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Train des primeurs – La CGT s’invite à une réunion interne entre direction et cheminots

Article mis à jour le 12 avril 2024 à 15:13

L’un des directeurs de Fret-SNCF, jusque-là opérateur du train des primeurs, était à Perpignan pour entendre les cheminots. Une occasion saisie par le syndicat CGT pour tenter d’obtenir des réponses claires et concrètes au devenir de cette ligne Perpignan Rungis. Une ligne ferroviaire devenue, au fil des mois, le symbole de l’attentisme français en matière d’économie et d’écologie. Malgré un début de dialogue relativement fermé, Stéphane Derlincourt (numéro 2 de Fret-SNCF) a bien voulu répondre aux syndicalistes présents. Une discussion qui s’est déroulée dans le calme, mais sans pour autant satisfaire les syndicalistes, bien déterminés à ce que le train des primeurs ne soit pas le train déprimé.

♦ Des interrogations sur les 82 wagons parqués à Nîmes 

Au début de l’été et selon la direction du groupe, les wagons ont été conduits à Nîmes pour une révision. À quelques semaines du 1er novembre, date butoir à laquelle la ministre s’est engagée à faire rouler à nouveau le train des primeurs, différents bruits circulent sur ces wagons.

Selon les parties en présence, ces wagons frigorifiques, de type I87 et I67, qui acheminaient les fruits et légumes de Saint-Charles à Rungis seraient à l’agonie. État qui nécessiterait un remplacement de toute urgence pour la somme de 2M€. Pour d’autres, ces 82 wagons ne nécessiteraient que des menus travaux. C’est pour connaître le fin mot entre ces deux discours qu’Elisabeth Borne, ministre des transports et de l’écologie, a demandé à la SNCF un audit.

« Le sujet des wagons est dans les mains d’Ermewa (filiale du groupe SNCF), qui est en train de regarder les travaux nécessaires pour prolonger la durée de vie. Et voir dans quelle mesure on saurait sauver une partie du parc pour pouvoir le réexploiter à partir du mois de novembre ». La représentante syndicale de rétorquer : « Nous, on les a ces informations ! On sait exactement ce qu’il y a à faire sur chacun des wagons. Donc cela pourrait aller très très vite ».

En août dernier, un des cheminots en charge du train nous avait confié que la remise sur les rails de ces wagons ne se faisait pas aussi simplement. Et, qu’habituellement, la période d’arrêt de la liaison ferroviaire était nécessaire à leur révision. Or, à ce jour, aucune maintenance n’est prévue, si l’on en croit Stéphane Derlincourt.

♦ La SNCF se désengage-t-elle ?

Au sortir d’une énième réunion sur le sujet au ministère des transports, le journal Les Échos révélait la volonté de désengagement de la SNCF. Information confirmée par le communiqué de presse laconique de la présidente de la Région. Carole Delga exhortait récemment la SNCF à « cesser de faire semblant ». 

Membre de la CGT66, Charlotte voulait entendre Stéphane Derlincourt sur la volonté de la SNCF de rester opérateur de cette ligne. Or, ce denier a répondu « nous sommes positionnés sur le métier de la traction ferroviaire ». Confirmant par la-même que la SNCF ne fera plus qu’affréter des locomotives pour tracter les wagons. Ces derniers seront donc chargés et déchargés par des salariés d’un opérateur privé.

Stéphane Derlincourt évoque la réunion au ministère et les différents métiers du ferroviaire. « Entre le chargeur et le client final, il y a les transporteurs qui choisissent leur mode de transport. Quand ces transporteurs n’ont pas assez de marchandise pour pouvoir acheter le train complet, ils font donc appel à des opérateurs. Ces commissionnaires choisissent le mode de transport le plus approprié pour acheminer la marchandise. Alors que d’autres fois, ils choisissent de grouper la marchandise pour acheter des trains entiers ». Stéphane Derlincourt de lister quelques sociétés privées susceptibles de devenir opérateur sur cette ligne, telles Combiverter ou Novatrans (ex-filiale de la SNCF).

Nicolas Pontier, responsable commercial de Novatrans pour le Sud de la France et l’Espagne déclarait au journal Les Échos du 11 septembre « Ce marché des primeurs, on l’a regardé de près pendant des années ; il s’agissait d’aller chercher des flux traités par la route, en complément de la SNCF. Mais les transporteurs routiers n’ont pas eu confiance, et tant que l’on n’a pas un service partant en fin d’après-midi, pas la peine de rêver ».  

♦ Pas d’opérateur, pas de clients, et pas de wagons

Le choix de la SNCF de n’organiser que la traction des wagons reste une hypothèse. Hypothèse sur laquelle les cheminots présents interpellent le directeur. « Je ne vois pas comment en 1 mois, en claquant des doigts, on va trouver 7 bonhommes. À Perpignan, on ne sera plus que 20, et comment allons nous faire pour assurer le travail de 7 agents supplémentaires ». Un effectif nécessaire pour remettre le train sur les rails, et le faire fonctionner au quotidien. Stéphane Derlincourt de répondre : « Nous avons d’autres conducteurs disponibles. Si on doit faire face à la circulation de ce train, on saura faire ». Discours immédiatement traduit par les cheminots : « donc ce train, il n’est pas sûr de rouler ! ».

La prochaine réunion est prévue lundi 23 septembre au ministère. Mais à ce jour, sans opérateur, sans clients, et sans wagons fonctionnels, le redémarrage au 1er novembre semble très compromis, voire impossible.

La problématique de ce train n’est pas simplement technique, elle est aussi économique. Selon Stéphane Derlincourt, « nous sommes à l’écoute des besoins du marché ». Si on en croit les cheminots, un marché qui existe bel et bien. Sauf qu’en l’absence d’engagements fermes de Fret SNCF, les ex-clients ont choisi de sécuriser leur métier et leurs marchandises. À force d’atermoiement, les deux opérateurs se sont tournés vers le transport routier, avec pour conséquence +20.000 camions sur les autoroutes de France.

♦ Une liquidation non assumée du fret ?

Un cheminot retraité présent interroge le représentant de la direction : « Qu’est-ce que vous faites pour développer le rail ? Pour développer le transport fret ? Comment se fait-il que tout le transport se fasse aujourd’hui par camion ? ».

Le dirigeant de répondre que « le marché nous dit que sur ce type de marchandises, on est plus sur une technique de combiné ». Celle qui consiste à transborder le camion complet sans nécessité de le décharger pour le charger à nouveau dans les wagons. Stéphane Derlincourt d’ajouter : « Oui, notre métier est de proposer à nos clients des offres de transport ferroviaire. Mais, on s’aperçoit que les volumes de transport entre un point A et un point B sont moins importants qu’auparavant ». Les clients feraient également remonter une problématique selon laquelle ils ne seraient plus en capacité de remplir les trains complets. Ce à quoi la SNCF souhaiterait répondre par des logiques de trains mixtes. Des trains qui transporteraient autre choses que de fruits et légumes du fameux point A au fameux point B.

Là encore, un cheminot s’interroge : « Comment sera-t-il possible de développer l’une ou l’autre de ces possibilités, alors que nous n’avons plus de commerciaux ? Comment faire pour aller chercher des clients ? Et quelle est la politique commerciale actuelle ? ». Pour les cheminots présents, l’équation est simple. Soit il y a une volonté politique d’aller chercher des clients pour permettre à cette ligne de se développer, soit il y a une volonté d’abandonner les trafics.

♦ Depuis 2016, la CGT tire la sonnette du train 

Charlotte rappelle que depuis l’abandon de l’avant-dernière rotation quotidienne, le syndicat n’a cessé d’alerter les acteurs du dossier et les pouvoirs publics sur la fin annoncée de cette ligne ferroviaire.

La question du délai est prégnante concernant ce dossier. En effet, le dirigeant de répondre qu’il fallait mettre en place des offres commerciales adaptées pour répondre au changement du marché. En admettant que cela soit une réalité, l’offre commerciale nécessite-t-elle plus de 3 ans pour être adaptée ? Ou ce délai est-il seulement une volonté de laisser filer les clients vers la route, pour ensuite répondre qu’il n’y a plus de clients pour mettre leurs marchandises dans les trains ?

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Maïté Torres