Article mis à jour le 19 septembre 2018 à 17:58
Dans le cadre du festival international de photojournaliste, Visa pour l’Image et en partenariat avec l’Université de Perpignan (UPVD) et le Centre International de Photojournaliste (CIP), une dizaine de juristes ont planché pendant 24heures pour tenter de démêler les jurisprudences et lois qui concernent le droit d’auteur, la cession de droit des photographes ou encore le statut des photojournalistes. À l’heure où vient d’être voté par les instances européennes le rapport sur les droits voisins, qui ouvre les discussions vers un meilleur partage entre les auteurs de contenus et les GAFA*, le CIP et l’UPVD ont souhaité apporté leur contribution sous l’élan de l’ancienne députée européenne Maïté Sanchez-Schmid. Présente à l’ouverture de l’événement, Constance Le Grip, députée Les Républicains et Vice-Présidente de la commission culture de l’Assemblée Nationale, a rappelé les pressions subies par les lobbies sur les parlementaires.
♦ 24 heures de brainstorming juridique pour démêler le droit d’auteur des photographes, agences ou éditeurs de contenu
Dans le cadre de leurs travaux, les juristes ont auditionné Jean-Christophe Milhet, photographe, photoreporter et ancien résident du cip. Il a rappelé les 3 statuts disponibles, les subtilités entre ces 3 dispositifs et le flou qui existait lors d’une pratique nécessairement diverse de la photographie professionnelle compte tenu de la précarité du métier.
Car oui, la photographie professionnelle a profondément été impactée par l’omniprésence des réseaux sociaux. Des réseaux sociaux où, grâce à la multiplicité des filtres applicables aux images, tout le monde se pense photographe. Autant d’éléments qui ont obligé les professionnels à faire évoluer leur pratique, à développer des images de plus en plus belles, travaillées, ou impressionnantes allant parfois à l’encontre de la déontologie quand il s’agit de photojournalisme. Qui tout comme le journalisme se doit d’être factuel, ni embelli, ou ni artificiellement rendu trash.
Nous avons également rencontré Sylvain Chatry, enseignant-chercheur de l’Université de Perpignan, membre fondateur des Jeunes Universitaires Spécialisés en Propriété Intellectuelle (JUSPI), cheville ouvrière de ce hackathon. « L’idée est venue d’un brainstorming entre membres des JUSPI pour porter des évènements originaux« . Sylvain Chatry nous confiait que « le format est efficace puisqu’il permet d’aboutir à une réponse au plus près des besoins pratiques de l’établissement en demande ».
« Le travail de réflexion en groupe pendant 24h sur une thématique juridique n’est pas complétement étranger aux universitaires juristes puisqu’il s’agit d’une épreuve au concours d’agrégation en droit pour devenir professeur d’université. Toutefois, c’est la première fois que nous l’expérimentions en dehors du concours. C’est comme un marathon, il faut tenir la distance et ne pas faire fausse route ».
Qui dit droit d’auteur, dit reconnaissance du travail, du mérite. C’est un droit moral et patrimonial. Le droit d’auteur est la pierre angulaire de toute activité artistique, de toute activité culturelle. Au moment de la révolution digitale, il est important de réaffirmer que ce droit d’auteur est moderne car immatériel.
♦ Le droit d’auteur au coeur d’une bataille « quasi philosophique »
Le 12 septembre dernier, la commission européenne a adopté à 438 voix contre 226, la proposition de directive sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique, projet de 2016. L’objectif ? Amender le texte précédent datant de 2001 relatif à l’harmonisation des droits d’auteurs et des droits voisins dans la société d’information.
Constance Le Grip se souvient des batailles homériques, alors qu’elle était députée européenne : « Quand nous défendions le droit d’auteur à Bruxelles, nous étions taxés de ringards. Alors que pour moi, l’explosion d’internet ne veut pas dire que le droit d’auteur n’avait plus de raison d’être. Il s’agit d’une discussion quasi philosophique. Les lobbies, les groupes d’influence ont beaucoup de moyens. Mais face à nous, nous avions aussi des parlementaires qui ne comprenaient pas pourquoi il fallait continuer à avancer sur le principe du droit à la propriété intellectuelle ».
Le vote du rapport du 12 juillet est important pour la députée et particulièrement le vote de l’article 11 et l’article 13. « Nous espérons que cette directive débouche rapidement sur une loi, afin que nous puissions ensuite travailler sur la transposition de cette loi sur l’ensemble des pays membres ».
Les articles 11 et 13 sont ceux qui ont soulevé le plus de contradiction, en effet, l’article 11 établit un nouveau droit voisin** sur l’usage numérique des publications de presse au bénéfice des éditeurs et agences. Tandis que l’article 13 vise les plateformes et leur actuel statut « d’hébergeur passif » qui les exonère de responsabilités sur le contenu partagé sur leur outil. Ainsi aujourd’hui ni Google, ni Facebook, ne se sentent responsables du contenu publié par ses utilisateurs. Qui dit non responsable, dit pas de rémunération en contrepartie du contenu créé par les auteurs et autres organes de presse. Des auteurs qui grâce à leurs publications génèrent le flux qui permet aux GAFA d’accroitre leur chiffre d’affaire.
*GAFA : Google, Apple, Facebook et Amazon
** Droit Voisin : Selon l’encyclopédie participative Wikipédia, le code de la propriété intellectuelle fonde comme droits-voisins :
- le droit des artistes-interprètes
- le droit des producteurs de phonogrammes
- le droit des producteurs de vidéogrammes
- le droit des producteurs de bases de données
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