Article mis à jour le 23 mars 2024 à 23:26
Ce 24 février, le fondateur de Mediapart était à Perpignan pour débattre sur la concentration des médias. Après la projection du documentaire « Media Crash – Qui a tué le débat public ? », Edwy Plenel a pris le temps de répondre aux spectateurs sur la place et le rôle des médias dans la démocratie. Le documentaire met l’accent sur le danger de concentration des médias aux mains de quelques « industriels milliardaires ». Documentaire toujours à l’écran au cinéma Le Castillet.
♦ « Nous sommes tous Spartacus »
À ceux qui se montrent pessimistes sur la démocratie, l’abstention, ou la poussée des extrêmes, Edwy Plenel répond que « l’inquiétude est l’antichambre de l’espérance ». Pour le journaliste, « il y a toute une jeunesse qui a compris. Et même si elle nous paraît minoritaire, elle fait un chemin qui invente et qui nous bouscule ». Pour répondre à une personne de la salle inquiète par la portée des émissions du type Hanouna sur C8, Edwy Plenel rétorque qu’en tant que journaliste il ne faut pas tout mélanger au prétexte « démagogique d’atteindre les jeunes ».
« Je ne crois pas qu’il faille discuter recette de cuisines avec un anthropophage. Il ne faut pas aller dans cet univers-là qui joue avec ses propres règles, très éloignées du journalisme ».
« Moi je pense que Spartacus gagne toujours », pour illustrer son propos Edwy Plenel se lance dans le récit d’une scène culte de Spartacus, film de Stanley Kubrick avec Kirk Douglas. Devant les gladiateurs et esclaves, vaincus, le Romain, dans un chantage macabre, exige que soit livré Spartacus. Après un long silence, Spartacus, sur le point de s’avancer, est devancé par son ami, Antoninus, joué par Tony Curtis. Ce dernier se lève et s’écrie : « Je suis Spartacus ». Il est immédiatement suivi par les combattants fers aux poignets qui déclarent tous : « Je suis Spartacus ».
Selon Edwy Plenel, « il y a un vieux monde qui s’accroche, mais qui est condamné, et un nouveau monde tarde encore à s’imposer. Et même s’il est parfois vaincu, il est là et il revient. Et nous sommes dans ce moment d’entre deux. Mais au bout du compte, je suis convaincu que ce vieux monde finira par tomber ».
♦ Un documentaire pour susciter le débat
À Perpignan, plus de 200 personnes, dont nombre de jeunes, étaient venues pour débattre sur le rôle des médias. Au cœur des échanges, les médias d’opinion qui cristallise le débat public, la stricte indépendance des journalistes vis-à-vis de leur actionnaire, ou encore l’infotainement qui mêle spectacle et information. Au même moment, le Club de la presse Occitanie était partenaire de la projection montpelliéraine de Media Crash. À Montpellier, la journaliste Valentine Oberti se prêtait à l’exercice du débat avec plus de 300 personnes.
Le journal Mediapart et l’agence de presse Premières Lignes (Cash Investigation) se sont associés pour réaliser le document « Media Crash : qui a tué le débat public ? ». Les journalistes se sont associés pour décortiquer ce que l’on voit trop – l’extrême-droitisation du débat où les faits n’ont plus la moindre importance – et révéler des censures ou des autocensures dans les grands médias. Des journalistes témoignent de pressions pour empêcher l’information du public. Une enquête racontée comme un polar pour répondre à une énigme : qui a tué le débat public ?
Le synopsis : « Il y a ce que vous voyez, ce que certains souhaitent que vous voyiez, et ce que vous ne voyez pas. Jamais la France n’a connu une telle concentration des médias privés ; neuf milliardaires, détiennent plus de 90% des grands médias en France télévisions, radios, journaux. Certains utilisent leurs médias pour défendre leurs intérêts privés, au détriment de l’information d’intérêt public. En cachant ce qui est essentiel, en grossissant ce qui est accessoire, ces médias façonnent, orientent, hystérisent pour certains le débat. Les grands perdants sont les citoyens. ».
Edwy Plenel fut directeur de la rédaction du Monde de 1996 à 2004 avant de fonder Mediapart. Il est aussi un habitué du département. En 2017, il était l’invité de l’Atelier du Parti Pris. Et plus récemment, en 2020, il était à Céret pour parler de la résistante Lisa Fittko et de ses mémoires. « Le chemin Walter Benjamin » dont il a écrit la préface. Edwy Plenel incarne et défend un journalisme à haute valeur ajoutée. Parmi les enquêtes qui ont impacté la vie publique et politique française, l’affaire Bettencourt, Cahuzac, ou du dossier libyen de Sarkozy.
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