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Des violoncelles et des flûtes accompagnent la musique gitane : À Perpignan, ce projet de rumba symphonique réunit élèves du conservatoire et jeunes rumberos

C’est un rêve de mixité qui devient réalité au sein la Casa Musicale de Perpignan. Cesser de voir la rumba catalane comme un folklore du quartier Saint-Jacques, faire tomber les idées reçues et tisser des liens musicaux entre les gitans et les « payous », les non gitans.

Cet automne, les jeunes du conservatoire et ceux du quartier multiplient les répétitions pour un étonnant concert de rumba symphonique prévu le 14 décembre prochain.

Des enfants et adolescents pour faire tomber les barrières entre quartiers

Si une telle approche symphonique avait été esquissée chez les professionnels avec le groupe Tekameli, elle n’avait jamais encore concerné la jeunesse. L’idée a émergé d’une discussion entre Rebecca Bouillou, directrice de la Casa Musicale, et Joseph « Mambo » Saadna, président du comité d’animation Place du Puig et responsable du festival de musique gitane « D’a Sant Jaume Sem ! ».

A la Casa Musicale, Rebecca Bouillou, Roberto Saadna, Emma Espelt et Joseph « Mambo » Saadna, travaillent au projet avec le conservatoire.

Lors d’un jam autour des musiques cubaines, en présence du directeur du conservatoire Jean-Marie Scieszka, des rumberos de Saint-Jacques avaient participé à la soirée. C’est le déclic.

« Ce soir-là, on se dit que ce serait bien que les élèves respectifs se rencontrent et travaillent ensemble » explique Rebecca Bouillou.

70 élèves habitués des partitions travaillent sur une musique transmise oralement

Le projet séduit et les étoiles s’alignent. Le Centre National de la Musique débloque une subvention. Démarre alors un projet ambitieux. À partir du répertoire oral de rumba catalane interprété par sept gitans de Perpignan, dont le plus jeune n’a que neuf ans, il s’agit de construire un concert d’une heure accompagné par l’intégralité de l’orchestre symphonique du conservatoire, soit 70 élèves. Les morceaux sont enregistrés et transposés pour ceux qui travaillent à la partition.

Outre les répétitions communes, gitans et élèves du conservatoire ont aussi des entraînements de leurs côtés. Ici, des rumberos en plein travail à la Casa Musicale.

« On est des passeurs, des facilitateurs de rencontres » explique Rebecca Bouillou. Pour Mambo, c’est aussi le moyen de redonner vie à une pratique musicale qui se perd, même parmi les gitans. Si ces derniers écoutent toujours beaucoup de musique, Mambo constate de moins en moins d’instruments dans les familles de Saint-Jacques.

« J’ai toujours connu la rumba » se souvient-il. « Mes oncles étaient des chanteurs, on a vécu dans la musique. Il y a quarante ans, il y avait toujours des guitares dans les rues de Saint-Jacques. Un moment, il y a eu les synthés. Maintenant, il n’y a plus rien. J’essaie de transmettre à nouveau ça à des jeunes. »

Pas si simple avec une nouvelle génération qu’il faut raccrocher à la tradition ancestrale de la rumba. Sans compter cette lutte contre l’image de simple folklore aux yeux des Perpignanais. « C’est une musique qui fonctionne parfois mieux en dehors de Perpignan. »

Loin du folklore, une culture à partager

Le concert symphonique pourrait changer la donne. « C’est une reconnaissance » se réjouit Mambo. « Au début, je n’y croyais pas trop, car il y a beaucoup de boulot. » Mais la première répétition commune est un succès. « Quand on a été au conservatoire, nos musiciens et ceux de là-bas étaient comme des fous ! »

Il fallait voir ces contrebasses, violons, flûtes et autres clarinettes qui ont soudain suivi guitares et chants des gitans en catalan. Alors que le projet est encore en plein balbutiement, le résultat fonctionne déjà, la sauce prend et l’on perçoit le potentiel de cette fusion des talents. Plusieurs des titres ont d’ailleurs été composés par Mambo lui-même, une fierté supplémentaire.

Rendez-vous le 14 décembre pour la représentation au théâtre municipal de Perpignan, à 17h. Une centaine de places sera réservée aux habitants de Saint-Jacques. L’idée est en effet de travailler à la mixité y compris dans le public. L’entrée sera libre, mais mieux vaudra, dès l’ouverture de la billetterie en ligne, réserver sa place tant le projet séduit déjà.

Au point que les organisateurs ne peuvent s’empêcher de réfléchir à de prochaines collaborations entre rumberos et orchestre. Pourquoi pas, un jour, un album commun ?

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