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Débroussaillage à Perpignan : entre prévention incendie et protection de la biodiversité

Près de Perpignan, un feux de deux hectares contraint l'évacuation de 3 000 vacanciers

Article mis à jour le 7 juillet 2025 à 10:43

Protéger la biodiversité ou pratiquer le débroussaillage pour limiter les risques d’incendies ? La question se pose et divise dans les Pyrénées-Orientales.

Alors que la saison estivale démarre à Perpignan et ses alentours, certains abords de routes et parcs sont encore parsemés d’herbes hautes. Pourtant, ce mois de juin 2025 est le plus chaud jamais enregistré dans le département. Même si la végétation favorise la biodiversité, elle peut également accroître les risques d’incendie.

En plein mois de juin « c’est la forêt vierge »

Au parc Sant Vicens à Perpignan, les promeneurs de chiens sont scandalisés. « C’est terrible, c’est hyper sec, un vrai brasier. Puis il y a des habitations à côté. Ils ont un petit peu débroussaillé dans les alentours mais dans le parc à chiens, c’est la forêt vierge », raconte Marie, qui fréquente les lieux tous les matins depuis quelques années. 

À plusieurs reprises, elle et les autres habitués du parc ont tenté d’interpeller la mairie de Perpignan. « C’est pas un mail, c’est 20 mails, 20 appels téléphoniques, 5 déplacements à la mairie », scande Marie. Lors de son témoignage le 30 juin dernier, le débroussaillage n’avait toujours pas été effectué. En plus des risques d’incendie, des chiens se coincent des épillets dans le nez. L’un d’entre eux s’est retrouvé à deux reprises chez le vétérinaire. Didier a déboursé près de 200 euros pour des soins. « On a peur pour notre chien maintenant alors on y va plus », témoigne-t-il.

Cette année, la mairie a été prise de court. Avec une moyenne de 31,6°C, le mois de juin a été particulièrement chaud dans les Pyrénées-Orientales. Des températures qui n’étaient pas prévues et pas anticipées. Les agents ont alors dû revoir leur planning et commencer le matin aux alentours de 5h, nous explique David Tranchecoste, élu de la ville à l’embellissement du cadre de vie.

« La priorité c’est le débroussaillage et la sécurité des habitants, mais c’est aussi la mise en sécurité au maximum de nos agents, pour les protéger de cette vague de chaleur ». D’autre part, ce printemps a été particulièrement pluvieux par rapport aux années précédentes, ce qui a favorisé une croissance accrue de la végétation. Dans certains secteurs, un troisième passage de débroussaillage est donc nécessaire, au lieu des deux habituellement prévus.

« Le feu se nourrit de ce qu’il trouve sur son chemin »

La brigade RISC (réserve intercommunale de sécurité civile) des Pyrénées-Orientales, constate chaque année des manquements et les signale. « En fait, le feu se nourrit de ce qu’il trouve sur son chemin. Si à un moment, il n’y a plus de combustible, forcément il va ralentir, et on va pouvoir l’arrêter plus facilement », explique Jean-Marc Bassaget, bénévole de la brigade. 

D’ailleurs, Jean Marc rappelle la cause du terrible incendie entre Argelès-sur-Mer et Saint André, en 2023. Cette année-là, « ce sont ces zones non débroussaillées qui ont permis au feu d’atteindre les maisons ». En effet, les flammes avaient parcouru près de 500 hectares et détruit plus d’une dizaine de maisons. Le maire de la commune avait même porté plainte contre certains de ses habitants, qu’il jugeait responsables car ils avaient manqué à leur obligation.

La législation oblige les propriétaires à débroussailler un périmètre de 50 mètres autour de leur habitation, selon les lieux, l’obligation peut aller jusqu’à 100 mètres. «Malheureusement, il y a des zones, où les gens ne le font pas. Soit parce que ce sont des terrains qui leur appartiennent mais qu’ils ne viennent plus, soit parce qu’ils sont totalement négligents », développe le bénévole. Dans ce genre de situation, la brigade RISC effectue des patrouilles et fait des signalements. C’est ensuite aux services de l’État de mettre en demeure.

Trop d’habitations exposées aux feux

L’association Frêne 66, qui lutte « pour préserver les richesses du Pays Catalan », n’est pas favorable à la tonte des végétaux. En mars dernier, une consultation a été réalisée par la préfecture des Pyrénées-Orientales, sur les obligations légales de débroussaillement. Frêne 66 a été appelé et a émis ses demandes : « respecter une hauteur maximum d’herbe », « obliger les débroussaillages manuels », et « respecter les limites de 50 et 100 mètres » (ne pas élaguer si une maison est à plus de 50 ou 100 mètres de la végétation). Des demandes qui n’ont pas été entendues.

« Il faut commencer par se demander pourquoi il y a tant de maisons exposées. Pourquoi les documents d’urbanisme ont laissé construire toutes ces maisons exposées ? », questionne Stéphane Faure, secrétaire de l’association.

Dernièrement, du côté des Albères, un débroussaillement a été effectué, mais la terre est à nu. « Ça, on refuse », clame ce membre de Frêne 66.  « Ce ne sont pas les espèces qui sont protégées, ce sont leurs habitats, notamment certains oiseaux qui nichent au sol », développe-t-il. En effet, la période de nidification s’étend du 15 mars au 31 août en métropole. Couper les herbes à ras du sol pourrait alors fortement impacter la biodiversité.

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Emma Lemaire