Article mis à jour le 19 novembre 2020 à 19:17
Municipales 2020, insécurité, avancée des dossiers (palais de justice, université en centre-ville, salle multimodale), nous avons questionné Jean-Marc Pujol, maire de Perpignan. Propos recueillis.
♦ Palais de justice et faculté de droit en cœur de ville …
Pour l’université, ça se passe bien puisque tout a été validé dans le cadre du nouveau Plan Local d’Urbanisme, sans aucun recours. On continue, avec pour objectif d’être prêts pour la rentrée 2020. Aujourd’hui, on commence à travailler sur l’école Madame Rolland, l’immeuble Delacroix, idem pour la bourse du travail. (Relire notre article sur l’université en centre-ville)
Le Théâtre devrait être livré fin novembre 2019, et les nouveaux sièges devraient être installés courant du mois d’octobre. Il y aura aussi une surprise pour les Perpignanais. Nous menons actuellement une réflexion sur la possibilité de mettre en scène les contes de Noël durant les festivités de fin d’année.
Le Palais de justice en centre-ville avance aussi. Nous allons signer la convention avec la direction de l’immobilier de la chancellerie. Pour les parkings en sous-sol, j’ai eu l’accord de tout le monde. En ce qui concerne la mairie, il n’y a aucun problème. Après, malheureusement, je suis bien placé pour savoir que l’Etat ne respecte pas toujours ses engagements. Mais là, je n’ai pas d’inquiétude, nous devons signer la convention début octobre. (Relire notre article sur le palais de justice en centre-ville).
♦ … Salle multimodale au Vernet, tribune des Dragons, où en sont ces dossiers ?
La salle multimodale, on travaille dessus. Parce que la forme elliptique est complexe et lourde à faire techniquement. J’ai demandé aux services d’être très précis sur le travail qu’ils font avec l’architecte et les opérateurs. Parce que je ne veux pas me retrouver avec quelque chose qui ne ressemblerait pas au plan.
Je demande beaucoup d’anticipation sur les travaux, parce que ma marque de fabrique est « Zéro dépassement ! ». J’ai fait le Théâtre de l’Archipel sans dépassement, pourtant avec Jean Nouvel tout le monde se posait des questions. Sauf que je préfère travailler en anticipation, quitte à prendre un peu de retard. Mais l’important est de ne pas avoir de surprise à la fin. Parce que je pense que les scandales des dépassements discréditent l’action publique.
Nous travaillons aussi sur la nouvelle tribune du stade des Dragons Catalans. Comme je m’étais engagé à ne pas expulser le monsieur qui y vit, nous allons certainement faire la tribune en deux parties.
♦ Des projets peuvent-ils être abandonnés en cas de changement de municipalité en 2020 ?
Bien sûr, tout le monde peut revenir sur les décisions et les actions de son prédécesseur. On a tellement vu d’absurdités en la matière que je suis sceptique. Pour moi, une élection, quelle qu’elle soit, est un moment dans la vie, ce n’est ni une interruption, ni un changement. Je considère que ces travaux sont d’intérêt général. On a la chance d’être dans un pays libre où on peut voter. Et comme je ne suis ni Kim Jong-un, ni Xi Jinping, je pense que tout continuera.
♦ Un de ces projets vous tient-il particulièrement à cœur ?
Vous savez, quand j’ai pris la décision, quand j’étais adjoint, de faire le stade Aimé Giral, il ne me tenait pas particulièrement à cœur, idem pour le parc des sports. Ce qui me tient à cœur c’est l’intérêt général. Pour la salle multimodale, nous sommes la seule ville de plus de 100.000 habitants non équipée d’une salle fermée de plus de 1.000 places… C’est aussi simple que cela. Cela fait partie des équipements nécessaires, tout comme le musée Rigaud…
La salle multimodale se fera au nord, parce que nous avions l’opportunité de disposer du terrain pour rien du tout. Et toute mon action sur le nord commence à émerger. On voit aujourd’hui l’ouverture prochaine, près de l’hôpital, d’une clinique avec 200 lits de soin de suite. Un investissement de 300M€. Nous avons aussi trouvé un accord pour construire une maison de retraite et 160 lits de soins de suite à Torremila.
♦ Comment répondre à la montée des populismes ?
Il ne faut pas avoir la mémoire courte, il y a de cela 30 ans, le Front National n’existait qu’à Perpignan. Aujourd’hui, il est en tête dans 70 départements. J’en conclus qu’on n’a pas trouvé la solution pour y répondre. Et pourquoi ? Parce qu’il est plus facile de stigmatiser, de dénoncer, que de se préoccuper des vrais problèmes des Français, des Perpignanais. Je suis en train de lire « L’Archipel français »* de Jérome Fourquet et le déclassement dont il parle, je l’ai ressenti. Car je suis sur le terrain, et ce que je sens, ce qui me remonte, c’est un sentiment d’inquiétude, d’insécurité, de déclassement. Mon constat, c’est que nous n’avons pas su répondre collectivement à cette situation. Si j’inscris mon action dans du concret, c’est pour tenter d’y répondre.
84% des Français n’ont pas confiance dans les hommes politiques, ce n’est pas accessoire ! Donc au lieu de monter des grands projets pharaoniques, de faire des propositions qui ne correspondent qu’à une petite minorité, je pense qu’il faut aller sur le terrain et traiter « le devant de porte » des Perpignanais.
Vous savez, Monsieur Bolsonaro, ce n’est pas ma tasse de thé, mais 48 millions de Brésiliens ont voté pour lui. Monsieur Trump, ce n’est pas non plus ma tasse de thé, mais il a été élu ! En Europe, Monsieur Salvini, le résultat exceptionnel de l’extrême droite en Allemagne… Je me demande, qu’est ce que nous avons raté en tant que républicains pour que les électeurs votent pour ces gens ? Des gens, qui de toutes les manières, vont les amener à la catastrophe !
♦ Quelles sont les solutions face à l’insécurité à Perpignan ?
Les solutions sont simples ! Je n’arrête pas de les répéter !
Pourquoi ne donne-t-on pas au maire le permis d’habiter et le permis d’ouvrir ou de fermer un commerce ? Je connais comme vous les commerces qu’il faudrait fermer parce qu’ils font des trafics. Pourquoi je n’ai pas le droit de le faire ? Nous sommes dans un état de droit, mais il faut donner au maire des aspects décisifs.
Je plaide aussi pour une habilitation Police Judiciaire (PJ) pour la police municipale (PM) ? Trouvez-vous normal que le maire de Perpignan, qui n’a aucune compétence en la matière, soit habilité officier de police judiciaire (OPJ) ? Ils sont OPJ à la gendarmerie, à la Brigade anti-criminalité ou au GIGN et perdent leur habilitation dès qu’ils changent d’uniforme ! On marche sur la tête sur ces sujets-là.
Nous avons un État trop centralisé. L’État a beaucoup de mal à revenir sur le terrain, et donc on ne répond pas aux préoccupations. J’essaie d’apporter des réponses aux Perpignanais sur ce sujet. À Perpignan, nous avons fait des efforts considérables, nous sommes première ville de France avec 1 policier municipal pour 842 habitants. Un service de vidéo-protection 24h/24H. Et on est une ville qui n’est pas du tout touchée comme Marseille, Toulouse ou Montpellier où il y a des assassinats. Mais on doit permettre à la PM d’avoir ces compétences !
Moi, je suis jugé sur ce que j’ai fait. Quand je suis arrivée en 2010, il y avait 70 policiers, j’avais pris l’engagement de 160 personnels à la fin du mandat. En 2018, ils étaient 147 et à la fin du mandat, il y en aura 160. Au contraire des fausses promesses des uns et des autres, moi ce que je dis, je le fais !
♦ La situation politique perpignanaise à la veille des municipales ?
Je pourrais vous dire que le sondage** me conforte, mais je ne vous le dirai pas. Parce que je sais que la société est très fragile, que tout peut basculer d’un moment à l’autre. On est dans une société fragmentée. C’est un constat et je ne suis pas le seul à le faire. Jérôme Fourquet, et d’autres le font, et moi, j’essaie de donner du sens à l’ensemble de mon action. J’essaie d’aller chercher dans certains endroits pour y amener la culture. J’ai demandé aux centres sociaux de financer des cours de danse etc… Je vais sur le terrain et au-devant des endroits où on peut imaginer qu’il y a des difficultés. Voilà quelle est la marque de ce que je fais. Mais je suis quand même inquiet de cette forme de partition de la société.
♦ Votre sentiment sur la myriade de candidats ?
Il peut y avoir une myriade de candidats, tant mieux, ce qui serait inquiétant, c’est qu’il n’y en ait pas du tout. Mais la réalité, c’est que ce sont des arguties***. On découvre des gens qui n’ont même pas cotisé à un parti et qui se découvrent du jour au lendemain membre du Modem. Tout cela est ridicule. D’ailleurs, je pense que cette attitude contribue à l’effondrement de l’ensemble des partis politiques, et je le constate avec regret.
On peut retrouver des gens qui étaient au Front National et qui sont aujourd’hui de l’autre côté, et cela fait rire tout le monde. Tout cela ne contribue pas au sérieux politique, ni au respect de la vie publique. Je pense que ce sont des pseudo-opérations de communication, et que les Perpignanais et les Français ne veulent plus de cela.
Et si on ne répond au Rassemblement National que par des artifices, un jour, il gagnera les élections, c’est ça le sujet ! Le soutien des uns et des autres… tout cela ne compte plus, ce monde-là n’existe plus. C’est pour cela qu’il est dangereux. Parce qu’avant, il y avait une structuration politique, vous étiez communiste, socialiste, gaulliste… Mais aujourd’hui, il n’y a plus du tout de structuration, c’est le gloubi-boulga, ça veut dire quoi ? Quelles sont leurs convictions, que pensent ils sur les sujets ? Mon analyse est qu’il faut sortir de ça.
Vous savez, en 2014, on est même allé à Paris expliquer que je n’étais pas le bon candidat (rires). Mon analyse est qu’il faut essayer d’écouter les Perpignanais pour faire émerger quelque chose de sérieux, pas les ralliements de dernière minute.
♦ Où en êtes vous de votre réflexion ? Un possible tandem avec Fabrice Lorente**** ?
Moi ce que je fais aujourd’hui, c’est tenter de rassembler des gens de la société civile. J’essaie de convaincre, d’amener dans une réflexion commune des personnalités de la société civile. Des personnes qui pèsent dans leurs responsabilités, dans ce qu’ils ont fait, dans ce qu’ils représentent. Voilà ce que j’essaie de faire. Parce que ce qui compte, c’est ce qu’on fait pour Perpignan.
Avec Fabrice Lorente, nous avons fait, contre l’avis de tout le monde, la faculté de droit en centre-ville. Je peux vous dire que dans 20 ans, dans 30 ans, c’est ce que les Perpignanais retiendront. Parce que cela, c’est du véritable intérêt général ! Ce sont des personnalités comme ça qui méritent… Après, il faut qu’ils veuillent s’engager, parce que c’est difficile. Et je comprends que les gens hésitent. Des gens pour qui j’ai beaucoup de sympathie, que je connais bien, qui sont mes amis, en ce qui concerne Fabrice. C’est à lui de décider, pas à moi.
♦ Et le sondage ? Pourquoi ne pas le diffuser dans son intégralité ?
Je ne fais pas de plan sur la comète. Vendredi, j’ai discuté avec le numéro 2 de l’IFOP. Et finalement, je préfère être dans cette position que dernier. Mais il y a deux éléments qui m’ont intéressé et il m’a indiqué que cela pesait. C’est sur la notoriété, je suis un des maires sondés qui est le plus haut (NDLR 91% des personnes sondées déclarent connaître Jean-Marc Pujol). Et les opinions favorables (NDLR, 51% des personnes interrogées ont une bonne opinion de Jean-Marc Pujol). Pour moi, ces chiffres sont la reconnaissance du travail accompli.
Après pour le reste, par exemple, je suis devant tout le monde, loin devant, auprès des ouvriers et employés. Voilà, je pense qu’à un moment donné, le sens profond, c’est le travail qui a été fait. Il s’agit d’un sondage très complet, il y a même une analyse par canton, par âge… Je me réserve donc la possibilité de travailler dessus. Ce qui m’intéresse, ce sont les Perpignanais, et non les egos des uns et des autres. Surtout quand on voit leur taux de notoriété, ils devraient peut-être commencer à se poser des questions.
Une élection, c’est un point de rencontre, il faut y aller de manière détendue et tranquille. Il faut être capable de jouer collectif. J’ai été dans des équipes. Quand l’entraîneur m’a dit : « Tu ne joues pas parce qu’il y a meilleur à ton poste ». Ça m’a fait râler, mais j’ai accepté. Parce que cela permettait de faire gagner l’équipe. C’est pour cela que ma vision aujourd’hui est de constituer une équipe, et j’espère que j’y arriverai. Parce que c’est cela qui est important. Le reste, les états d’âme des uns et des autres…. Mais constituer une équipe, c’est le plus difficile. Ce qui compte, c’est une équipe.
*L’Archipel français est paru aux éditions Le Seuil
** Relire notre article sur le sondage
*** Argutie est un mot péjoratif qui désigne une subtilité excessive d’argumentation dont on use pour pallier la faiblesse, le vide ou la fausseté de la pensée
**** Fabrice Lorente était jusqu’en avril dernier Président de l’université. Relire notre interview lors de son départ.
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