Article mis à jour le 19 mars 2019 à 20:31
Le député France Insoumise de la Somme était à Perpignan pour présenter en avant-première « J’veux du soleil », son road-movie des ronds-points de France. Son film d’amour aux Gilets Jaunes comme il aime à le déclarer. Philippe Assens, figure du mouvement de Jean-Luc Mélenchon, et Inès Muriot, candidate aux Européennes, ont encouragé François Ruffin à se rendre compte par lui-même des difficultés du quartier Saint-Jacques. En compagnie d’Alain Gimenez dit Nounours et de Nasser, il s’est imprégné du quartier et a discuté avec ses habitants en petits comités.
♦ « La politique, elle s’intéresse toujours à vous »
Le rédacteur en chef de la revue Fakir a longuement écouté le récit de Nounours, ce natif du quartier de 54 ans et figure de proue depuis 10 mois de la contestation sur le devenir immobilier du quartier. Avec Nasser et d’autres habitants, ce dernier a monté un collectif pour stopper les pelleteuses de la Place du Puig. Le dialogue s’est engagé et François Ruffin de questionner Nounours sur la possibilité de faire une liste pour les prochaines municipales. Nounours lui répondant : « Je ne me vois pas sur une liste »…
François Ruffin de rétorquer : « vous devez gérer vos propres affaires. Si vous n’êtes pas contents, il ne faut pas laisser les autres gérer les affaires pour vous. Jusque-là, vous n’aviez jamais pensé bloquer un chantier, monter une association et pourtant vous l’avez fait ! Vous êtes en train de faire une série de choses que vous n’auriez jamais pensé faire. Peut-être que vous n’allez pas vous arrêter en route ? Toute à l’heure, vous m’avez dit, je ne m’intéresse pas à la politique. Mais le problème, c’est que la politique elle s’intéresse toujours à vous ! Votre logement, votre travail et votre revenu, ce sont les politiques qui en décident. Donc … »
François Ruffin de nous confier à la fin de cet échange : « Si on n’est pas content de son sort, il faut soi-même s’engager dans la politique. Tout comme les Gilets Jaunes, les habitants de Saint-Jacques doivent prendre confiance en eux. Et c’est ça aussi ce qui ressort depuis cet automne ».
♦ « Cela me rappelle les volontés de gentrification* de certains quartiers populaires en centre-ville »
Votre sentiment sur la situation ? « Très modestement, car ce n’est pas en 5 minutes que l’on devient un spécialiste. Mais cette situation me fait penser à des mouvements de type gentrification. Avec l’embourgeoisement des quartiers populaires par des projets sociaux. Mais ici, le projet social n’est pas assez efficace. »
« Il s’agit donc de l’accélérer par des opérations immobilières de grande ampleur. La logique de gentrification commence par l’installation d’un battement culturel, d’une école d’art, un musée (NDLR à Perpignan, le retour de la faculté en centre-ville). Et personne ne dit non à la culture. Les étudiants deviennent des têtes de pont pour la bourgeoise. »
Autre point sur lequel le député met l’accent : « il faut encourager les jeunes à franchir les frontières des quartiers. Car vivre ici, en soit, cela ne continue pas un projet. Il faut penser un projet pour le travail, les soins, une politique de scolarisation… ».
♦ « Les Gilets Jaunes ont débuté une bataille engagée sur la durée »
Arrivé dans le département en début d’après-midi, François Ruffin s’est rendu sur le rond-point de Saint-Charles, un des trois centres névralgiques du mouvement avec les deux barrières de péage autoroutier du département. Pour François Ruffin, « il s’agit d’un épisode d’une bataille longue sur la durée. On a assisté à une bataille remportée par la démocratie sur l’oligarchie. Là, Macron avec le Grand Débat a fait pouce. Maintenant, on va voir la suite… »
Après sa visite à Saint-Jacques, François Ruffin s’est rendu au cinéma Castillet pour la projection de son film. Une projection qui semble avoir remporté un franc succès car une séance a dû être rajoutée aux deux initialement prévues. François Ruffin a prévu de prendre la parole vers 19h15 sur la place de la Victoire aux pieds du Castillet.
♦ « J’veux du soleil » le film d’amour de François Ruffin aux Gilets Jaunes
Ce film a été réalisé par Gilles Perret et François Ruffin en une semaine en plein coeur de la crise des Gilets Jaunes. Pour François Ruffin, ce film est un moyen de dire : « les héros, c’est eux ! C’est Cindy, c’est Marie, c’est Loïc, avec des histoires, à chaque fois, inattendues… ». Pour le député de la première circonscription de la Somme, « c’est un film d’amour, je crois. Je veux dire à ces gens : « Je vous aime », ces gens si longtemps résignés, méprisés, qui se mettent debout maintenant. Je les aimais déjà avant, mais là, on montrerait leur beauté, leur fierté ».
*La gentrification est un terme américain couramment utilisé pour évoquer l’embourgeoisement d’un quartier. En clair, il s’agit du fait qu’un quartier populaire voit progressivement sa population remplacée par une catégorie de personnes socialement plus aisée.
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