Article mis à jour le 10 avril 2020 à 10:32
Procédure simplifiée, modalités assouplies, le Préfet des Pyrénées-Orientales insiste : les dispositifs destinés à pallier les effets de la crise sanitaire « sont d’une grande souplesse ». Mais les professionnels paniquent, selon la Chambre de Commerce et d’Industrie des Pyrénées-Orientales. 6 sur 10 sont pessimistes quant au sortir de la crise.
Parmi les commerçants, l’une des craintes est la cessation pure et simple de l’activité. Demande de report, chômage partiel, fonds de solidarité sont autant de mesures déjà en place ; mais qui peinent encore à rassurer les professionnels. Des commerçants réclament la suppression de la Contribution Foncière des Entreprises (CFE) au président de la Communauté Urbaine Perpignan-Méditerranée. Certains syndicats, comme l’Union des métiers de la restauration et de l’hôtellerie, se dressent face aux assureurs pour que la garantie Perte d’Exploitation puisse s’appliquer au Covid-19. La prolongation du confinement et la probabilité d’une saison touristique à blanc pèsent encore sur le moral des entreprises ; surtout dans le 7e département le plus touristique de France.
♦ Suppression de la CFE – L’appel au secours d’une commerçante de Perpignan
Nadia Kharbouch, responsable d’une boutique de vêtements masculins en centre-ville de Perpignan, s’émeut de la situation. Elle déclare dans un courrier adressé au Maire de Perpignan et Président de la Communauté Urbaine : « Depuis le 14 mars, nous sommes nombreux à ne plus pouvoir exercer notre activité professionnelle ; et notre chiffre d’affaires s’élève à 0 € ».
Pour l’ensemble des entreprises soumises à l’obligation de fermeture depuis le 14 mars, elle sollicite l’exonération de la CFE perçue par la collectivité. Nadia Kharbouch interpelle Jean-Marc Pujol. « Il est important plus que jamais que vous montriez que le sort de toutes les TPE (Très Petites Entreprises), qui font la richesse de Perpignan, vous importe en faisant un geste pour assurer leur pérennité ».
Bernard Fourcade, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie des Pyrénées-Orientales, s’adressait également au président de la Communauté Urbaine. « Les collectivités locales peuvent […] contribuer à l’effort national engagé pour soutenir l’économie ; et ce en minorant, suspendant, ou exonérant les entreprises de notre territoire des taxes de leur ressort ».
Contacté par nos soins, Jean-Marc Pujol n’a pas encore répondu à ces demandes. Il a néanmoins, dès le 17 mars, mis en place certaines mesures :
- Gratuité du stationnement de surface,
- Exonération des droits de terrasse et taxes d’occupation du domaine public,
- Échelonnement de la perception de la taxe de séjour,
- Suppression de l’application des pénalités de retard sur les marchés publics.
♦ Angoisse de « l’après Coronavirus » pour les entreprises des Pyrénées-Orientales
704 entreprises du département accompagnées par la CCI des Pyrénées-Orientales ont répondu à une étude pour mesurer l’impact du Covid19 sur leur activité. Au 30 mars, 7 entreprises du département sur 10 avaient cessé complètement leur activité ; quand seulement 5% des sondés avaient gardé une activité normale.
Pour Damien Ribeiro de l’Union pour les Artisans des Pyrénées-Orientales, « tous les dispositifs cristallisent les attentes et les angoisses. Mais ce qu’on sent, c’est que chacun a peur de la suite ».
Depuis le début de la crise, le syndicat patronal tente de rassurer et de vulgariser les textes.« Il y a le temps des déclarations politiques ; puis le temps de la traduction dans les textes, le temps de la mise en place administrative, et enfin le moment où on peut faire les choses ».
♦ Les restaurateurs se dressent face aux « assureurs lâcheurs »
Depuis le début de la crise du Coronavirus, les organisations tentent de négocier pour leur secteur d’activité au plus haut niveau. L’Union des métiers de la restauration et des métiers de l’hôtellerie est en première ligne ; des établissements dont la fermeture a été décrétée en quelques heures le 14 mars. Depuis cette date, la perte du chiffre d’affaires est quasiment totale ; et même malgré quelques tentatives de transformation des établissements en vente à emporter.
Les assureurs n’ont pour le moment pas répondu à la demande de mise en œuvre de la garantie contractuelle dite « Perte d’Exploitation ».
Nous avons questionné un spécialiste local de la question. Ce dernier met en relation le chiffre de la perte d’exploitation de l’économie et celui de l’ensemble des cotisations liées à la garantie perte d’exploitation des professionnels. La perte liée à l’arrêt de l’économie avoisinerait les 100 milliards d’euros ; quand les cotisations de l’ensemble des assureurs misent bout à bout atteignent à peine 6 milliards. « On voit bien que cela n’est pas réaliste » rappelle notre source.
Selon lui, les assureurs comme l’ensemble des intermédiaires soutiennent l’effort collectif ; par exemple avec un gel des contentieux, un report des cotisations, voire un fond de soutien aux clients les plus en difficulté. Pour le reste, prévient-il, il faut penser l’après avec la mise en place de la garantie Catastrophe Naturelle. Une petite cotisation basée sur l’ensemble des assurés, afin de pouvoir indemniser les dommages subis par une partie des assurés touchés. Sinon, c’est le principe même de l’assurance qui est biaisé nous rappelle en substance ce spécialiste.
♦ Activité partielle – Les chiffres dans les Pyrénées-Orientales
Au 7 avril 2020, 5.700 entreprises des Pyrénées-Orientales ont sollicité le chômage partiel pour 39.873 salariés du privé. 4.788 dossiers ont d’ores et déjà été acceptés, ou sont en cours de validation.
Selon le responsable de l’antenne locale de la DIRECCTE*, les secteurs les plus impactés dans l’économie départementale sont :
- Le commerce et réparation d’automobiles et de motocycles : 23,6% des demandes (7 496 salariés concernés, 1 344 établissements)
- La construction : 15,9% des demandes (6.369 salariés, 905 établissements)
- L’hébergement et la restauration : 15,7% des demandes (5.599 salariés, 896 établissements).
La procédure débute par une demande de l’établissement au dispositif. Compte tenu de l’afflux massif des professionnels ou de leur comptable, le site a connu quelques retards, et les codes ont tardé à parvenir pour finaliser la demande.
Ensuite et au moment de la paye des salariés, les entreprises envoient les feuilles de salaires en précisant le taux d’activité partielle. Dans le principe, l’entreprise perçoit l’indemnité à hauteur de 70% du salaire brut. Charge à elle de payer sur cette indemnité ou de compléter le salaire à hauteur de 100% sur la base du volontariat.
Plus d’informations sur le site dédié
♦ Les fameux 1.500€ … pour qui ? Comment ? Quand ?
Selon l’étude réalisée la CCI, la mesure « dite des 1.500€ » est celle qui suscite le plus d’interrogations. Selon la direction départementale des impôts, pour les journées du 5, 6 et 7 avril, ce sont 3.150 entreprises qui ont bénéficié de ce fonds pour un montant total de 4.128.418€. Le montant moyen versé est de 1311€ par professionnel. Au niveau national, en 3 jours, 450.000 entreprises ont sollicité ce fonds de soutien.
Pour rappel, ce fonds de solidarité s’adresse aux commerçants, artisans, professions libérales et autres agents économiques, installés avant le 1er février 2020, quel que soit leur statut (société, entrepreneur individuel, association…) et leur régime fiscal et social (y compris micro-entrepreneurs), résidents fiscaux français, ayant :
- Un effectif inférieur ou égal à 10 salariés,
- Son chiffre d’affaires sur le dernier exercice clos inférieur à 1.000.000€,
- Un bénéfice imposable inférieur à 60.000€.
⊕ Les conditions pour prétendre à cette aide ?
Peuvent bénéficier du fonds, les entreprises ayant :
- Soit fait l’objet d’une fermeture administrative intervenue durant le mois de mars 2020. Confère décret publié sur LegiFrance.
- Ou subi une perte d’au moins 50% de chiffre d’affaires en mars ; et durant toute la durée du confinement. L’administration départementale des impôts nous précise : « La notion de chiffre d’affaires s’entend comme le chiffre d’affaires hors taxes ou, lorsque l’entreprise relève de la catégorie des bénéfices non commerciaux, comme les recettes nettes hors taxes ». La comparaison du chiffre d’affaires se fait par rapport à N-1 ; sauf si l’entreprise n’existait pas encore en mars 2019. Dans ce cas, nous précise la direction départementale de l’administration fiscale : « La comparaison se fera entre le chiffre d’affaires de mars 2020 et la moyenne mensuelle du chiffre d’affaires sur les mois d’activité depuis la création de l’entreprise ».
Selon Bercy : « Le fonds de solidarité est prévu de manière à soutenir un maximum d’entreprises et de commerces, en vue de couvrir leurs frais fixes pour la période sur laquelle ils sont impactés. L’objectif de ce fonds est d’aider les entreprises qui ont connu une baisse très significative de leur activité, afin de les soutenir face à cette situation exceptionnelle. »
⊕ Renseignements et aide sur le portail de l‘administration fiscale
La direction départementale des impôts se dit particulièrement à l’écoute de toutes les sollicitions et demandes d’accompagnement dans la démarche. Par téléphone ou par mail, l’objectif est de pouvoir soutenir les professionnels qui en auraient le plus besoin, nous confie la chargée de communication.
♦ Mesure anti-faillite par la Région Occitanie à compter du 15 avril
À compter du 15 avril, les entreprises les plus en difficulté pourront solliciter une aide complémentaire de 2.000 € auprès des services de la région Occitanie. Ces aides directes s’ajoutent à l’ensemble des autres mesures de soutien mises en œuvre pour les entreprises (report de charges fiscales et sociales, prêts garantis, chômage partiel, report de loyers et factures, etc).
Jusqu’au 31 mai 2020 au plus tard, l’entreprise se rendra sur une plateforme ouverte par la Région ; afin que les services régionaux puissent examiner sa demande. « Elle pourra joindre une estimation étayée de son impasse de trésorerie, une description succincte de sa situation démontrant le risque imminent de faillite, ainsi que le nom de sa banque qui lui a refusé un prêt de trésorerie d’un montant raisonnable, le montant du prêt demandé et son contact dans la banque ».
Ce dispositif « anti-faillite » vise les très petites entreprises qui seraient encore en risque de défaillance ; principalement en raison de leurs frais fixes. Plus de renseignements sur le site dédié.
Un numéro de téléphone dédié et gratuit est ouvert par la Région Occitanie : 0800 31 31 01.
♦ Les autres dispositifs pour les entreprises – Reports de charges ou de dettes, aide à la trésorerie….
Un site compile l’ensemble des aides et soutiens des acteurs économiques : SOS-Entreprises-Coronavirus.FR.
*DIRECCTE : Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi