Article mis à jour le 9 juin 2023 à 15:21
Georges Bartoli est de ceux qui ne laissent indifférents ; de par son humanité, entre autres, et son dévouement à la photographie de reportage. Collaborateur régulier des journaux L’Humanité et Le Monde, antifasciste infatigable, porte-voix de son oncle Josep Bartoli, fondateur du festival L’Oeil sur la Montagne à Matemale : la liste est longue pour présenter le personnage. Vendredi dernier sortait en librairie son roman « C’était un joli nom camarade » – aux éditions Arcane 17. Une première qu’il nous présente. Photo de Une © Georges Bartoli.
Pour citer son auteur Georges Bartoli, le roman « (C’était un joli nom camarade) est un polar politique. Le contexte est peut-être plus important que l’intrigue policière elle-même. »
C’est l’affaire de la mort suspecte d’un peintre* d’une ville moyenne du sud de la France. La ville n’est pas identifiée. On peut se situer. Sans forcément se rattacher à Perpignan. On retrouve la victime chez elle, le crâne fracassé. Toutes les possibilités sont ouvertes. Mais la première est celle d’un meurtre.
Le jeune auteur poursuit, cultivant dans le suspens : « Ce peintre est membre du Parti Communiste. Il y avait du bouillonnement autour de lui. Disons qu’il n’avait pas que des copains dans la maison. Il y faisait office d’intellectuel de premier plan. À sa mort, les réactions étaient très opposées. Ce n’était pas quelqu’un de simple. Cela met un coup de projecteur sur les petites histoires entre militants. »
Il poursuit : « Mais aussi les relations, les interactions, parfois ambiguës, entre militants et journalistes. Entre journalistes et policiers ; ces derniers menant l’enquête. Et entre même corps de métier. »
Le Parti Communiste ? Georges Bartoli, l’homme, y a beaucoup milité. Il l’a beaucoup fréquenté aussi, à des distances variables. « J’en suis fier. J’y ai des amis. »
Un jour, celui qui perpétue la mémoire de l’artiste antifranquiste Josep, ne renouvelle pas sa carte au PC. « Je n’ai plus compris où le Parti allait. Lorsque Georges Marchais cède sa place à Robert Hue, ça a été un grand moment de désarroi politique. Le PCF était jusque-là un centre de gravité de la gauche française. Ça n’a plus été le cas, au profit du Parti Socialiste. Le PC a subi une perte de repères, et un recul systématique à chaque élection suivante. Il y a eu de l’errance politique, notamment avec le démantèlement de l’URSS. On ne s’en rend plus compte, mais il y a trente ans, on entendait parler du PCF tous les jours – en bien comme en mal. Aujourd’hui, tout le monde s’en fout. »
Georges Bartoli a cette relation intime avec les tréfonds de ce dinosaure politique qu’était le Parti Communiste Français. Il en a puisé une inspiration débordante pour son polar « C’était un joli nom camarade ». Il se confie : « Je reste le même au fond de moi. Je porte les mêmes valeurs – avec une carte de membre à jour, ou non. Disons, aussi, que j’ai beaucoup photographié pour le Travailleur Catalan et L’Humanité : j’ai longtemps grenouillé dans les couloirs et ces environnements. On peut y ressentir beaucoup de choses. Et j’ai vu le Parti s’effondrer de l’intérieur. Tout comme j’ai saisi l’atmosphère dans les commissariats de Police ; leurs arrière-cours, les ambiances, les sons et les odeurs. »
Georges Bartoli a une vision intime du Parti ; mais aussi de la Police, des sphères politiques et de journalistes : « Si je n’avais pas été photographe de presse, je n’aurais pas pu écrire ce livre. »
Interrogé sur ce qui a déclenché son envie de se mettre à l’écriture de « C’était un joli nom camarade », il répond d’entrain : « C’est juste l’envie et la prétention de partager quelque chose que je connais bien. J’en ai marre des gens qui parlent de ce qu’ils ne connaissent pas. Je ne suis pas là pour faire l’apologie de quelque chose. Ni pour régler des comptes. Cette fiction n’est pas tendre avec ces milieux-là ; autant, elle est bienveillante avec des personnages. »
Il continue : « Je me suis construit sur cette appartenance. Dans cette histoire, je dis les choses comme je les ai vécues. Le polar est un excellent moyen d’introspection. Et c’est un reflet de notre société ». Le livre d’un militant et photojournaliste. Est-ce un challenge ? « J’étais très bavard en photographie. Mais elle ne m’a pas permis de tout dire. »
« C’était un joli nom camarade » de Georges Bartoli, aux éditions Arcane 17, est disponible dans toutes les librairies de France.
*Georges l’assure : « Aucun rapprochement n’est à faire avec Josep. »