Article mis à jour le 9 juin 2023 à 15:35
La réforme de 2017 avait permis aux époux de divorcer sans le juge en cas d’accord sur l’ensemble des détails de leur séparation. La mouture de 2021 vise à réduire les délais de procédure.
Explications avec Maka Djoumoi, avocate au barreau de Perpignan, et présidente de l’union des jeunes avocats du Pyrénées-Orientales depuis 2019.
2017, instauration du divorce par consentement mutuel conventionnel
« En 2017, il y avait eu avancée avec l’entrée en vigueur du divorce par consentement mutuel par acte d’avocats enregistré par un notaire. Depuis 2017, il est possible de ne plus passer devant le juge dès lors qu’on est d’accord sur tous les termes du divorce ». En clair, les avocats des époux rédigent une convention ; convention qui détaille l’ensemble des termes du divorce : garde des enfants, pension alimentaire, etc. Après signature, cette convention est adressée au notaire pour enregistrement, ce qui acte le divorce. Ensuite la convention est adressée à l’état civil pour enregistrement. L’une des conditions pour bénéficier de ce divorce express est la vente des biens en commun ; un préalable qui peut faire ralentir considérablement la procédure.
« À l’inverse si les époux n’ont pas de biens en commun, pas d’enfants, pas de dettes, cela peut aller très très vite », nous précise l’avocate. « Le divorce le plus rapide que j’ai eu à traiter a duré 3 mois. 3 mois entre le premier rendez-vous et l’enregistrement à l’état civil ».
En France, selon le comparateur d’avocats Alexia.fr, le délai moyen pour divorcer est fonction de la procédure entamée par les époux. Ce délai peut aller de 25 mois pour un divorce pour faute, à 1 mois pour un divorce par consentement mutuel contractuel (via le notaire). Parfois le délai initialement estimé se rallonge ; les époux croient être d’accord sur tout … mais finalement changent d’avis. Selon la jeune avocate, c’est souvent le niveau de la pension alimentaire pour les enfants qui coince.
Ce qui change au 1er janvier 2021
Pour Maka Djoumoi, « la volonté du législateur est d’avoir une procédure de divorce plus rapide. Cette réforme tend aussi à privilégier la médiation et les mesures participatives pour permettre de pacifier les situations ; et de favoriser la résolution amiable des conflits. »
Fin du divorce en 2 parties et de l’audience de conciliation. Avant le 1er janvier, l’époux souhaitant mettre fin au mariage adressait une requête auprès du juge aux affaires familiales. Cette demande était suivie de l’audience de tentative de conciliation. Cette audience devant le juge permettait notamment de mettre en place les mesures provisoires : lieu de résidence des époux, mode de garde des enfants, etc. Or, compte tenu des délais de la justice, l’audience de tentative de conciliation n’était fixée que plusieurs mois après la demande. « Lors de cette audience, le juge examinait le dossier, entendait les époux sur la volonté de divorcer et les mesures provisoires à mettre en place. Ce n’est qu’après cette audience qui donnait lieu à un jugement (ordonnance de non-conciliation) que le juge donnait aux époux l’autorisation d’assigner en divorce ».
Désormais, l’audience de conciliation est remplacée par une phase dite « d’orientation des mesures provisoires » à laquelle la présence des conjoints n’est plus obligatoire ; à l’inverse de celle de leur avocat respectif. Le législateur a néanmoins prévu qu’en cas de « grand désaccord », le juge pourra décider de rendre obligatoire la présence des deux conjoints.
« Cette audience se déroule en deux temps (dans le même acte) mais plus en deux parties distinctes. Dans un premier temps, on évoque la procédure de divorce elle-même (obligatoire), et dans un second temps les mesures provisoires. Une seconde partie facultative puisque les époux peuvent s’entendre pour qu’il n’y ait pas de mesures provisoires ».
Un délai de séparation désormais raccourci de 2 à 1 an
Outre l’allègement de la procédure judiciaire, le délai de séparation est ramené de 2 à 1 an. En clair, quand l’un des époux bloquait le divorce, il fallait justifier de 2 ans de séparation pour divorcer par « altération définitive du lien ». Durant cette période, l’époux demandeur ne pouvait assigner l’autre afin que le juge prononce le divorce. Désormais, le demandeur pourra assigner en divorce après un délai de 1 an.
Les effets de la crise sanitaire sur les divorces ?
Comme le rappelle Maka Djoumoi, certains divorces ont été reportés à plusieurs reprises à cause de la grève, puis du confinement. Concernant une hausse du nombre de divorce liée au confinement, Maka Djoumoi est moins catégorique. De nombreux articles ont été publiés annonçant la hausse du nombre de divorce. Mais il s’agissait des divorces en Chine où la procédure peut aller très vite. En France, si nombre de juristes déclarent que les procédures de divorce ont augmenté, la jeune avocate perpignanaise se montre moins catégorique.
Par contre, un des éléments nouveaux depuis l’arrivée de la Covid est le rendez-vous pour les audiences. « Avant, nous étions tous convoqués à la même heure. On pouvait parfois se retrouver à plus de 100 dans la salle. Il fallait attendre que notre dossier soit appelé pour le plaider ou faire un renvoi. C’était une perte de temps pour nous et nos clients. Depuis le Covid, la veille de l’audience, nous indiquons sur un site internet de l’ordre notre intention de plaider ou de renvoyer le dossier. Et on nous indique un horaire précis pour plaider ».
Maka Djoumoi, avocate au barreau de Perpignan, et présidente de l’union des jeunes avocats du Pyrénées-Orientales depuis 2019.
Les chiffres du pôle famille du tribunal de Perpignan
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