Article mis à jour le 28 novembre 2025 à 08:50
La dématérialisation a bouleversé l’univers de la lettre papier, avec une chute plus marquée depuis 2010, où La Poste distribuait encore 13 milliards de plis en France. Aujourd’hui, nous ne sommes plus qu’à 6 milliards, avec une estimation à 3 ou 4 milliards en 2030. À Perpignan, en juin dernier, La Poste a lancé une nouvelle plateforme pour réorienter ses activités.
« Ce sont les grands émetteurs, notamment les banques, qui sont passés à l’électronique » explique Vincent Baladre, directeur opérationnel pour l’Hérault, l’Aude et les Pyrénées-Orientales. 95 % des objets traités par La Poste concernent les entreprises. « Le courrier connaît une chute drastique, de 7 à 8 % par an. Cela va très vite. »
Les lettres des particuliers représentent moins de 5 % du volume. Paradoxalement, le peu de gens qui s’écrivent accorde une nouvelle valeur à la lettre, devenue soudain plus noble que le mail.

Dans ce contexte, La Poste s’adapte, et les métiers changent. Les facteurs se voient confier de nouvelles prestations, comme la livraison de repas, le recensement, l’audit de voierie et de mobilier urbain ou encore le dispositif « veiller sur mes parents » contre l’isolement des personnes âgées. « Il y a une dizaine de tournées de portage de repas par jour, sur le département. »
Amazon, ton univers impitoyable
Mais le grand virage pris par La Poste est désormais le colis et la logistique, alors que la concurrence des messageries fait rage et que les Français consomment de plus en plus par livraison. En juin 2025, la plateforme « multiflux » est lancée dans l’espace Torremila de Perpignan. Ce projet de 13,4 millions d’euros vient remplacer les précédentes infrastructures. À l’intérieur, des technologies de pointe qui lisent 85 % des adresses, trient automatiquement le courrier dans l’ordre de la distribution et convoient les colis jusqu’aux camions des tournées. Les casiers de tri manuel que connaissaient les anciens salariés ne sont plus qu’anecdotiques.
Au coeur de la lutte, le géant Amazon dont il faut gagner les faveurs. « C’est Amazon qui génère le plus de volume en France et dans le monde. C’est un concurrent pour la distribution mais c’est aussi notre premier client. Amazon nous confie une part majoritaire de son trafic. » Sur le dernier kilomètre, La Poste conserve quasiment 60 % du marché des colis.

» La plateforme multiflux peut absorber 20 000 colis par jour à destination du département. » Les précédentes plateformes perpignanaises ne montaient qu’à 8 000 colis par jour. Le nombre de colis progresse de 5 à 10 % par an depuis dix ans. Mais c’est encore incomparable à ce qui a été perdu. « Là où on gagne un colis, on perd dix lettres ». En clair les gains ne compensent pas les pertes.
C’est pourquoi la plateforme perpignanaise s’oriente vers un nouveau métier avec son service « Log’issimo ». Il s’agit de faire de la préparation de commandes au service des entreprises : stockage de matériel, emballage, étiquetage et envoi. « Nous travaillons beaucoup avec la police nationale qui nous a confié son approvisionnement en matériel. » Une trentaine de personnes travaillent actuellement à ce service, amené à se développer. « L’objectif est de préserver l’emploi, c’est pour cela qu’on va chercher ces nouvelles activités. »
La course aux lockers
Vincent Baladre reconnaît un avenir où la concurrence entre messageries ne fera qu’augmenter. « Le pari est de travailler sur la qualité des services, d’où cet investissement. Les clients demandent plus de rapidité, de ponctualité, de tracking. » Les lockers, ces boîtes à colis qui se développent hors domicile, et évitent de dépendre des horaires de points relais, sont aussi au coeur de la course. « On le développe de plus en plus nous aussi, c’est une demande des clients. »
La nouvelle plateforme multiflux de Perpignan en bref :
– Un investissement de 13,4 millions d’euros
– Un lancement en juin 2025 et un rythme de croisière atteint cet automne 2025
– 7 565 m2 de bâtiments avec des toits photovoltaïques, et 9 quais
– 190 agents
– 48 700 plis traités par jour en moyenne
– 18 500 colis traités par jour en moyenne
– 28 véhicules électriques, soit 44 % de la flotte
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