Article mis à jour le 10 septembre 2024 à 17:15
Ce 20 octobre 2020, la communauté universitaire de Perpignan est appelée aux urnes pour renouveler son conseil d’administration. C’est ce dernier qui élira dans un second temps le président de l’UPVD*.
Xavier Py, qui se présente à sa succession, est en place depuis mai 2019 ; et le départ avant le terme de son second mandat de Fabrice Lorente. Yvan Auguet, doyen de la faculté de droit depuis 2015, se présente également à la présidence de l’Université.
Alors que, de coutume, les votants donnent une large prime au sortant, le résultat du scrutin pourrait être plus serré cette année. Interviews des deux candidats à la présidence de l’établissement d’enseignement supérieur. L’UPVD accueille environ 10.000 étudiants ; et emploie 900 personnels (tous statuts confondus) avec un budget annuel d’environ 70 M€.
L’université de Perpignan – Parent pauvre de l’enseignement supérieur.
Les candidats se rejoignent sur ce constat. Selon Xavier Py, l’université de Perpignan est sous-dotée par l’État par rapport à des universités comparables, telles que Reims ou La Rochelle.
« Nous devrions avoir 10% de moyens supplémentaires. Au niveau de la dotation de base, comme au niveau des emplois. 10%. Cela représente tout de même 7 millions de plus par an et une cinquantaine d’emplois d’enseignant-chercheur ».
Le constat est le même pour Yvan Auguet ; citant un rapport très précis commandé du temps de l’ancienne présidence de Fabrice Lorente. Même si le doyen de la faculté de droit et ancien étudiant de l’UPVD convient qu’à l’heure de faire des arbitrages, les tutelles des universités opteraient plutôt vers un soutien à des projets structurants.
Xavier Py refuse de rester dans l’attentisme. « Puisqu’on ne nous donne pas les sous, il faut aller les chercher. On le fait en répondant à de nombreux appels à projets. On est retenus sur certains ». Xavier Py de citer les dernières propositions où l’UPVD fut lauréate. « Sur le projet hybridation nationale, on touche 1M€. Il y a donc un rattrapage intéressant sur appels à projets ».
Quid du financement via la Fondation de l’Université
Regroupant une quarantaine d’acteurs socio-économiques du territoire, la Fondation de l’Université est aussi un moyen de compenser la sous-dotation de l’État à l’égard de l’UPVD. Mais, insiste Xavier Py, les autres universités ont aussi ces leviers pour lever des fonds.
Yvan Auguet souhaite également poursuivre le travail du « très bel outil » qu’est la Fondation ; et accroître l’intérêt porté aux mécènes. « Nous ne pouvons pas leur demander de participer à nos actions, sans leur porter toute l’attention à leur égard ».
Le nerf de la guerre reste donc la dotation de l’État. Le président en exercice milite pour la mise en place d’un plan de rehaussement pluriannuel avec l’État ; dispositif qui permettrait d’acter un budget de rattrapage en hausse sur plusieurs exercices.
Et la vie du campus universitaire ?
L’université de Perpignan comme de nombreuses universités pèche au niveau de sa vie étudiante. Réalisée par le site StuDocu, une récente étude classait l’UPVD 11ème sur 117 universités en France. La note (6,7/10) à la réponse « le campus est-il propice aux rencontres amoureuses » faisait baisser la moyenne l’UPVD. Même si la forme de la question a été l’un des sujets les plus commentés de l’étude, il n’en demeure pas moins que la vie étudiante est un des sujets à aborder lors d’une élection à la présidence.
Pour Yvan Auguet, il s’agit aussi de faire naître chez les étudiants « le sentiment d’appartenance à une communauté ».
Yvan Auguet revient sur la configuration de l’Université et de son campus principal. Hormis le campus Mailly – et la faculté de droit qui devrait revenir en totalité en ville en 2021 – Yvan Auguet fait le constat d’un campus qui excentre les activités universitaires du cœur de ville. Pour Yvan Auguet, « il est plus facile d’avoir une vie sociale, une vie riche en événements culturels et associatifs en cœur de ville ».
Outre cette configuration, le juriste souhaite également favoriser la création d’associations actives ; et encourager les étudiants à s’emparer du sujet pour devenir eux-mêmes les acteurs de leur vie étudiante. De son côté, l’Université doit être un catalyseur et impulser ce dynamisme.
Xavier Py propose de réhabiliter les anciennes serres ; des installations qui se trouvent derrière le bâtiment C et aujourd’hui utilisées par les services techniques. Selon Xavier Py, ces lieux pourraient devenir « de très beaux espaces de vie étudiante. […] Nous avons inscrit ce projet dans le prochain CPER** ». L’objectif est de créer de la vie en augmentant le mobilier sous la pinède, en mettant à disposition des instruments de musique dans la maison des étudiants… Autant d’éléments qui facilitent le lien entre les étudiants au sein du campus.
Poursuivre la mutation « verte » de l’UPVD
Xavier Py a poursuivi le processus enclenché par son prédécesseur : bornes électriques, migration progressive de la flotte de véhicule vers de l’hybride ou de l’électrique. Mais aussi des trottinettes électriques pour assurer la liaison intercampus.
Le président finalise également un éco-sentier destiné à mettre en valeur l’écosystème du campus. Par ailleurs, l’équipe de Xavier Py souhaite encourager les étudiants à s’emparer de ces problématiques pour réduire leur impact environnemental.
Quelles nouveautés en termes de formations ?
Pour Yvan Auguet, une réflexion s’impose au niveau de la santé ; car l’Université n’est acteur que très ponctuellement. « Il faut avoir un vrai projet qui pourrait intéresser la région, le territoire et la faculté de médecine de Montpellier pour offrir à l’Université une autre corde à son arc ». L’idée est d’envisager des formations de premier cycle en filière médecine. Un projet sur lequel Yvan Auguet reste très prudent tant les acteurs sont nombreux dans ce domaine.
De son côté, Xavier Py propose, entre autres, de créer des filières de formation en anglais. Cela notamment à destination des étudiants extracommunautaires rarement francophones. L’étudiant pourrait suivre une formation dispensée par l’UPVD ; et découvrir en parallèle la culture française le temps qu’il est là. « On peut difficilement demander à un étudiant passionné par le solaire ou par la génomique, d’être à la fois très bon en langue française et très bon dans sa discipline. Mais, aujourd’hui, on rate quelque chose car on n’attire pas ces étudiants ».
Comment gérer une université en temps de Covid ?
« Le mot d’ordre au printemps dernier était de gérer la crise ; mais il fallait aussi se dire que ça pouvait être la première d’une longue série. Comme les Coréens, il faut être capable de réagir le plus vite possible. Nous devons anticiper le fait que ce que nous vivons peut recommencer dans 3, 5 ou 10 ans ; et il ne faut pas être pris au dépourvu comme on l’a été au mois de mars dernier ».
L’université de Perpignan a mis en place un programme avec 3 scénarios :
- Le niveau 1 quand tout va bien ; celui qu’on connaissait avant le mois de mars 2020.
- Le niveau 2 : l’Université met en place un fonctionnement co-modal quand il y a un seul cas de Covid dans une promotion. Il s’agit de diviser la promotion en deux ; une partie se rend en cours, et l’autre partie suivra les cours en distanciel. En alternance une semaine sur deux.
- L’enseignement 100% en distanciel est prévu dès la découverte d’un cluster dans une formation. Est qualifié comme tel un groupe infectieux où 3 personnes sont testées positives. Dans ce dernier cas, l’enseignant peut prodiguer son enseignement depuis son domicile quand le débit internet le permet ; ou depuis son bureau à l’Université.
On voit moins l’Université dans les médias depuis votre arrivée, est-ce une volonté de votre équipe ?
« Les choses sont faites différemment. Et c’est quelque chose que l’on assume complètement. Quand Fabrice Lorente a pris la présidence, la plupart des gens ne savaient pas qu’il y avait une université à Perpignan. Il a fallu faire en sorte que les gens réalisent qu’ils avaient une université dans les Pyrénées-Orientales. Et pour ce faire, il fallait incarner l’Université avec une stratégie de communication très personnalisée. Ensuite on a eu une grosse réflexion avec l’équipe.
Maintenant que les gens connaissent l’existence de l’Université, on va leur montrer ce que l’on est capable de faire, et on ne va plus parler du président. Cela n’a plus d’intérêt. Par contre, on va parler de la recherche, de la formation, des opérations comme les tests covid.
J’ai aussi beaucoup communiqué à la rentrée dans l’Indépendant ou sur France Bleu Roussillon. On a désormais une communication beaucoup plus institutionnelle et académique. Nous communiquons tout autant ; mais sur ce que l’on fait faire en recherche, en formation, ou sur des opérations particulières ».
Pour Yvan Auguet, « le mécontentement est réel par rapport à la gouvernance actuelle »
« Je pense qu’il y a un vrai problème de gouvernance au sein de l’établissement. La gouvernance pratiquée est manifestement trop centralisée, trop hiérarchisée et parfois trop autoritaire. Ce n’est pas satisfaisant pour le personnel. Les personnels de l’Université se sont usés dans la mise en place des nombreuses réformes. Ils se sont usés dans un contexte qui a favorisé les conflits.
Nous, nous souhaitons mettre en place une gouvernance différente qui fasse plus confiance aux collègues et aux structures. Car si l’on ne rend pas la confiance aux collègues, ils sont dans la défiance, mécontents et parfois ils tournent le dos aux missions qu’ils sont censés réaliser.
Ce mécontentement est réel. J’en suis à près de 40 réunions, et partout où je vais c’est un point qui est particulier aigu. Je pense que demain, la gouvernance devra changer ; sinon le ressort sera cassé avec les personnels qui font fonctionner l’établissement.
Pour une nouvelle gouvernance, il faut de la fluidité, de la transparence dans les décisions, dans les carrières des personnels, dans la politique financière de l’établissement. On peut être d’accord ou pas d’accord avec la politique choisie, mais il faut être à même de pouvoir en discuter. Ce changement est important pour mieux travailler à l’avenir ».
Xavier Py et son équipe joue la carte de l’expérience
Le fait d’avoir été vice-président pendant quasiment deux mandats est une force selon Xavier Py. « Quand Fabrice Lorente nous a quittés, le Conseil d’administration continuait son mandat et c’est devant eux que j’ai candidaté. Je me suis présenté parce que j’ai considéré que c’était de notre responsabilité de finir le job. L’équipe que l’on propose aujourd’hui est expérimentée. Nous sommes des personnes issues de l’ancienne équipe ; Nicolas Dorandeu et moi-même. David Giband est vice-président recherche depuis 1 an, et Florence Cassignol est vice-présidente formation ». Florence Cassignol était déjà directrice du Centre d’Appui aux Pédagogies Innovantes. C’est notamment cette dernière qui a géré la mise en place du dispositif de la formation à distance.
« Aujourd’hui, être dans l’équipe de la présidence ce n’est plus de la représentation en coupant des rubans comme il y a 20 ou 30 ans. Mais c’est surtout gérer un établissement avec 920 agents, un budget de 70 M€, il ne faut pas se louper. C’est important qu’il y ait une certaine expérience des choses à faire dans l’équipe qui se présente ».
Xavier Py obtient son diplôme de l’École nationale supérieure des industries chimiques en 1989 ; il soutiendra sa thèse de doctorat cinq ans après. Maître de conférences, il intègre l’université de Perpignan en 1995, et est nommé professeur des universités en 2006. Son domaine de spécialité concerne le stockage de l’énergie ; couvrant l’ensemble du spectre des matériaux composites innovants aux procédés de stockage dédiés aux énergies renouvelables. Il est également professeur associé au sein de l’école d’ingénieurs 2iE au Burkina Faso pendant six ans.
Entre 2008 et 2012, il est directeur de l’école doctorale « Énergie-environnement » de l’université de Perpignan. Xavier Py est également membre du Conseil national des universités dans la section énergétique et génie des procédés depuis 2003 et expert auprès du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur depuis 2005. Source, site l’Étudiant.
Yvan Auguet porte la liste « Ensemble et autrement »
Yvan Auguet est doyen de la faculté de droit et des sciences économiques de l’Université Perpignan Via Domitia ; depuis 2015 et réélu largement en 2020. Il enseigne depuis 2011 en qualité de professeur des universités.
Depuis 2002, il est habilité à diriger des recherches. En 1998, il devient Maître de conférences des universités, après avoir été élevé au grade de docteur en droit privé, mention droit de la concurrence, pour la thèse intitulée « Concurrence et clientèle. Contribution à l’étude critique du rôle des limitations de concurrence pour la protection de la clientèle ».
Attaché temporaire d’enseignement et de recherche en 1994, Yvan Auguet est allocataire de recherche pour l’Université Montpellier I et moniteur à l’université de Perpignan du Diplôme d’études approfondies « Concurrence et consommation. Droit du marché » depuis 1991.
Plus de détails sur le projet soutenu par Yvan Auguet et son équipe sur le site « Ensemble et autrement pour l’UPVD« .
Comment se passent les relations entre les candidats à la présidence d’une université ?
Xavier Py se félicite du changement de tête de liste sur l’équipe qui se présente face à lui. Avant l’été, la liste opposante à Xavier Py était amenée par Hervé Blanchard. Selon Xavier Py, « Hervé Blanchard avait une stratégie très agressive en termes de campagne ». Xavier Py qualifie la campagne menée par Yvan Auguet de « plus feutré et académique ». « L’Université est le lieu privilégié où l’on doit faire la démonstration d’une démocratie digne, saine et responsable. Voir des démarches calomnieuses ou injurieuses comme on le voit dans la société civile est indigne d’une université ».
Yvan Auguet abonde dans ce sens : « Je pense que l’on est dans un milieu académique et que le fleuret moucheté existe ; mais des fois c’est un petit peu au sabre que ça se passe. Les conditions du scrutin sont très particulières ; comme le peu de temps pour s’organiser. Et même si le président en place bénéficie d’un certain avantage et de certains atouts, ça fait partie des règles du jeu et je les accepte. J’espère simplement être une surprise heureuse pour notre établissement. Je trouve le commentaire de Monsieur Py à l’égard de mon prédécesseur un peu désobligeant. Hervé Blanchard est quelqu’un qui a un grand sens du service public et je suis très fier de lui succéder à la tête de cette liste. Mais effectivement, je crois que ça se passe de façon très polie ».
Élections à l’UPVD le 20 octobre
La communauté universitaire vote pour élire ses représentants au conseil d’administration et au conseil académique (Commission Formation et Vie Universitaire et Commission Recherche). Dans un second temps, ce sont ces représentants élus qui voteront pour le président de l’UPVD.
*Université Perpignan Via Domitia
**CPER : Contrat Plan État Région.
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