Article mis à jour le 14 octobre 2021 à 15:50
Lors d’un changement de majorité au sein d’un exécutif, il est courant – voire de tradition – que la nouvelle équipe commande un audit. L’objectif ? Faire notamment le point sur la situation financière de la collectivité. Durant la campagne municipale de 2020, le candidat Aliot avait promis à plusieurs reprises qu’une fois élu, cette mesure permettrait de sortir les cadavres du placard. Il avait même annoncé sa volonté de publier ces audits. Peut-être dans le prochain bulletin municipal ? À l’été 2020, le nouveau maire de Perpignan entendait démontrer très rapidement – grâce à ces audits – la mauvaise gestion de la ville depuis des décennies.
Un appel d’offres lancé du 24 novembre 2020 au 4 janvier 2021, une notification de marché et 52 jours d’analyses, rétrospectives et perspectives plus tard, le cabinet indépendant SPQR vient de rendre sa copie. Les audits ont mesuré la santé financière de la mairie, mais aussi réalisé des projections à partir des premiers mois de Louis Aliot aux responsabilités. Au-delà de la santé financière, l’audit a également fait un audit social. Ces audits ont fait l’objet d’un échange âpre entre la majorité et l’opposition lors du conseil municipal. Nous avons également souhaité recueillir la parole de l’ancien maire, Jean-Marc Pujol.
♦ « On était prévenu, vous allez voir ce que vous allez voir ! »
Jean-Marc Pujol se délecte en parodiant les propos du candidat Louis Aliot. « Malgré les effets d’annonce de mauvais augure, je constate, qu’au niveau financer, cet audit financier est très favorable à l’ancienne municipalité. Cela va dans le sens des propos de la chambre régionale des comptes. Il s’agit d’une gestion en bon père de famille. On finit le mandat (2014-2020) avec un excédent de plus de 30M€. C’est ma manière de gérer, on fait des économies, on fait attention à la gestion. C’est comme ça que tout le monde devrait gérer ».
Les conclusions de l’Audit : « Une amélioration des équilibres à préserver. Les équilibres financiers de la Ville se sont améliorés sur la période ; avec un taux d’épargne brute évoluant de 13% en 2014 à 21% en 2020. (…) La Ville a reconstitué un solde global disponible conséquent, notamment un excédent de fonctionnement, permettant d’envisager un moindre recours à l’endettement ».
♦ Quid des perspectives de la situation financière de la ville de Perpignan ?
Le cabinet d’audit précise l’objectif du rapport : « L’exercice de prospective financière doit permettre à la ville de projeter ses équilibres sur le mandat. (…) Pour cela, plusieurs scenarii sont élaborés autour d’un scénario de base :
– Le scénario de base projette les équilibres au fil de l’eau.
– Des arbitrages en fonctionnement et en investissement sont proposés afin de redresser la situation puis d’améliorer les équilibres globaux.
– Pour l’investissement, ce travail permettra de définir une enveloppe d’investissement possible ».
La conclusion de l’étude de 35 pages établit clairement que « le budget 2021 marque un cap dans les équilibres financiers de la Ville. Les épargnes sont en dégradation sans atteindre un niveau critique, quel que soit le scénario ». Selon Jean-Marc Pujol, cet audit montre clairement « qu’ils ont ouvert les vannes sur la fin 2020 et sur 2021. L‘atterrissage risque d’être très difficile pour eux ».
De l’avis de l’ancien maire de Perpignan, c’est une erreur ; il faut au contraire continuer à travailler à la réduction de la masse salariale. « Avec 60% de frais de personnel, on est encore au-dessus de la moyenne des villes de plus de 100.000 habitants ». Une moyenne qui se situe à 55%.
♦ « Il est facile de faire certaines économies, mais on voit le résultat »
Lors du conseil municipal du 23 septembre, Bruno Nougayrede, conseiller municipal d’opposition interpellait le maire. « La gestion de la masse salariale va être décisive dans les prochaines années. Et peut conduire la ville à une situation critique ». Bruno Nougayrede n’a pas été « convaincu par la présentation faite de ces audits et surtout de l’audit social lors de la commission des finances. Nous ne faisons pas confiance à ce conseil municipal à mettre en place une organisation qui convienne.«
Louis Aliot de rétorquer ; « c’est bien de se gargariser d’un certain nombre de chiffres ; ça l’est beaucoup moins quand on va dans les services et qu’on découvre un certain nombre de choses. C’est vrai que les charges de personnel vont augmenter légèrement pour baisser et être lissées sur tout le mandat. Parce qu’il ne faut pas voir une logique de court terme mais bien sûr l’ensemble du mandat. Si l’on a procédé à un certain nombre d’engagements, c’est pour pallier des manques importants ».
L’audit financier, une priorité depuis … 2014. Lors d’une interview à nos confrères de France Bleu Roussillon, Louis Aliot – alors en campagne pour l’élection municipale de 2014 – répondait sur sa première mesure en cas de victoire. « Ma première décision sera de faire réaliser un audit par un cabinet extérieur de l’ensemble des services et des comptes de la mairie ». Cette priorité Louis Aliot nous l’avait confirmée lors d’un entretien en juillet 2020. « Les audits seront en septembre ; ça prend du temps juridiquement ». Des audits qui mettront à jour selon le maire « les gros cadavres dans les placards ».
♦ Le climat social de la mairie selon Louis Aliot
Louis Aliot de reprendre l’enquête sociale. Et de lister des éléments non rendus publics – et donc non vérifiables – sur le rapport définitif rendu par SPQR.
Pour Louis Aliot, « il est facile de faire des économies, mais on voit le résultat social dans les quartiers. On voit aussi le niveau d’un certain nombre de problèmes que nous avons en matière de propreté ou de sécurité ».
Selon Louis Aliot, jusque-là 2/3 des 2.300 agents municipaux n’avaient pas de fiche de poste. Le maire de Perpignan de retenir de cette enquête sociale une « absence de communication entre les services« , « un management peu respectueux des agents« ; ou encore une direction des ressources humaines « qui compte les agents et non qui accompagne les personnels« . Mais aussi « des services de propreté sans matériel ou des maisons de quartier vides ».
Louis Aliot de clore le débat sur ces audits ; « Quand on voit le niveau d’un certain nombre de problèmes que nous avons en matière de propreté ou de sécurité, moi je peux vous dire que je préfère augmenter légèrement la masse salariale pour obtenir des résultats. Et vous verrez, que vers la fin du mandat, nous arrivons à un chiffre beaucoup moins élevé que celui de nos services aujourd’hui ».
♦ Pour Jean-Marc Pujol, « l’audit social enfonce les portes ouvertes »
Jean-Marc Pujol se montre sévère à l’égard du cabinet SPQR. Selon l’ancien maire, l’audit social n’est pas à la hauteur, pas assez précis ; contrairement à celui qui étudie les finances de la ville. Seul 1 agent sur 2 a répondu à l’enquête de climat social. Précisément, SPQR indique que « 1.116 agents ont répondu sur les 2.368 agents de la ville ; soit un taux de retour de 47% ».
« En matière de gestion du personnel, c’est une direction qu’il faut donner. Chose qu’on ne trouve pas dans ce rapport. J’avais réduit le nombre de directions générales afin de réduire les coûts. Après, il y a toujours les mêmes sujets sur l’absentéisme ; un sujet récurrent à la majorité des collectivités françaises. Mais je ne trouve à aucun moment des pistes de réflexion. Mais seulement des « il faut que », ou on « peut croire que« .
« Si, l’étude, fait bien une préconisation. Celle de la mise en place d’une contribution salariale forfaitaire en fonction des résultats. Mais ça, c’est un point qu’il faut d’abord voir avec les syndicats. Et ça, c’est le plus difficile. Car autant dans le privé, il est possible de faire une part fixe et une part variable. Mais dans les collectivités, c’est très difficile ».
Au-delà du climat social, l’audit met en lumière : « Des élus engagés et dont le positionnement peut générer des dysfonctionnements organisationnels du fait d’une confusion des rôles ou de postures trop entrantes« . Mais aussi « un réseau de chargés de mission qui peut aussi contribuer à désorganiser les directions opérationnelles du fait de circuits de décision parallèle« .
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