Article mis à jour le 15 novembre 2019 à 07:53
Il n’est pas toujours facile de concilier travail et handicap. Plus éloignées de l’emploi, les personnes en situation de handicap subissent notamment la discrimination à l’embauche, des freins à la mobilité ou encore le manque d’accessibilité des lieux et des services. À l’occasion de la semaine européenne de l’emploi des personnes handicapées qui se tiendra du 18 au 24 novembre, l’agence QAPA a réalisé une étude sur les problématiques d’embauche. Retour sur ces résultats décevants et alarmants.
♦ Les personnes handicapées sont mal perçues par les recruteurs…
Chiffre alarmant : 52% des recruteurs pensent que les personnes handicapées ont des compétences inférieures aux autres. Seulement 44% d’entre eux pensent qu’une personne handicapée a les mêmes compétences qu’un autre employé. Cette façon de penser se traduit d’ailleurs par une discrimination à l’embauche.
68% des recruteurs avouent n’avoir jamais embauché une personne en situation de handicap. Cette conséquence s’explique tout d’abord par un manque de prise de conscience mais aussi par une méconnaissance certaine à ce sujet. Plus d’un recruteur sur deux ignore ce qu’est un handicap dit « invisible ». Pourtant, c’est le cas de 80% des handicaps. Il s’agit en réalité d’un handicap qui ne se « repère » pas directement. Contrairement à un fauteuil roulant par exemple.
On distingue 4 familles de handicaps invisibles :
- les maladies invalidantes (cancer, VIH, diabète…) ;
- les troubles cognitifs (dyslexie, dysphrasie…) ;
- le handicap psychique (TOC, troubles bipolaires, psychoses…) ;
- le handicap sensoriel (malvoyance, cécité, surdité…)
♦ Des témoignages accablants sur le quotidien des actifs handicapés
Stéphanie Delestre, fondatrice et présidente de QAPA : « Alors que le taux de chômage de la population active en France est d’environ 9% en 2019, celui des personnes en situation de handicap atteint plus de 19% ! Certains recruteurs se dédouanent en prétextant le manque d’aménagements nécessaires. Alors que 80 % des handicapés ne nécessitent aucune transformation du poste de travail. Il est urgent de combattre ces clichés et cette disparité afin de faire évoluer des mentalités qui ne progressent que trop lentement »
« La recherche d’emploi en elle-même est une bataille de plus. La loi a beau encourager l’embauche de personnes en situation de handicap, ça ne fait malheureusement pas tout, et mieux vaut savoir se vendre auprès des recruteurs. » (Daphnée)
« Alors que la recherche d’emploi des personnes bénéficiant du statut RQTH devrait être facilitée, je préfère le cacher lors d’entretiens pour ne pas être discriminée » (Pauline)
« Je n’avais pas particulièrement d’appréhension. Pour moi, mon handicap n’en est plus un, il ne me gêne plus. Mais voilà, je suis revenue à la réalité quand j’ai commencé à chercher un poste de stagiaire. Je m’y suis prise tôt, dès octobre. Mais arrivée en janvier, je n’avais toujours pas de réponse positive. J’avais des appels pour passer un entretien. Mais comme je ne pouvais pas répondre directement au téléphone, je passais par l’intermédiaire de ma mère ou d’un ami.
À chaque fois, c’était le même scénario : explication, questions de l’interlocuteur, réticence et retrait de l’offre. Rien à faire, même en disant j’étais en bac +4, que je bossais dur, que j’étais motivée… C’était décourageant. » (Jade, atteinte de surdité)
♦ 45% des Français confient avoir du mal à accepter un collègue handicapé
Les recruteurs justifient leurs difficultés à embaucher une personne reconnue handicapée de plusieurs manières. Selon eux, plusieurs causes peuvent entraîner un handicap et être ainsi un frein à l’embauche. 97% d’entre eux ne souhaitent pas recruter une personne atteinte d’une maladie liée à un comportement considéré à risque comme le tabac, les MST, les drogues ou l’alcoolisme. 44% des recruteurs ont du mal à recruter une personne qui présente une maladie liée au vieillissement. Les maladies développées suite à un accident de la vie (par exemple, lors d’une activité ou d’un accident de la route) rebutent 41% des recruteurs.
… Et par leurs futurs collègues.
Du côté des collaborateurs, les avis sont très partagés mais tout aussi inquiétants. Ainsi, 45% des Français confient avoir du mal à accepter un collègue handicapé. 29% déclarent que cela ne leur pose aucun problème mais 26% ne souhaitent pas se prononcer sur le sujet…
Par rapport aux recruteurs, on note une différence en ce qui concerne le type de handicap qui pourrait poser problème. 91% des collaborateurs seraient plutôt dérangés par une personne atteinte d’une déficience intellectuelle ou mentale comme l’autisme ou la trisomie 21. 75% déclarent qu’ils auraient du mal à travailler avec quelqu’un porteur d’un handicap psychique. Les handicaps moteurs arrivent en troisième position et ne dérangeraient que 51% des Français. En revanche, les maladies invalidantes se situent tout en bas du classement et n’importuneraient que 24% des collaborateurs.
♦ Que dit la loi sur l’emploi de personnes en situation de handicap ?
Depuis 1987, la loi prévoit un taux d’emploi de personnes en situation de handicap fixé à 6% pour les entreprises de plus de 20 salariés. Aujourd’hui, ce taux d’emploi n’est que de 3,4% dans le secteur privé, et de 5,5% dans le secteur public.
Cette étude montre donc que les Français sont assez méfiants en ce qui concerne le handicap au travail. Les mentalités ont encore du mal à évoluer, en particulier dans le monde professionnel. Pourtant, il est certain que des collègues partagent leur bureau avec une (voire plusieurs) personne reconnue comme travailleur handicapé sans le savoir et cela ne pose aucun problème…
La semaine européenne de l’emploi des personnes handicapées a pour principal objectif de faire bouger les choses en organisant des rencontres entre entreprises, politiques, demandeurs d’emploi en situation de handicap et associations.
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