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Emballement politico-médiatique : À la prison de Perpignan, les activités culturelles suspendues

Tentative avortée de prise d'otage à la prison de Perpignan

Article mis à jour le 25 février 2025 à 09:41

Depuis la polémique autour des activités dites « de loisirs » pour les détenus, à Perpignan comme ailleurs, l’ensemble des programmes culturels est à l’arrêt. Tout est parti d’un communiqué du 12 février 2025 de Force ouvrière pénitentiaire dénonçant « des soins du visage payés par nos impôts » pour les détenus de la prison de Seysses en Haute-Garonne.

Le syndicat des personnels pénitentiaire remet en question l’utilité de ces ateliers : « Est-ce réellement utile pour la réinsertion du détenu ? ». L’extrême droite s’est immédiatement emparée de l’affaire et le très droitier ministre de la Justice Gérald Darmanin a réagi via une circulaire interdisant toute activité « ludique » ou « provocante ».

Après vérification, l’activité de « soins du visage » était « une intervention d’étudiantes en école d’esthétique qui sont venues, bénévolement, donner des conseils de soins », explique Julien Donnadieu, conseiller pénitentiaire en probation et insertion et représentant syndical à l’Unsa Justice.

Nos confrères de France 3 relaient la parole de Frédéric Lestanc, délégué Unsa à Seysses. « On est ici dans le cadre d’un projet pédagogique. Il faut comprendre que nous sommes face à des personnes qui ont le plus souvent une piètre estime d’elles-mêmes. Se réinsérer suppose de regagner de la confiance en soi, et ça passe par accepter son image. Ces activités sont donc là pour s’ouvrir et décloisonner l’esprit. Et j’ajoute que les détenus pouvant en bénéficier ne sont pas du tout choisis au hasard. Il faut un projet ».

Emballement politico-médiatique et une directive floue

Après la polémique, la grande majorité des ateliers financés par le ministère de la Culture sont à l’arrêt. Quant à ceux à la charge du ministère de la Santé, elles ont été stoppées un temps, puis rétablies après une levée de boucliers des professionnels de santé. Selon Pascale Giravalli, responsable de l’Association des Secteurs de Psychiatrie en Milieu Pénitentiaire et l’Association des Professionnels de Santé exerçant en Prison, l’administration avait tout stoppé net, y compris les activités thérapeutiques organisées par des soignants.

Ateliers autour du soin santé, d’ergothérapie, de création… En psychiatrie, les dispositifs de groupe avec un médiateur sont très fréquents, précise la cheffe de service UHSA* psychiatre des Hôpitaux. Selon les établissements, les services n’ont pas fait le distinguo entre les activités pénitentiaires et celles organisées par les activités thérapeutiques. « Ces activités sont un outil du soin indispensable, notamment dans le processus de réhabilitation psychosociale. »

Une polémique pour cacher une réalité à laquelle on ne répond pas ?

Selon l’ONG Observatoire International des prisons, le ministre allumerait un contre-feu car il n’a pas les moyens de répondre à la surpopulation carcérale en France. « Gérald Darmanin aurait pu s’attaquer à un scandale bien réel : celui des conditions de détention. Au 1er janvier, 1239 personnes étaient entassées au sein de la maison d’arrêt de Seysses, qui ne compte que 580 places », rappelle l’OIP.

Pour l’ONG, la prise de position du ministre de la Justice est « un acte de pure démagogie, aux conséquences désastreuses, tant pour les personnes détenues que pour la société. »

Pour rappel, la maison d’arrêt pour hommes de Perpignan affiche un taux d’occupation de 227 %. En clair, au 1ᵉʳ janvier 2025, il y avait 445 détenus pour 196 places. Du côté du quartier des femmes, ce taux s’élève à 228 %, avec 64 détenues pour 28 places.

Sans oublier les conditions de travail des personnels pénitentiaires qui se dégradent de jours en jours. Agressions, tentatives de prise de d’otages, tirs de mortiers, viennent grossir un peu plus la rubrique faits divers.

*UHSA : Unité hospitalière spécialement aménagée.

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