Article mis à jour le 2 mai 2024 à 15:32
Ce 1er mai, Perpignan était l’épicentre du Rassemblement National. Depuis le Palais des congrès de la plus grosse ville dirigée par le RN, le président du parti, et tête de liste pour les prochaines européennes a fait son show. Sous l’œil attendri de Marine Le Pen, Jordan Bardella a déroulé un discours de plus de 40 minutes dans une salle de 2.000 militants acquis à sa cause. Ambiance et propos du meeting de Jordan Bardella à Perpignan.
En ce jour férié, les allées Maillol sont en ébullition. Louis Aliot, Marine Le Pen et Jordan Bardella sont attendus pour le meeting du RN dans le cadre des élections du 9 juin prochain. Devant le Palais des congrès, une file d’attente digne d’un concert de rock canalisait les militants venus écouter religieusement les discours politiques. Signe de l’ambiance électrique, à l’arrière du bâtiment, une dizaine de camions des forces de l’ordre sont positionnés. Et dans la salle trépidante à l’idée d’entendre leurs mentors, des « Jordan on t’aime » et des « Marine Présidente », alternent avec des reprises de Joe Dassin remixées. Puis sous le halo de lumière des caméras, Jordan et Marine font leur apparition dans la salle. Les drapeaux français s’agitent frénétiquement en rythme avec la musique de DJ.
Un meeting à Perpignan pour mobiliser, éviter la dispersion et la désaffection
Si en off, l’électorat de Jordan Bardella vient du centre-droit à la droite la plus large, le président du parti tend désormais la main à ceux qui seraient tentés par la nièce de Marine. Pour rappel, Marion Maréchal, anciennement Le Pen, a rejoint Éric Zemmour lors de l’élection présidentielle. La petite fille de Jean-Marie Le Pen est aujourd’hui la tête de liste de Reconquête. Pour le Rassemblement National, la liste, créditée selon les sondages de 5%, n’est pas en capacité d’inverser la dynamique.
Et si Jordan Bardella a fermé la porte à une alliance d’appareil, l’appel aux électeurs de Reconquête fut largement appuyé ce 1er mai à Perpignan. Accusé de manque de radicalité, notamment sur les sujets d’immigration, le RN ne différerait de Reconquête que sur la forme et non pas sur le fond des idées. D’où les propos de Jordan Bardella, à l’attention des près de 2 millions d’électeurs d’Éric Zemmour : « Vous craignez la submersion migratoire ? Alors, votez pour ceux qui vont l’arrêter. Vous craignez le suicide français ? Alors votez pour ceux qui peuvent renouer avec le destin français. »
Le Rassemblement National craint aussi la désaffection d’un électorat convaincu que la bataille est déjà gagnée et qu’il n’est plus nécessaire de se rendre aux urnes le 9 juin. Pourtant ce 1er mai, les militants venus de Perpignan, de Carcassonne ou de Narbonne étaient bien au rendez-vous. Ils étaient près de 3.000 à Perpignan répartis sur deux salles. L’affluence plus large qu’attendue a contraint certains à rebrousser chemin aux portes du Palais des Congrès. En effet, après une longue attente et 15 minutes après le début des prises de parole, le service de sécurité a fermé les portes, laissant plus d’une centaine de militants endimanchés dépités de ne pouvoir accéder au meeting.
Marine Le Pen appelle à infliger « la plus cinglante sanction électorale » à Renaissance
Ce mercredi à Perpignan, avant la stratification de Jordan Bardella, Marine s’est affichée, malgré quelques ratées dans la sono, en chauffeuse de salle. Avec un discours d’une trentaine de minutes, la candidate « naturelle » pour l’élection de 2027 a parlé un peu d’Europe, mais surtout du « sort » du peuple Français. Selon la députée du nord, c’est la survie même de la France qui serait en jeu ce 9 juin. À chaque évocation d’Emmanuel Macron, la salle hue et siffle, couvrant même les propos de Marine Le Pen.
Elle appelle les électeurs à « se lever et à combattre pour congédier le pouvoir en place. (…) Nous devons donner à ce pouvoir la plus cinglante sanction électorale. » Pour Marine Le Pen, tout va se jouer dans l’écart entre la liste RN donnée, par les sondages, à plus de 30% et celle de Valérie Hayer, soutenue par la majorité présidentielle. Actuellement, les intentions de vote en faveur de Valérie Hayer, tête de liste Renaissance, ne semble bénéficier d’aucun frémissement dans l’opinion.
Une configuration qui encourage l’extrême droite à préparer l’après. Dans la stratégie affichée du RN, la dissolution de l’Assemblée Nationale et une cohabitation où Jordan Bardella serait à Matignon. Mais en attendant cette entrée sous les ors de la République, les cadres du RN se montrent prudents et appellent surtout à ne pas se démobiliser. Pour Louis Aliot, « les adversaires sont peut-être avachis, mais ils restent venimeux et ils sont prêts à tout. »
Louis Aliot affiche un Perpignan qui serait la « photo d’une France qui souffre »
Pour le vice-président du Rassemblement National, le scrutin européen est la première étape électorale qui devra conduire Marine à l’Élysée en 2027. Des propos qui rappellent ceux à la veille des municipales de 2020, où la conquête de Perpignan devait être le premier bastion pour gagner les élections départementales et régionales l’année suivante. « Perpignan a fait le choix du changement depuis juillet 2020 et ne s’en porte que mieux ».
Souvent qualifié de laboratoire du Rassemblement National, selon le maire, Perpignan est au contraire « un cas d’école (…), une photo de la France qui souffre que le pouvoir parisien méprise. » Louis Aliot rappelle « l’abandon, la compromission, la démission de la part de ceux ont été élus depuis 30 ans. » Il dénonce un communautarisme, et des trafics de drogue installés, et qui continuent à fleurir malgré son élection.
Lutte contre l’immigration, un thème largement plébiscité à l’applaudimètre
Si les discours de Louis Aliot et de Marine Le Pen ont tous mentionné les difficultés sociales, le pouvoir d’achat, le prix de l’énergie ou le mépris de ces élites parisiennes à l’encontre des Français, quand le RN parle de l’immigration, de la submersion migratoire et de l’islamisme l’applaudimètre s’agite. Signe que le sujet reste la base idéologique ancrée du parti d’extrême droite. Dans la salle, les militants chantent : « On est chez nous » et dans la file d’attente de nombreux propos prônent la préférence nationale.
La tête de liste RN voit dans le vote du 9 juin « un grand référendum contre l’immigration », propos ponctués par un sonore, « Jordan on t’aime ». Pourtant selon Marine Le Pen, la vision de l’Europe du RN ne serait pas « égoïste » ou « repliée » sur elle-même, mais « humaniste parce qu’elle place l’homme et les communautés nationales au cœur de notre politique. » Jordan Bardella enfonce le clou sur le sujet, avec une tirade faisant le lien entre délinquance, islam et respect des femmes.
Au-delà des discours, les fans atteints par la « jordanmania »
Le point d’orgue pour les groupies de l’homme politique fut le moment où, pour cause de salle surchauffée, il dût retirer sa veste ; dans le public, des sifflés, des « Jordan on t’aime » et un sonore, « Jordan tu es beau ». Puis, juste après le discours, à la fin de la Marseillaise entonnée en chœur, alors que retentissaient les premières notes de Despacito et que la salle commençait à se vider, les fans se sont précipités sur le jeune homme pour obtenir un selfie. Enfin, comme à la fin d’un concert, plusieurs dizaines de personnes attendaient Jordan à la sortie de la salle pour obtenir un autographe, ou un selfie pour l’arborer sur Tiktok ou Instagram.
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