Article mis à jour le 13 juin 2025 à 16:23
Lors de la Conférence des Nations Unies sur l’océan, le Ministère de l’écologie a cité en exemple les actions menées par la réserve marine de Cerbère-Banyuls pour protéger la biodiversité marine.
Focus sur ce sanctuaire créé en 1974 et qui pourrait s’étendre plus largement avec l’ajout de 1 000 hectares aux 650 existants. Photo prise Sous la surface à la plage de Peyrefite © Martin Bertrand / Hans Lucas.
La réserve Cerbère-Banyuls, un sanctuaire de protection pour la biodiversité
Cet espace protégé sur la côte Vermeille abrite près de 1200 espèces animales et 500 espèces végétales. Elle est un petit havre de paix réglementé, pour protéger l’écosystème. C’est un échantillon « de ce que pouvait être la Méditerranée il y a 50 ans » confirme un plongeur habitué de la grande bleue.
Frédéric Cadène, conservateur de la réserve depuis 1999, l’a vu évoluer. « Je n’ai pas souvenir d’avoir vu une telle densité et diversité de poissons qu’actuellement. En quelques années, en mettant en place des réglementations adaptées, en informant les usagers et en aménageant notamment de l’amarrage écologique, on a vu une sacrée évolution. »
De nombreuses espèces jusqu’alors menacées se sont repeuplées grâce à la préservation du milieu rendu possible par la réserve. C’est entre autres le cas du corb, du corail rouge, ou des mérous, espèce emblématique de la Méditerranée. Selon le conservateur, dans les années 80, il n’y avait plus qu’une douzaine de mérous. Aujourd’hui, les récents comptages, font état de 730 individus dans l’aire protégée. Si leur nombre a augmenté, les poissons sont aussi trente fois plus grands qu’à l’extérieur de la réserve, confie Frédéric Cadène.
« Les poissons sont en capacité de se reproduire plus facilement parce qu’il n’y a pas de pêche, de plongée ou de dérangement » précise Frédéric Cadène. La réserve a apporté une plus-value en périphérie également, ce qu’on appelle l’effet cascade”. D’où l’enjeu de tels espaces, soulevé le conservateur.
« S’il n’y avait pas eu des mesures prises dans les années 80, et avec la mise en place de la réserve, il n’y aurait plus de vie dans la zone. »
Un projet d’extension de la réserve marine est actuellement en discussion. Si plusieurs démarches sont à l’étude, cette extension doit se faire « en concertation avec les usagers pour les associer directement au projet”. Validé par le Conseil départemental, le format reste encore à confirmer. Selon Frédéric Cadène, le minimum “est de doubler la surface de la réserve” et le projet pourrait aller jusqu’à une surface totale de 1680 hectares, alors que la réserve n’en fait que 650 actuellement.
La protection de la biodiversité marine est un « jeu d’équilibre »
L’objectif, selon Frédéric Cadène, “n’est pas de fermer pour fermer. Il faut trouver comment protéger pour que chacun puisse en tirer les bénéfices ». Il précise “qu’un jeu d’équilibre » est nécessaire pour concilier les activités et les rendre durables”.
Une démarche gagnant-gagnant pour les espèces, ainsi que pour « l’homme. Afin qu’il puisse bénéficier de la beauté du paysage et de ses richesses ». Frédéric Cadène insiste : « les pêcheurs pourront pêcher des poissons qu’ils n’attrapaient pas, avec des tailles plus importantes ». L’un des grands succès de la réserve depuis 50 ans est l’intrication des enjeux, entre préservation de la biodiversité marine et pérennité d’activités humaines économiques, et notamment liées au tourisme. Pour Frédéric Cadène, les réserves marines ne doivent pas être des « cloches fermées », mais bien des espaces ouverts et réglementés.
Pour assurer sa pérennité, la réserve est divisée en deux espaces de réglementations. « Une zone de protection renforcée où les activités sont interdites où seule la traversée en bateau et en kayak est autorisée. Et une zone de protection partielle où les activités de pêche et de plongée sont régulées. » Ainsi, seulement 10 % de la réserve marine proscrit toute activité humaine en son sein. Pour Frédéric Cadène, « il est impératif d’étendre les zones protégées. Parce qu’il faut faire un effort, sinon ça va être compliqué. La Méditerranée souffre, elle est à l’agonie ».
La nécessaire sensibilisation pour une protection plus durable
Depuis sa création, la réserve est aussi impliquée dans un devoir d’éducation à l’environnement. Frédéric Cadène explique que « les zones sont calibrées pour pouvoir faire de la sensibilisation, de l’information, de pouvoir surveiller et faire respecter la réglementation ». Une des missions des acteurs de la réserve est de sensibiliser le public aux enjeux de la protection sous-marine, et notamment via des animations pédagogiques. Durant la période estivale, ce sont plus de 5 000 visiteurs des plages qui sont ainsi sensibilisés aux enjeux de protection.
La réserve est un modèle repris dans les discussions lors de la 3e Conférence des Nations Unies sur l’océan, organisé à Nice du 9 au 13 juin. Les agents chargés de la réserve ont cependant “refusé de se rendre au sommet », jugeant la démarche « trop politique ». Même si, pour Frédéric Cadène, passer de 1,8% d’espaces maritimes protégés en France à 10%, à horizon 2030, est crucial. « Retroussons-nous les manches. Il nous faut des moyens pour nous permettre d’avancer et d’étendre la protection des milieux marins ». Au-delà du sommet, le conservateur réclame des moyens concrets pour protéger le milieu marin.
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