Article mis à jour le 7 avril 2024 à 09:39
Moins d’un an après la promulgation de la loi visant à réguler l’influence en ligne, la DGCCRF* publie un premier bilan. Les services de l’État en charge de la répression des fraudes ont contrôlé 300 influenceurs et influenceuses. Et ils ont constaté des anomalies sur les publications de plus de la moitié des créateurs et créatrices de contenu en ligne.
Ces influenceurs mode, beauté, lifestyle, créateurs de contenus humoristiques ou streamers de jeux vidéo, ont écopé d’avertissements, d’injonctions voire pour 35 d’entre eux de poursuites pénales. Par ailleurs, la direction générale de la répression des fraudes a systématiquement eu recours au « name and shame ». Cette pratique venue des États-Unis consiste, dans un but « pédagogique », à afficher le nom des contrevenants sur les réseaux sociaux.
La France est le premier pays à adopter une loi visant à encadrer le secteur de l’influence en ligne
Grâce à leur très large audience sur les réseaux sociaux et les plateformes vidéos, les influenceurs constituent un vecteur promotionnel efficace pour de nombreux produits et services du point de vue des annonceurs. D’où la nécessité pour le législateur d’encadrer le secteur.
La loi du 9 juin 2023 définit des règles précises sur le cadre de l’influence commerciale afin de lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux. Pour accompagner le développement de leurs activités et les sensibiliser sur leurs obligations en matière de protection des consommateurs, les influenceurs ont à leur disposition depuis 2023 un guide initié par Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et économique.
CPF** et injections d’acide hyaluronique, parmi les anomalies
En 2022 et 2023, la DGCCRF a mené des contrôles dans ce secteur de l’influence commerciale. Ainsi, 98 influenceurs ont été contrôlés en 2022 et 212 en 2023 sur les réseaux sociaux tels que TikTok, Snapchat, Instagram et Facebook mais aussi les réseaux de communication Twitter, Telegram et la plateforme vidéo YouTube.
Bilan : près de la moitié des influenceurs contrôlés étaient en anomalie. La DGCCRF a constaté la mise en œuvre de pratiques commerciales trompeuses. « Les influenceurs n’indiquaient pas le caractère commercial de leurs publications ou n’identifiaient pas clairement la personne pour le compte de laquelle elles étaient diffusées. »
Pour d’autres, les faits sont encore plus graves. La DGCCRF a constaté que les influenceurs déclaraient ou donnaient l’impression que la vente d’un produit ou la fourniture d’un service est licite alors qu’elle ne l’est pas.
Parmi les pratiques les plus courantes : des injections d’acide hyaluronique réalisées par une esthéticienne n’étant pas qualifiée comme médecin, des formations financées par le CPF avec reversement partiel en espèces ou encore la vente de produits contrefaits ou dangereux. « Il a également été constaté que des influenceurs faisaient la promotion de produits censés soigner des cancers ou que des services pouvaient accroître les chances de gagner à des jeux de hasard et d’argent. »
En conséquence, la DGCCRF a reporté aux autorités compétentes des faits de promotions de potentielles contrefaçons et escroqueries ainsi que l’exercice illégal de la médecine.
Des sanctions pour ces stars des réseaux sociaux
Après deux ans d’enquête, 35 avertissements ont été adressés aux influenceurs pour lesquels des manquements ponctuels ont été constatés. En outre, 81 injonctions de mise en conformité ainsi que 35 suites pénales ont été adressées aux influenceurs épinglés pour des faits les plus graves.
Dans une volonté de pédagogie, la DGCCRF a choisi de publier sur les réseaux sociaux des influenceurs une partie des injonctions et des transactions prononcées. Les consommateurs et acteurs du marché ont donc pu observer les publications des condamnations de ces stars des réseaux sociaux.
Des résultats à la clé et des contrôles qui se renforcent
Selon la DGCCRF, les condamnations et les contrôles sont efficaces. Après les contrôles, une majorité des influenceurs se met en conformité. Toutefois, les investigations se poursuivent auprès de ce ceux qui ne sont pas dans ce cas.
Les services de la répression des fraudes rappellent que pour les pratiques les plus graves, la loi du 9 juin 2023, permet d’adresser des injonctions sous astreinte financière tant que la mise en conformité n’est pas effective soit par l’arrêt des pratiques soit par le retrait des contenus. La DGCCRF dispose aussi d’un pouvoir de réquisition, mais aussi celui de demander directement aux plateformes de limiter l’accès au contenu illicite.
Les contrôles continuent de se renforcer en 2024 avec pour objectif « de détecter et sanctionner des pratiques commerciales trompeuses à propos de la conformité des produits et de la promotion des produits et services financiers considérés comme hautement risqués. »
Un Cash Investigation qui affiche les influenceurs
Dans le numéro de Cash Investigation diffusé le 4 avril 2024, Elise Lucet a décidé d’étudier les pratiques ces influenceurs. Ces influenceurs sont aujourd’hui poursuivis pour escroquerie par des victimes qui ont cru en leurs investissements « garantis sans risque ». Marc Blata, qui s’est spécialisé dans le copy-trading (une méthode d’investissement permettant à un investisseur de copier et répliquer automatiquement les transactions d’un autre investisseur plus expérimenté) et actuellement au cœur d’une enquête suite à une plainte pour escroquerie a été interviewé par la journaliste d’investigation. Pour sa défense, l’influenceur a enchaîné les comparaisons douteuses et a qualifié certains de ses abonnés « d’idiots ». Certains ont pourtant perdu des milliers d’euros en suivant les conseils de leur « mentor ».
* Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.
** CPF, Compte personnel de formation.
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