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Dans les Pyrénées-Orientales, cette artisane est l’une des dernières maréchales-ferrantes

Dans les Pyrénées-Orientales, cette artisane est la dernière maréchale-ferrante

Article mis à jour le 12 janvier 2025 à 10:34

Aux quatre coins du monde, le maréchal-ferrant perpétue un artisanat ancestral. Cela fait 25 ans que Maud sillonne les routes des Pyrénées-Orientales et de la région pour ferrer, parer et soigner chevaux et ânes. Ce mardi 7 janvier 2025, l’artisane était en visite au refuge Torreilles Ânes et compagnie, qui recueille des animaux sauvés de la maltraitance. Focus sur ce métier itinérant.

« Dans n’importe quel pays du monde, vous trouverez un maréchal », lance Maud, passionnée par le monde équestre depuis son enfance. Celle qui a grandi dans un ranch observait avec admiration le travail du maréchal-ferrant de l’époque. Malgré son jeune âge, elle se rêve déjà maréchale. « Il faut être né pour ça », assure-t-elle. « Mon métier, c’est que du bonheur. Il n’y a pas un jour où je me suis levée, et où je n’avais pas envie de ferrer. »

« Le métier de maréchal-ferrant, ce n’est pas que des fers »

Si c’est d’abord le contact avec l’animal qui a attiré Maud vers cette profession, très vite, elle se découvre une passion pour le travail du fer. « Le côté artisanal me plaît énormément, j’aime la pose à chaud sur le sabot… », nous décrit Maud. Cette technique laisse une trace sur le fer, permettant de l’ajuster au mieux à la forme du pied. Maud rappelle que c’est le fer qui s’adapte au cheval et non l’inverse.

Maud s’adapte au mode de vie des animaux d’aujourd’hui. Au risque de faire bondir certains maréchaux, l’artisane ne pratique pas systématiquement le ferrage. « Le métier de maréchal-ferrant, ce n’est pas que des fers. C’est aussi le pied du cheval, qui peut rester à nu. Nous ne sommes plus dans une époque où le cheval travaille tous les jours. » Pour Maud, le fer doit avoir un intérêt pratique. Aujourd’hui, la plupart des fers sont fabriqués en usine. « On fabrique encore des fers orthopédiques. Ces fers, on va les mettre dans la forge, on va les chauffer et une fois qu’on a fait notre parage, on va les tourner à la forme du pied du cheval. »

Si elle a toujours été cavalière, elle préfère de loin soigner les chevaux. « C’est une autre relation, plus forte que si je venais pour seller un cheval et le monter. Là, il y a un accompagnement. C’est vraiment un travail sur du long terme. » Au fil des années, Maud a noué une relation presque fusionnelle avec les chevaux qu’elle visite en moyenne une à deux fois par mois.

La difficulté du métier, c’est de durer dans les années

Au volant de sa forge ambulante, Maud écume chaque jour les routes de la région. Aujourd’hui, la maréchale-ferrante nous reçoit à l’association Torreilles Ânes et compagnie où elle doit s’occuper d’une ânesse au pied attaqué par la fourmilière. Cette maladie se traduit par une infection des couches profondes du sabot, causée par des bactéries et champignons. À l’arrière du 4×4, l’artisane nous présente les outils qui ne la quittent jamais : pinces à parer, rénettes, marteaux à forger, tenailles et autres accessoires. En moyenne, Maud s’occupe de trois à six équidés par jour. Si sa tournée débute dès 9h, elle sait rarement à quelle heure sa journée se terminera.

Le département compte très peu de maréchal-ferrants, une dizaine, selon Maud. « C’est un travail très physique », admet-elle, avant d’enfiler son tablier en cuir. Direction le pré pour rejoindre la petite ânesse. « Lorsqu’on débute, le premier mois est très difficile parce qu’il faut se courber dans une position qui n’est pas naturelle. Maintenant, je suis habituée, mais il y a des gens qui ne s’adapteront jamais », assure Maud. Avec l’expérience, la maréchale-ferrante s’est imposé des limites. « J’ai des confrères qui visitent 10 à 15 chevaux par jour, mais après 10 ans de carrière, on ne tient plus ! », affirme-t-elle.

Cela fait 25 ans que Maud sillonne les routes des Pyrénées-Orientales pour ferrer, parer et soigner chevaux et ânes.

Si la profession de maréchal-ferrant reste atypique, elle l’est d’autant plus pour les femmes. « Dans la maréchalerie, les hommes sont majoritaires », nous confirme Maud. « Je sais qu’il y a une maréchale qui a mon âge – 46 ans- en France. Mais celles qui exercent encore après 25 ans de carrière sont peu nombreuses. » Pour Maud, la difficulté du métier, c’est de durer dans les années.

« J’ai appris à la vieille école »

Au quotidien, Maud intervient auprès d’animaux qui ont chacun leur particularité. D’après la maréchale-ferrante, il est par exemple plus facile de guérir une fourmilière sur le sabot d’un âne, que sur celui d’un cheval. Il faut aussi prendre en considération que soigner un animal sauvé de la maltraitance prend plus de temps, « il faut instaurer un lien de confiance », assure-t-elle.

Tout au long du parage, la maréchale-ferrante rassure l’animal. Munie de sa rénette, elle commence par nettoyer la sole (surface inférieure du sabot). « Quand j’estime que c’est suffisant, j’utilise la pince. On a un pied qui est quand même assez déformé », constate-t-elle. « C’est parce qu’il y a eu, par le passé, de la négligence. La bactérie de la fourmilière est rentrée par cette fissure », nous désigne la maréchale. Bien souvent, le refuge Torreilles Âne et compagnie récupère des animaux qui vivaient dans des enclos non-nettoyés, « et qui ne bénéficiaient pas du suivi d’un maréchal-ferrant. »

Cela fait 25 ans que Maud sillonne les routes des Pyrénées-Orientales pour ferrer, parer et soigner chevaux et ânes.

Le maréchal-ferrant a un rôle central, il ferre et pare les pieds des équidés pour les protéger des risques d’usure et veille ainsi à l’état de santé général de l’animal. « Un parage coûte en moyenne 40 euros, il faut compter 80 euros pour le ferrage », nous apprend Maud. Elle finit le parage avec une râpe, « pour mettre le pied bien d’aplomb. » « J’ai appris à la vieille école », sourit Maud. Pour venir à bout de la fourmilière, la maréchale-ferrante utilise ses propres remèdes à base de plantes. « Ça active la pousse, c’est un désinfectant et un cicatrisant », nous explique-t-elle, avant d’appliquer le produit sur le sabot de l’animal.

Un savoir-faire qui traverse les époques

Si le métier de maréchal-ferrant existe depuis plus de 2 000 ans, en quelques décennies seulement, Maud a vu la profession évoluer. « Aujourd’hui, il y a des personnes qui parent les pieds des chevaux sans diplômes. C’est en train de tuer le métier », dénonce-t-elle. Maud a passé un BEP (Brevet d’Etudes Professionnelles) de maréchal-ferrant, à Marseille. Dans les Pyrénées-Orientales, il n’existe aucune école de maréchalerie.

« Pour un jeune, c’est très difficile de s’installer ici », nous explique-t-elle. Le diplôme en poche, il faut encore acheter un 4×4 pour se déplacer et investir dans du matériel. « En moyenne, pour commencer à s’équiper, il faut compter entre 3 000 et 4 000 euros. Il vous faut des outils de travail de tous les jours, comme une forge, une enclume… », énumère la professionnelle. Au quotidien, la maréchale-ferrante apprend les rudiments du métier à son conjoint. Une jolie manière pour l’artisane de transmettre sa passion.

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Célia Lespinasse