Article mis à jour le 21 décembre 2024 à 12:53
Ancien militaire, Pascal Lemaire est responsable mécanicien à la base de la Sécurité civile de Perpignan. Depuis 16 ans, le technicien veille jour et nuit à ce que l’hélicoptère de secours EC 145 soit toujours prêt à décoller. Focus sur ce métier aussi essentiel que méconnu. Photos © Sécurité civile.
En France, près de 200 mécaniciens et pilotes d’hélicoptères travaillent à la Sécurité civile. À bord du célèbre Dragon 66, Pascal effectue des missions de secours aux biens et aux personnes, en montagne comme en pleine mer. En cas d’urgence, l’hélicoptère doit décoller en moins de 20 minutes de l’aérodrome Perpignan-Rivesaltes.
« Quand vous partez en intervention, vous ne savez jamais quand vous allez revenir »
Passionné, Pascal connaît les caractéristiques du Dragon 66 sur le bout des doigts. Avec trois autres mécaniciens, ils s’occupent de réaliser la maintenance préventive et curative de l’appareil. « Une machine va de 0 à 800 heures de fonctionnement sur base. Toutes les 50, 100, 300 et 400 heures de vol, nous avons des interventions plus ou moins techniques à réaliser », nous explique-t-il. La plus importante se pratique toutes les 400 heures où une grosse partie de l’hélicoptère est démontée, engendrant trois ou quatre jours de maintenance.
Au quotidien, Pascal est en « permanence opérationnelle », autrement dit, dans l’attente de partir en secours. En fonction de sa mission, le mécanicien équipe l’hélicoptère d’un phare de nuit, d’un crochet pour lever des charges ou d’un treuil. Parmi ses partenaires, le PGHM (Unités de montagne de la Gendarmerie nationale), les pompiers du GRIMP (Groupe d’intervention en milieu périlleux) ou les équipes de secours nautiques. À bord, Pascal fait le trait d’union entre le pilote et les personnes en détresse.
« Quand vous partez en intervention, vous ne savez jamais quand vous allez revenir », assure le technicien. Lors d’inondations ou de tempêtes, Pascal est amené à se déplacer en dehors de sa zone d’intervention. En septembre dernier, 40 mm de pluie sont tombés à Cannes, en seulement une demi-heure. « Le Dragon 66 a été mobilisé pendant quasiment deux semaines. »
Des interventions marquantes à bord du Dragon 66
Il y a onze ans, la Garonne en crue dévastait le petit village de Saint-Béat. Accompagné d’un collègue, Pascal extrait de justesse plusieurs personnes piégées par la montée des eaux. « Quand on est revenu 10 minutes plus tard, les maisons avaient disparu… », se remémore le mécanicien. « On prend conscience que la vie peut basculer en très peu de temps. »
Malgré une préparation millimétrée, toutes les interventions ne sont pas couronnées de succès. « Parfois, on dépose des secouristes en treuillage et on les récupère dans une civière », confie Pascal. « On ne part jamais en se disant que c’est un truc tranquille, on ne sait jamais à l’avance ce qu’on va trouver et comment ça va se passer. »
En cabine, le mécanicien a un siège mobile lui permettant d’accéder à l’arrière de l’appareil. « Lorsqu’on passe en opération de treuillage ou en opération de sling, notre position est à l’extérieur, sur le patin. » Souvent, l’équipe est appelée pour secourir des randonneurs en montagne. « Il y a une prise d’alerte avec un maximum d’informations qui ont été demandées. Si une personne est égarée ou fatiguée, les risques sont importants. »
L’équipage s’impose des limites à ne pas franchir
« La météo, les performances de la machine, l’état de fatigue de l’équipage… sont autant de facteurs qui rentrent en ligne de compte », affirme Pascal. « En cas d’imprévu sur une mission, on essaye de mettre d’autres vecteurs en place ou d’autres moyens techniques. Mais nous ne sommes pas jusqu’au boutiste », prévient-il. La mission peut par exemple être stoppée en cas de forte tramontane ou d’un dépassement de performance de la machine. Quand le risque devient trop grand, il faut savoir renoncer.
Au sein de la Sécurité civile, les crashs d’hélicoptères sont courants. En 2019, l’équipage de la Sécurité civile du Dragon 30 perdait la vie en mission. « Ils ont percuté le flanc de la montagne », raconte Pascal. « Leur équipage était intervenu à plusieurs reprises pour secourir les victimes des inondations dans le Var. » Pour le mécanicien, ces périodes sont toujours difficiles à vivre. « Nous ne sommes pas nombreux à la Sécurité civile, donc tout le monde se connaît. »
Un tout nouvel hélicoptère pour la Sécurité civile des Pyrénées-Orientales
L’année prochaine, la Sécurité civile recevra un tout nouvel hélicoptère. « Du 145 C2, nous allons passer à un H145 D3. C’est quasiment la même carrosserie, mais la poutre de queue évolue, les deux moteurs sont beaucoup plus puissants et toute la tête rotor (partie rotative d’un hélicoptère) a été changée. C’est vraiment de l’avionique nouvelle génération », sourit le mécanicien. L’appareil conçu par Airbus vaut près de 14 millions d’euros.
Si les machines évoluent, les missions aussi. « Quand je suis rentré à la Sécurité civile, j’étais sur l’Alouette, à Strasbourg. C’était une machine plus petite, un peu moins puissante. Les méthodes de travail n’étaient pas les mêmes », reconnaît Pascal. À l’époque, il n’était pas question de réaliser un treuillage en mer, de nuit, et sur un bateau ! Une mission totalement envisageable aujourd’hui, à bord de l’EC 145. « On peut faire le parallèle entre le tableau de bord d’une 2CV et celui d’une voiture électrique », plaisante le mécanicien.
En 20 ans de carrière au sein de la Sécurité civile, Pascal a pu travailler sur trois types d’hélicoptères. « À chaque fois, c’est une remise à zéro, cela permet de reprendre un nouvel élan dans sa carrière. » Avant de partir en mission à bord du D3, Pascal devra effectuer près deux mois de formation : une première semaine de remise à niveau en anglais, trois semaines de stage en Allemagne et une nouvelle semaine de stage spécifique au moteur. À 56 ans, Pascal reste mordu de son métier, comme au premier jour.
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