de paix », et Marie Dorigny pour les « Femmes en exil – Displaced ». Ces deux derniers reportages reviennent sur le drame humain de l’île de Lesbos depuis 2015. Cette petite île grecque est en première ligne pour accueillir les plus de 850.000 personnes qui fuient la crise en Syrie. Nombreux sont ceux qui ont péri en tentant la traversée de la méditerranée, à l’instar du petit Aylan, comme endormi sur la plage, avait ému la communauté internationale en septembre 2015.
Le sort funeste des enfants depuis le début de la guerre en Syrie ne s’arrête pas aux îles grecques. La dernière image qui choque les esprits est celle du petit Omran, étrangement calme après avoir été extrait des décombres de son immeuble bombardé par la coalition contre DAESH à Alep.
♦ Yannis Behrakis « Les chemins de l’espoir et du désespoir »
Le photographe grec de l’agence Reuters a parcouru pendant plus de trente ans le monde en captant les images des « maltraités, des torturés, des opprimés, de ces populations contraintes à l’exil à cause des guerres, des famines ou autres conflits dans leur pays ». Ses clichés montrent le caractère cyclique des crises qui ont pour conséquence l’exode massif. Son histoire familiale personnelle résonne dans celle des réfugiés qu’il photographie.
«Lorsque j’ai vu les réfugiés entreprendre la traversée depuis les côtes turques vers les îles grecques, j’ai voulu me faire leur porte-voix, au nom de mes valeurs humanitaires et en mémoire de ma grand-mère.
Je souhaitais devenir la voix des persécutés et les yeux du monde entier. Travailler pour Reuters signifie que mon public, c’est le monde entier, et cela fait peser une énorme responsabilité sur mes épaules. En regardant mes photos et mes reportages, plus personne ne pourra dire : “Je ne savais pas” »
♦ Aris Messinis « Scènes de guerre en zone de paix »
Ce photographe grec et responsable de l’AFP pour la Grêce a pris de plein fouet la souffrance des milliers de personnes arrivant sur les côtes de l’île de Lesbos. Une souffrance humaine identique à celle des zones de conflit alors que la Grèce n’est pas en guerre et qu’il ne courrait aucun danger en prenant ses clichés. Un véritable paradoxe qui le hantait et qui le poussait parfois à lâcher son appareil et aider les réfugiés à débarquer de leur frêle esquifs.
« Les bateaux sont si nombreux et l’approche du rivage est difficile. Il y a beaucoup de rochers et même lorsque le rivage est tout près, le danger est là. Ce qui me touche le plus, ce sont les bébés, sans doute parce que j’ai une fille de un an. Mon pire souvenir, c’est lors du dernier grand naufrage, quand je suis allé au port, qu’ils ramenaient les premiers bébés qui s’étaient noyés et qu’ils essayaient de les ranimer ».
♦ Marie Dorigny « Femmes en exil – Displaced ».
La photographe fin 2015, au moment où l’Europe touchée par le sort du petit Aylan, « a fait un geste. Elle entrouvre sa porte ». Marie Dorigny suivra ces femmes, dont la situation inquiète le parlement européen, « depuis les plages de Lesbos jusqu’aux foyers d’Allemagne ». Judith Perrigon, journaliste, nous raconte le travail de Marie Dorigny
« En mars 2016, l’Union européenne et la Turquie signaient un accord pour réduire la migration vers l’Europe. Il n’y a donc plus autant de bras volontaires offrant secours et étreintes sur les plages de Lesbos, un cordon policier les empêche d’approcher. Plus de camp de transit, on l’appelle centre de rétention. Plus de passage ouvert entre la Grèce et la Macédoine. Plus de bus, de trains, plus d’escorte officielle. Les passeurs ont repris leur criminel marchandage.
Ces photos sombres racontent donc une éclaircie. Ces visages hébétés, inquiets, épuisés, un vague sentiment de sécurité. Ces trains bondés filant dans la nuit, un moment d’ouverture. Ces foyers froids d’Allemagne sont la terre promise.
Ces photos racontent le maximum que l’Humanité sut offrir. Elles ne pourraient plus être prises aujourd’hui ».
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