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« 42 maires démissionnent tous les mois » : À Perpignan, le « bien-être » des élus parmi les enjeux du Salon des maires de 2025

Article mis à jour le 21 mars 2025 à 11:56

Stress, vie de famille déséquilibrée, manque de valorisation, lourdeur administrative sont autant d’arguments qui poussent certains maires à ne pas se représenter voire à démissionner. Le Salon des maires de Perpignan a été l’occasion pour les élus départementaux et l’Association des Maires de France (AMF) de discuter avec les édiles sur les difficultés qu’ils rencontrent.

« 42 maires démissionnent tous les mois », déplore David Lisnard, président de l’AMF. Jeudi 20 mars, les portes du Parc des expositions de Perpignan se sont ouvertes pour accueillir le grand raout qui réunit chaque année les élus des collectivités. L’occasion pour les maires et autres présidents d’intercommunalités de revenir sur les problématiques auxquelles ils et elles font face, et confier qu’ils ne se sentent plus considérés à hauteur de leurs efforts.

David Lisnard, président de l’AMF ce jeudi 20 mars, au Salon des Maires à Perpignan
David Lisnard, président de l’AMF ce jeudi 20 mars, au Salon des Maires à Perpignan

Dans les allées du Salon, une question subsiste pour les maires. À moins d’un an des prochaines élections municipales, pour certains élus, le souhait de renouveler leur mandat n’est pas encore une certitude. L’Association des maires de France a révélé dans une de leurs enquêtes un chiffre clé : 83 % des maires estiment que leur mandat est « usant pour leur santé ». Une étude nationale mais qui se reflète dans les Pyrénées-Orientales. « Il n’y a pas de raison que ce ne soit pas le cas dans notre département », estime Edmond Jorda, président de l’AMF 66.

Les conséquences du mandat sur la vie personnelle des maires

« On sacrifie une part de notre vie professionnelle et de notre vie familiale », déplore Edmond Jorda, assis au stand de l’AMF66. C’est un point souvent cité par les édiles. Il est difficile de trouver l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. 41,5 % des maires déclarent travailler fréquemment entre 20h et minuit. Tous réunis pour le buffet d’ouverture du Salon des maires, les élus ont pu revenir sur cette problématique.

Edmond Jorda, président de l'AMF66 lors de l'ouverture du Salon des Maires à Perpignan
Edmond Jorda, président de l’AMF66 lors de l’ouverture du Salon des Maires à Perpignan

Marius Hugon, maire de Porta, le confirme « On est maire 24 heures sur 24 ». Dans son village de 145 habitants, tout le monde a son numéro de téléphone. En cas d’urgence dans le village, c’est lui qu’on appelle. Cependant, selon ce dernier cette disponibilité fait partie intégrante de son rôle de maire : « Moi j’aide les habitants ».

Selon les élus, les indemnisations n’étant pas suffisantes, ils sont très souvent dans l’obligation d’avoir un emploi à côté. Ainsi, les réunions après 18h, soit après les horaires de bureau, sont monnaie courante. « Être maire, c’est chronophage », souligne Jacqueline Irles, maire de Villeneuve-de-la-Raho, comptant 4 270 résidents.

Un équilibre avec la vie personnelle également fracturé pour David Planas, maire d’Arles-sur-Tech, une commune de 2 794 habitants. En parallèle de son rôle de maire, ce dernier possède sa propre entreprise d’assurance. « Les gens viennent me voir sur mon lieu de travail pour parler mairie », explique le maire.

Dévalorisation du statut du maire

En 2023, 62 % des maires déclaraient ne pas ressentir la reconnaissance de leurs citoyens. Cette statistique illustre bien un autre phénomène, le sentiment des maires selon lequel leur statut est dévalorisé. « Il y a une véritable mutation de la société qui s’est opérée depuis le Covid. On est dans la société de l’immédiateté, des réseaux sociaux, de la critique, sans une véritable réflexion », regrette Edmond Jorda. Maire de Villeneuve-de-la-Raho depuis quatre mandats, Jacqueline Irles partage ce sentiment : « On sent une différence dans le statut d’élu, il n’y a plus de respect ».

Une violence dont la maire a subi les conséquences. Cette dernière a déposé plainte après avoir reçu un mail anonyme comportant des menaces. En 2023, 69 % des maires déclaraient avoir subi des incivilités, contre 53 % en 2020. D’autres violences ont été commises à leur égard comme des injures et des insultes (39 %), des attaques sur les réseaux sociaux (27 %) et du harcèlement moral (19 %). Quelques mètres plus loin, c’est un discours plus nuancé que porte Marius Hugon. À Porta, le maire déclare ne pas avoir de problèmes : « On est tranquille, le fait que le village soit en retrait, on est épargné ».

« 400 000 normes » à appliquer 

Une autre doléance exprimée par les élus est la lourdeur administrative. « Il y a toujours des obligations, des exigences, de nouvelles normes, de nouvelles demandes », déplore Jacqueline Irles. Même son de cloche de la part d’Edmond Jorda : « Chaque maire est confronté à l’application de « 400 000 normes « ». Selon ce dernier, également maire de Sainte-Marie-la-Mer, les maires sont devenus des « sortes de sous-traitants des politiques publiques de l’État ».

Une administration qui est d’autant plus complexe à gérer dans les petites communes. David Planas, explique que dans certains villages, « Il n’y a que le maire, le secrétaire et peut-être un employé. Dans ces cas-là, il faut tout gérer ». Un constat similaire de la part de son homologue de Porta : « Dans ma commune, j’ai des employés techniques, des secrétaires. Je connais des communes de même taille, où il y a un secrétariat, seulement deux fois par semaine ».

La question de l’indemnisation pose aussi problème. Selon l’Observatoire de la démocratie de proximité, en 2024, 48 % des maires estimaient que le salaire qui leur est versé est insuffisant. Un sentiment grandissant lorsque l’on sait que ce pourcentage était de 25 % en 2020. Le président de l’AMF 66 déclare à ce sujet : « Il faut avoir des indemnités à la hauteur de notre engagement et de nos responsabilités ».

À un an des élections municipales, certains maires choisissent de ne pas renouveler leur mandat. C’est notamment le cas de Laurent Leygue, maire d’Estavar, qui, à cause des conditions de travail ne se représentera en 2026.

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