Article mis à jour le 14 février 2023 à 07:15
Sorti en début d’année, le film Les Rascals sera projeté ce jeudi 16 février à 19 heures à l’Institut Jean Vigo de Perpignan. Une séance spéciale, puisqu’elle s’inscrit dans le cadre du César des Lycéens, et sera suivie d’un échange avec l’acteur Victor Meutelet. Ce dernier joue un des personnages principaux dans ce drame se déroulant dans un Paris des années 80 sujet aux violences de groupuscules d’extrême droite. Échanges avec Victor Meutelet. Photo de Une © Lea Rener / The Jokers.
3,4 sur 5 donnés par les spectateurs et la presse sur les critiques du site spécialisé allociné.fr : le film Les Rascals ne laisse pas indifférent. Il a la noblesse de traiter d’un fait de société encore d’actualité : la progression de l’extrême droite ; ou plus particulièrement dans cette fiction, des groupuscules identitaires.
Le synopsis complet :
« Les Rascals, une bande de jeunes de banlieue, profite de la vie insouciante des années 80. Chez un disquaire, l’un d’eux reconnaît un skin qui l’avait agressé et décide de se faire justice lui-même. Témoin de la scène, la jeune sœur du skin se rapproche d’un étudiant extrémiste qui lui promet de se venger des Rascals. Alors que l’extrême droite gagne du terrain dans tout le pays, la bande d’amis est prise dans un engrenage. C’est la fin de l’innocence. »
Son réalisateur Jimmy Laporal-Tresor de commenter : « J’avais envie d’aller vers un cinéma typique des années 80. Un cinéma populaire qui, en même temps, déroulait un propos sur la société. »
Victor Meutelet, né en 1998, joue le rôle d’Adam, un des skinheads.
Il précise les dire de son réalisateur : « C’est inpiré d’une époque et Les Rascals n’ont pas existé ; tout comme mon personnage. » Mais alors comment se préparer à un tel rôle ? « Je connaissais peu cette époque; hormis dans les grandes lignes : les affrontements entre bandes fascistes et anti-fa. Je connaissais par exemple la réputation de l’Université Paris II – Assas et l’extrême droite. Mais Jimmy m’a envoyé un bon paquet de ressources. »
Le jeune acteur – repéré par Claude Lelouch – poursuit quant à sa préparation : « Des documentaires sur ces mouvements ultra-violents : les Jeunesses Nationales Révolutionnaires, les skinheads, le GUD et des discours de Serge Ayoub. Mais aussi des vidéos plus générales sur l’ambiance et l’atmosphère des années 80 à Paris : la façon de parler, les expressions, le comportement, les habits, etc. »
Les Rascals a la volonté d’être un film intemporel.
C’est en tout cas ce qu’il dégage, en s’attaquant à un phénomène de société qui semble persister – voir à gagner du terrain – plus de trois décennies plus tard dans toute la France. Victor Meutelet est de cet avis : « Il résonne encore. J’ai l’impression que ça pourra être le cas encore longtemps. C’est l’ambition du réalisateur Jimmy Laporal-Tresor. »
Le personnage de Adam, un jeune skinhead hyper violent et totalement perdu, à incarner dans un long-métrage, peut être un challenge. L’acteur se confie « Le rôle peut être très inhabituel oui, mais la préparation n’a pas été si différente pour moi; à part des trucs concrets comme les scènes de baston. Mon but, en tant qu’acteur, est d’apporter le plus de vérité et de sincérité dans ce personnage. Il est une ordure, mais ça ne change pas mon approche. »
« Tout être n’est ni tout blanc, ni tout noir ; et il y a une part d’ombre et de lumière en chacun de nous »
Pour citer le président du tribunal de Perpignan l’avait rappelé face à des lycéens le 31 janvier dernier – dans la même salle et dans le même contexte que pour le déplacement de l’acteur Victor Meutelet le 16 février prochain : « C’est paradoxal, mais il ne faut pas faire le méchant de base, sans aucune aspérité et nuance. Même si son idéologie est à vomir, même si on le déteste, pour le film, il faut l’humaniser. Si j’y arrive, alors mission accomplie pour le réalisateur et moi-même. »
Il continue : « Le réalisateur n’est pas manichéen. Le film n’est pas militant. Cet aspect est très intelligent. Lors d’une projection, une fois, une dame a pris Jimmy dans ses bras, en lui avouant qu’elle s’était rendu compte de son racisme. Une autre a dit que Les Rascals était juste un film d’action, et non pas un film contre le racisme. C’est ça l’apport du cinéma et de l’art en général : deux personnes qui ont deux visions différentes. »
De la nécessité de prendre du recul ; pour ne pas tomber aussi bas, dans l’ignorance et l’idiotie. Ce sera l’occasion lors de la projection suivie de l’échange avec des lycéens des Pyrénées-Orientales : « Les ados peuvent avoir le même recul qu’un public plus âge et expérimenté. Au pire, si dans le personnage d’Adam, ils n’y voient qu’une ordure, ce n’est pas grave non plus ! Il y a du public de cinquante ans qui ne trouve aucune circonstance atténuante au personnage. Il y a, dans Adam, des petits aspects auxquels on peut se raccrocher ; mais si ça nous échappe, ce n’est pas grave. »
Ce ne sera pas la première fois que l’acteur échange avec des adolescents.
Pour lui, vaut mieux l’improvisation de la discussion après le visionnage du film : il en est certain, une question en appelle toujours une autre. Dans le cadre du César des Lycéens*, Victor Meutelet restera une journée de plus pour visionner d’autres films. L’occasion rêvée pour les jeunes passionnés ou curieux, de discuter cinéma, plus généralement.
« Je n’ai pas la prétention de dire que ce film et les interventions vont éduquer ou faire ouvrir les yeux ; mais au moins, on montre qu’à cette époque il y avait ces bandes qui existaient dans cette ville. On parle de groupuscules, de terreur dans Paris, et de violence qui mène seulement à la violence. Se faire justice soi-même n’est pas la solution. »
L’acteur conclut quant à ses attentes sur le César des Lycéens : « J’attends des élèves qu’ils me permettent d’apprécier encore plus les films. Dans ces échanges – même si j’ai la chance de bosser dans cette industrie – ma parole ne vaut pas plus que la leur. Qu’on soit dans le cinéma ou non, les recommandations de tout le monde valent celles de Jacques Audiard, ou de Claude Lelouch ; et c’est important ! J’adore discuter film et ciné avec tout le monde. C’est au lycée que j’ai commencé à me passionner. Le César des Lycéens n’existait pas encore. J’aurais adoré y participer. »
*L’Académie des Arts et Techniques du Cinéma et le Ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse ont créé en 2019 le César des Lycéens. Le jury est composé de 2000 lycéens de terminales issus de l’ensemble du territoire français ; dont des élèves du lycée Picasso, de Notre Dame de Bon-Secours et du lycée de Bagnères de Luchon.