124 ! C’est notre chiffre de la semaine… La tramontane, ce vent venu du nord qui rend fous les Catalans, souffle en moyenne un jour sur trois dans les Pyrénées-Orientales. Si depuis le début de l’année les stations météo ont déjà relevé 124 jours de vent à Perpignan-Rivesaltes et 202 au Cap Béar, plusieurs études montrent que la tramontane s’essouffle, qu’en est-il ?
En 2022, la tramontane s’est montrée discrète, avec seulement 90 jours dénombrés à Perpignan, soit environ un jour sur quatre de vent, un minimum depuis 1981. Sur les trois dernières années, le nombre de jours de tramontane est resté sous les moyennes, avec à Perpignan, 114 jours de vent en 2021 et 98 en 2020. Selon Nicolas Robin, géomorphologue à l’université de Perpignan, « la capacité du vent a été divisée par trois en trente ans. »
Selon l’extrait publié par Météo France d’une étude plus large,« on observe une forte variabilité interannuelle. L’année 2017 avait notamment été très ventée, avec 131 jours de tramontane à Perpignan. En moyenne, la tramontane souffle un jour sur trois sur le Languedoc-Roussillon. On parle de tramontane lorsque le vent dépasse ou atteint 60 km/h en rafales. »
Les études menées à l’université de Perpignan montrent aussi une baisse marquante du nombre de tempêtes. « Jusque dans les années 2000, on avait 25 tempêtes par an avec un vent à plus de 20 mètres par seconde, et aujourd’hui, on est à 0. Sur les quatre dernières années, nous n’avons pas eu de très gros événements de tramontane. »
Une tramontane en baisse est une bonne nouvelle pour l’érosion du littoral
La baisse d’intensité de la tramontane a un effet plutôt positif sur le recul du trait côte. En effet, selon Nicolas Robin, la tramontane « transporte les sédiments vers les petits fonds marins, ce qui contribue à l’érosion de la plage. » La baisse d’intensité du vent a donc un impact sur le transport de ces matières. « Les vents venant de la mer seront un peu plus dominants, ce qui va permettre de nourrir la plage et surtout les dunes. »
Antoine Lamy confirme que la baisse d’intensité du vent réduit l’export de sables. Le spécialiste émet également l’hypothèse que la baisse de la tramontane pourrait avoir un effet sur la sécheresse des sols. « Comme la tramontane est un vent sec, en théorie, sa baisse d’intensité, et la hausse des vents marins pourrait amener plus d’humidité. Mais la météo de ces dernières années montre que ce n’est pas le cas. »
Pour le chercheur, « les conséquences sont difficiles à étudier. Il faudrait vraiment une très forte baisse de la tramontane. Et à l’inverse, plus de vents marins pour voir vraiment des changements. Pour l’instant, on est vraiment plus sous l’influence du manque d’eau et de ses problématiques. »
172,8km/h relevés au Cap Béar, les plus fortes rafales de l’année de 2024
Selon Antoine Lamy géomorphologue auprès de l’université de Perpignan, le Cap Béar ne serait pas la station la plus adéquate pour étudier la baisse d’intensité de la tramontane.
En effet, selon le chercheur du laboratoire du Cefrem*, le sémaphore port-vendrais relève une tramontane intensifiée par la mer et le passage des Albères. Toutefois, pour Nicolas Robin, depuis le début des études en 2000, les relevés du Cap Leucate montrent effectivement « une diminution de l’intensité du vent et du nombre de jours de vent dans l’année. »
Selon les données fournies par le site InfoClimat.fr, en 2023, le Cap Béar affiche une tramontane intense, avec 223 jours de vent, dont 75 à plus de 100km/h. À titre de comparaison, au Cap Leucate, il y a eu 192 jours de tramontane, dont 27 avec des rafales supérieures à 100km/h.
Les relevés de station de Perpignan-Rivesaltes, au nord des Pyrénées-Orientales, répertorient des rafales à 115km/h. Depuis le début de l’année, il y a eu 124 jours où la tramontane a soufflé, mais seulement trois jours à plus de 100km/h. Pour rappel, sur l’année précédente, il y a eu 147 jours de tramontane, dont 11 à plus de 100km/h. Les rafales les plus fortes enregistrées atteignent des pointes à 133,2 km/h.
Alors pourquoi la tramontane souffle-t-elle moins ?
Pour le moment, il n’y a pas de preuves scientifiques, mais des hypothèses de travail concernant la modification des régimes de vent. Ces phénomènes sont gérés par des positionnements de masses à l’échelle européenne.
« Avec les changements globaux, il semblerait qu’il pourrait y avoir des modifications dans ces configurations de positionnement des anticyclones et des dépressions. Ce qui pourrait faire varier les conditions de vents. Mais tout cela reste une hypothèse, » insiste Antoine Lamy.
Nicolas Robin confirme que plusieurs publications scientifiques vont dans le même sens. « Il y a des changements des masses atmosphériques à l’échelle européenne. Et cela décale un peu les phénomènes dans leur intensité et leur localisation. Finalement, notre région est un peu moins soumise à ces phénomènes de vents, et de vents violents, en tout cas. » Selon le chercheur, cette baisse de la tramontane ne serait pas obligatoirement liée au changement climatique.
*Cefrem : Centre de Formation et de Recherche sur les Environnements Méditerranéens.
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