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Lutte contre le travail dissimulé : Redressement record en Languedoc-Roussillon, et baisse dans les Pyrénées-Orientales

Lutte contre le travail dissimulé : Record de redressement pour le Languedoc-Roussillon, mais en baisse dans les Pyrénées-Orientales

Article mis à jour le 19 mars 2025 à 11:46

En 2024, les montants redressés par l’Urssaf ont chuté dans les Pyrénées-Orientales, atteignant 1,65 million d’euros. Une baisse liée à la formation de nouveaux inspecteurs, mais qui devrait être largement compensée en 2025, avec déjà 3 millions d’euros récupérés sur les trois premiers mois. Photo © Unsplash.

Entretien avec Elidie Mentrel, directrice départementale de l’URSAFF, sur ce bilan.

Baisse du redressement dans les Pyrénées-Orientales … avant un rebond en 2025

1.65 millions d’euros redressés auprès d’entreprises en 2024, soit une baisse de 22% par rapport à l’année précédente : « On a effectivement baissé à la fois en nombre d’actions et en nombre de redressements dans les Pyrénées Orientales », confirme Elidie Mentrel, Directrice départementale à Perpignan. La faute à un temps nécessaire de formation de deux nouveaux inspecteurs spécialisés. « On a donc pu être moins présents sur le terrain. Mais maintenant que nos deux inspecteurs sont opérationnels, on en est déjà à trois millions d’euros de redressés pour les trois premiers mois de 2025. Et ça ne pourra qu’augmenter. On imagine une multiplication [de ce chiffre] par trois pour l’année ».

A l’échelle du département, les secteurs les plus concernés par le travail dissimulé sont le BTP, qui représente presque 50% des cas, la sécurité (35%), le nettoyage à 4%, et – spécificité du département par rapport au Languedoc Roussillon – le secteur de l’hôtellerie et de la restauration à 5%. « C’est une région côtière et saisonnière », explique Elidie Mentrel. Pendant la saison touristique, « on majore nos actions sur les hôtels, cafés et restaurants ».

L’essentiel des redressements a été réalisé dans l’Hérault, qui enregistre 45,49 millions d’euros (+135 % en un an). Le Gard suit avec 5,43 millions d’euros (+13,5 %). L’Aude enregistre également une baisse notable des montants récupérés, avec 1,55 million d’euros (-51 %).

Languedoc Roussillon : un redressement de plus de 54 millions d’euros en 2024

À l’échelle du Languedoc Roussillon, peu de différences dans la répartition par secteur : les plus concernés étant le BTP (27,12 millions d’euros de redressements), la sécurité (18,61 millions d’euros) et le nettoyage (1,8 million d’euros).

L’année 2024 marque un tournant dans la lutte contre le travail dissimulé en Languedoc-Roussillon, avec un total de 54,2 millions d’euros de cotisations et contributions sociales redressées par l’Urssaf, soit une forte augmentation de 84,7 % en un an. En une décennie, les sommes redressées ont été multipliées par 6,8, et elles ont plus que doublé entre 2022 et 2024.

À l’échelle nationale, l’Urssaf a mené 1 712 actions de lutte contre le travail dissimulé en 2024 (+38,9 % par rapport à 2023), dont 208 contrôles ciblés, qui ont abouti à 99,5 % de redressements.

Prévention et nouvelles stratégies de détection

En parallèle des actions répressives, 1 478 interventions préventives ont été réalisées dans le Languedoc-Roussillon. « C’est une mission qui prend de plus en plus de place. Nos inspecteurs vont expliquer l’importance d’être à jour dans ses obligations sociales, et la démarche de déclaration, puisque parfois, certaines entreprises se cachent derrière la complexité administrative ».

L’Urssaf a professionnalisé ses inspecteurs spécialisés et accentué ses contrôles sur les entreprises ayant recours au travail détaché, lorsqu’un salarié est envoyé à l’étranger, par son employeur d’origine, pour effectuer un travail pendant une durée déterminée. L’institution a également renforcé son ciblage grâce au datamining, « un croisement de données fait par un algorithme, qui analyse les secteurs d’activité, le nombre de cotisants, le nombre de salariés déclarés, selon le secteur géographique … C’est un système national, et qui nous donne des listes d’entreprises à fort risque de fraude. Ensuite, c’est à nous d’aller contrôler », explique Elidie.

« On joue sur la surprise »

Des partenariats stratégiques avec la police, la gendarmerie, l’Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) et TRACFIN ont été développés pour améliorer l’efficacité des interventions.

« Nos inspecteurs ne se déplacent jamais seuls. Imaginons qu’il y ait un chantier, une maison qui se construit à côté de la vôtre. Nos inspecteurs [accompagnés de nos partenaires] vont voir les ouvriers. Ils leur demandent nom, prénom, numéro de sécurité sociale. Et ensuite, nous vérifions dans nos bases, en temps réel, si le salarié est déclaré ou non. Certains vont être un peu complices, et nous dire « Je viens d’arriver, je suis sur le chantier depuis ce matin ». On peut le croire, mais on doit vérifier. Il faut aussi vérifier le nombre d’heures effectuées sur la journée, puis nous confrontons ce qui nous a été dit et ce qu’a déclaré l’employeur », raconte Elidie Mentrel. « Ce n’est pas comme un contrôle classique où on prévient l’entreprise un jour avant qu’on va leur demander des documents comptables. Là, au contraire, on joue sur la surprise ».

L’URSAFF va également croiser ses données avec celles de la CAF, en quête d’une augmentation soudaine du nombre de primes d’activités, par exemple ; ou avec la Direction des finances publiques. Un véritable travail de collaboration interservices. Les salariés peuvent également saisir l’URSAFF s’ils constatent que leur fiche de paye ne correspond pas au nombre d’heures effectuées.

Il n’existe pas – encore – par l’URSAFF d’analyse des profils des salariés en situation de travail dissimulé. En revanche, ce qui est su, c’est que « bien souvent, eux-mêmes sont victimes et ne sont pas au courant de leur situation. On peut parler de travail illégal, lorsqu’ils ne sont pas du tout déclarés ; ou alors de travail dissimulé, lorsqu’ils sont déclarés, mais pas pour la totalité de leurs heures » explique la Directrice départementale.

Un enjeu pour le financement de la protection sociale

Les pertes liées au travail dissimulé sont estimées entre 7 et 9 milliards d’euros au niveau national. Les 54,2 millions d’euros redressés en 2024 en Languedoc-Roussillon représentent, à titre d’exemple, l’équivalent de 131 800 allocations de rentrée scolaire, 3 millions de consultations chez un médecin généraliste ou encore 22 580 accouchements.

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