Article mis à jour le 8 septembre 2024 à 08:59
Perpignan accueille du 31 août au 15 septembre 2024 le festival international du photojournalisme. Les bâtiments historiques de la ville seront le terrain de rencontres, de projections et d’expositions inédites. Quel programme pour cette 36e édition ?
VISA pour l’Image est l’occasion de mettre en lumière le travail de grands reporters du monde entier. Les projections au Campo Santo dressent un récapitulatif de l’actualité de l’année écoulée. Du 2 au 7 septembre à 21:30, elles permettront de se replonger dans les événements marquants que nous avons vécus au cours des derniers mois. Les guerres, les crises, le dérèglement climatique… et même les Jeux Olympiques de Paris seront au programme. Surtout, les 26 expositions soigneusement choisies sont l’histoire d’existences heurtées par les conflits armés, la pauvreté ou les crises climatiques.
La violence du monde au cœur de Visa pour l’Image
Cette année, 11 des 26 expositions seront consacrées aux conflits armés en cours dans le monde. Les expositions d’Hugh Kinsella Cunnigham et d’Ivon Prickett nous mèneront respectivement dans l’est de la République Démocratique du Congo et au Soudan où la situation humanitaire est « catastrophique. » Le reportage de Cinzia Canneri documente par ailleurs les violences systématiques ciblant le corps des femmes érythréennes et tigréennes. Quant au photographe John Moore, il met en lumière les violences de gang en Equateur, au même titre que Corentin Fohlen en Haïti.
Les reportages de guerre de long-cours auront cette année leur place à VISA pour l’Image. La rétrospective de Paula Bronstein sur trois décennies de conflits dans le monde en fera partie.
De même, les photos de l’écrivaine et anthropologue Anastasia Taylor-Lind propose une « une vision nuancée de la vie quotidienne confrontée à la violence militaire […] à contre-courant des représentations dominantes de la guerre. »
Le projet d’Afshin Ismaeli prend lui aussi le contre-pied des récits guerriers traditionnels. Il raconte dans sa série « les différentes facettes de la vie des Afghans ordinaires » dans un pays contrôlé par les Talibans.
Le conflit israélo-palestinien finalement exposé
Les murs des bâtiments de la ville de Perpignan afficheront aussi le conflit israélo-palestinien. Jean-François Leroy avait initialement refusé de traiter la guerre Israël-Hamas du fait des « réactions épidermiques sur le sujet, d’un côté comme de l’autre ». Lors d’une conférence presse en mai 2024, le fondateur de Visa avait déclaré : « je ne peux pas prendre le risque d’avoir 50 personnes qui vont venir massacrer une exposition parce qu’ils trouvent que je suis trop pro-palestinien ou trop pro-israélien ».
Pourtant, Loay Ayyoub, lauréat du Visa d’Or de la ville de Perpignan pour son reportage « La tragédie de Gaza » comptera bien parmi les 26 expositions. Quant à Sergey Ponoramev, du New York Times, il montre l’occupation israélienne en Cisjordanie et les répercussions du 7 octobre sur ce territoire. Ces deux photojournalistes documentent « l’un des conflits les plus dévastateurs du XXIe siècle. » Ces photos s’inscrivent dans un contexte alarmant, nous rappellent les photojournalistes. Celui de « la mort de plusieurs dizaines de milliers de personnes » et du « plus grand déplacement dans la région depuis la création d’Israël ».
Pauvreté, migrations et crises climatiques
Les inégalités sont aussi un sujet incontournable de l’édition 2024. À commencer par les inégalités économiques, que ce soit dans les quartiers de Naples, aux États-Unis ou à Mayotte. Le reportage de Gaël Turine se penche sur les ravages de la tranq à Philadelphie. Cette « drogue du zombie » a vu la mortalité de ses consommateurs bondir de 276% ente 2019 et 2022. Le photographe met en image la difficile prise en charge des personnes accoutumées souvent sans-abri.
Les projets sélectionnés s’intéressent également à l’exclusion et la précarisation de populations. Les communautés Roms photographiées par Mugir Varzariu apparaissent comme des peuples qui se voient refuser « l’accès aux besoins essentiels ». « C’est vrai en Europe, mais particulièrement en Roumanie, pays qui ne peut plus dissimuler sa dérive raciste », écrit le photographe. De même, « les deux murs » d’Alejandro Cegarra nous donne à voir les conséquences d’une politique mexicaine anti-immigration. Enfin, Francisco Proner exposera sur les « minerais du sang. » Cette série met en évidence les « tragédies environnementales » au Brésil provoquée par « un extractivisme prédateur et historique en Amérique latine ».
La France dans l’objectif des photojournalistes exposés à Visa pour l’image
L’Hexagone sera bien également représenté parmi les expositions de Visa pour l’image version 2024. Les Jeux Olympiques de Paris s’afficheront sur les murs de l’église des Dominicains. Le photographe Pierre Faure met quant à lui en lumière la « France périphérique » au travers d’un travail au long-cours sur les classes populaires des zones périurbaines et rurales. « Grandir dans la cour d’écran » de Jérôme Gence abordera par ailleurs l’utilisation des appareils électroniques par les jeunes. Nous pourrons enfin accéder aux coulisses de la Comédie française grâce aux photographies de Jean-Louis Fernandez exposées dans le couvent des Minimes.
Les expositions commentées par les photojournalistes eux-mêmes seront, en plus des rencontres, une manière de mieux comprendre leurs travaux. Le programme et les horaires exacts seront communiqués au cours du festival.
- « France périphérique » de Pierre Faure : « Ce n’est pas mon travail qui est violent, c’est la réalité » - 6 septembre 2024
- Gaël Turine à Perpignan : Les États-Unis rongés par la drogue du zombie - 6 septembre 2024
- Mugur Varzariu : le quotidien sans filtre des Roms au festival Visa pour l’Image - 6 septembre 2024