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Les Evenks, gardiens des richesses yakoutes s’affichent à Visa pour l’image

Quand les Evenks, les gardiens des richesses yakoutes s'affichent à Visa pour l'image

Article mis à jour le 9 septembre 2023 à 09:03

Aligné sur les murs de l’église des Dominicains de Perpignan, «Evenks, les gardiens des richesses yakoutes» s’expose jusqu’au 17 septembre. Dans le cadre de la 35e édition de Visa pour l’Image, Natalya Saprunova, lauréate de la bourse Canon 2022 dévoile un reportage fort sur ces nomades du nord de la Russie dont le mode de vie doit s’adapter à la surexploitation de leur sol et au changement climatique. Devant son travail, Natalya confie ses choix, ses projets et décrypte pour nous quelques-unes de ses images.

Le renne animal central de la vie des Evenks

Pour les Evenks, le renne représente tout. Il permet de se déplacer, sa peau réchauffe, et il est élevé pour sa viande. Même si certains ont abandonné leur vie nomade, toute l’activité des Evenks tourne autour du renne. Mais depuis une quarantaine d’années, la pollution de la terre et l’absence de transmission du savoir-faire ont détruit les élevages.

Natalya a photographié une course de rennes. Plusieurs jeunes scolarisés dans le sud de la Yakoutie perpétuent cette tradition. Plus robuste, le ruminant de la taïga peut supporter le poids d’un homme, contrairement à son cousin de la toundra. Pour se déplacer dans la forêt boréale de la taïga, monter le renne est plus aisé que lui faire tirer un traîneau.

Natalya est originaire de la région de Mourmansk, à proximité de la Norvège et la Finlande. «Je voulais parler d’un peuple attaché à sa terre, travailler sur l’impact de l’homme sur sa culture et sur son environnement. Et montrer les conséquences de l’exploitation des richesses telles que l’or ou les diamants. Au final, ce sont les humains et la nature qui payent pour ces pollutions. Pour un Evenk, la nature qui l’entoure est toute sa vie. Chasseurs de tradition, ils sillonnaient les forêts orientales de Sibérie depuis des siècles. Ainsi, les Evenks se sont installés dans les taïgas de Yakoutie, au milieu des mélèzes, des myrtilliers et des mousses de renne.»

Dans les années 60, Galina a guidé les prospecteurs d’or

Depuis la Sibérie Orientale, l’Église baptiste est venue s’installer en Yakoutie. Installés depuis 1992 dans la région, les baptistes cherchent à convertir les autochtones. Pour cela, selon Natalya, ils n’hésitent pas leur dire que les pratiques chamaniques seraient à l’origine de leur addiction à l’alcool. À 80 ans, Galina a perdu son fils qui s’est pendu, son mari et sa fille sont décédés. Quand elle s’est retrouvée seule, elle s’est tournée vers l’Église baptiste, et s’est convertie au christianisme. «Galina a renoncé à la culture evenke et dit avoir trouvé la paix dans la prière.» Elle vit désormais seule dans sa maison en bois.

Galina a travaillé comme guide pour les prospecteurs venus exploiter l’or et les diamants des sous-sols de Yakouzie. Les guides ne percevaient pas d’argent, leurs connaissances du terrain étaient rémunérées en échange d’alcool ou de nourriture. Aujourd’hui, et compte tenu de la pollution provoquée par ces extractions, les guides regrettent d’avoir aidé les Soviétiques à prospecter.

Prix, bourses et autres résidences permettent aux jeunes photojournalistes de travailler

En 2022, Natalya a reçu la bourse canon de la femme photojournaliste pour son projet en Yakoutie. Dans les mois à venir, la jeune photographe débutera une résidence à Ham dans la Somme. Elle y documentera la jeunesse calaisienne. Pour Natalya, le virus de la photographie est né en 2007. Après un passage en France et plusieurs années d’étude en marketing, la jeune femme choisit de revenir à son premier choix, la photographie. Or, le métier est compliqué, il y a beaucoup de candidats et peu d’élus. Nombreux sont les photojournalistes de talent qui ont du mal à financer leur travail. Peu importe, pour Natalya c’est son choix, elle persiste et se lance.

Avant de remporter la bourse canon en 2022, Natalya avait déjà candidaté avec des sujets aussi variés que les décrocheurs scolaires à Calais ou une communauté Soufie en France. Le reportage sur les Evenkes fut le bon sujet. «Pour moi, ce sujet était très important, et avant même d’avoir la bourse Canon, je me suis donc lancée en demandant un prêt bancaire. Cette année, les scientifiques se sont intéressés à mon travail, et ils m’aident aussi. Je me souviens quand je suis allée au lac Baïkal, j’avais acheté mon billet aller, sans le retour.

Au pire, je pouvais travailler sur place dans une base touristique pour financer le billet retour. Je pouvais aussi faire du stop. D’habitude, j’anticipe un peu pour que mon banquier ne m’appelle pas trop en panique, mais sinon je pars à l’aventure. Ce métier est plus qu’un métier, c’est surtout un mode de vie. Il y a toujours des surprises sur le terrain ou une rencontre qui nous fait changer de route. Quand la voiture tombe en panne et qu’il fait moins 45 degrés, il faut être assez souple et prendre du plaisir à vivre ces mésaventures.»

Le prochain projet de Natalya se décline dans le nord du Canada. Elle y documentera les conséquences du réchauffement climatique et la fonte du permafrost (ou pergélisol en français) qui libère méthane et toute sorte de virus oubliés.

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