Article mis à jour le 6 mars 2024 à 22:08
Mercredi 6 mars 2024, le collectif Viure s’est réuni à Perpignan, en présence de ses associations membres. Autour de la table, les écologistes livrent leur analyse de l’enquête publique portant sur le projet d’aménagement du territoire pour les 15 prochaines années. Au cœur du débat, la gestion de l’eau, la construction de 34.500 logements, des projets de parcs à thème et la déferlante agrivoltaïque dans les Pyrénées-Orientales…
Ce document d’urbanisme de plusieurs centaines de pages va engager le territoire sur la prochaine décennie. Depuis le 5 février et jusqu’au 13 mars 2024, les habitants des Pyrénées-Orientales sont invités à formuler leurs observations sur l’aménagement du territoire. « Actuellement, nous en sommes à 170 observations d’associations et de citoyens sur ce SCoT (Schéma de cohérence territoriale) », estime Valentine Lescot, coordinatrice du collectif Viure. Selon l’écologiste, un certain consensus se dégage. « En premier lieu, il y a une atteinte au paysage. Les habitants des Pyrénées-Orientales sont vraiment très émus par la destruction des espaces naturels en cours. Ils sont aussi très inquiets de la sécheresse et du devenir de ce territoire. »
« À Laroque-des-Albères, on regarde mourir nos arbres »
Pour Jaume Vilanova, représentant de l’association Alternatiba 66, la crédibilité de ce SCoT est largement compromise dans le parti pris des prévisions retenues. L’association conteste pleinement les conclusions et la façon dont a été abordée la partie aménagement et urbanisme du schéma de cohérence territoriale. C’est à partir de l’évaluation d’accroissement de la population qu’est déduit le besoin en logements. « Alors que le dernier recensement de l’INSEE évalue le taux d’accroissement de la population à 0,3% sur 15 ans, le SCoT, lui, se fixe sur une base de 0,7% », prévient Jaume Vilanova. Un aspect qui, selon l’écologiste, permet de gonfler les données relatives au renouvellement des parcs immobiliers.
Près de 18 grands projets d’équipements ont été identifiés par les écologistes, dans le cadre de ce SCoT. Quatre en particulier font l’objet d’une forte contestation. Il s’agit de la construction du Golf de Villeneuve-de-la-raho, du parc aqualudique du Mas Delfau, du parc d’attractions consacré au cinéma et aux jeux vidéos, prévu au mas Bresson à Perpignan et enfin, du grand circuit automobile de Rivesaltes. « On arrive au total à 350 hectares constructibles », précise l’écologiste qui dénonce une offre commerciale démesurée au regard de l’agglomération.
« Autant de constructions dans une région qui est en train de mourir de sécheresse et où les agriculteurs sont en détresse », dénonce Magali Diéné, porte-parole du collectif Sauvegarde Environnement Rocatin. « À Laroque-des-Albères, on demande aux habitants de ne pas arroser leur potager alors qu’ils disposent de canaux. On regarde mourir nos arbres. Et à côté de cela, il y a de grands projets de construction qui sont consommateurs d’eau et de matériaux. »
L’eau dans les Pyrénées-Orientales : une ressource qui devient rare
En Espagne, dans la ville de Rosas, on prévoit de couper l’eau au robinet cet été. Un scénario catastrophe qui pourrait s’étendre de ce côté-ci de la frontière. Le grand sujet politique dans les Pyrénées-Orientales reste la gestion de l’eau, une ressource qui devient rare dans le département. Dans les cartons, un grand projet porté par Perpignan Méditerranée Métropole : l’extraction de 3 millions de mètres cubes d’eau, prélevés dans le karst des Corbières. Une nouvelle usine de traitement, couplée à un système de stockage et de distribution de l’eau, destinée à brancher cette source des Corbières à plusieurs communes en aval de l’Agly, jusqu’au réseau d’alimentation du nord de Perpignan.
Le collectif Agly En Transition dénonce ce « pompage » : « Le karst maintenant, on le connait bien. Avant, on pensait que c’était une grande mer d’eau douce. On s’aperçoit aujourd’hui qu’en fait, c’est plutôt un tonneau percé », lâche le porte-parole de l’association. « Le karst se vide à vitesse grand V. Donc vouloir percer au niveau de Cases-de-Pène pour choper des millions de mètres cubes, c‘est hypothétique. Ce ne sera jamais suffisant pour Perpignan », avance-t-il.
Une situation dramatique, surtout quand on sait que les nappes phréatiques ont déjà commencé à se saliniser. Selon les écologistes, le biseau de mer est déjà là. « La mer est en train de rentrer dans les nappes souterraines à Torreilles, au Barcarès, à Saint-Cyprien, Elne ou Latour-bas-Elne. Cet été, leurs arbres sont morts, non pas à cause de la chaleur, mais à cause du sel qui est dans les racines. »
Le SCoT prévoit d’autoriser le photovoltaïque dans les Pyrénées-Orientales
La loi Climat et Résilience fixe à 2050 la fin de l’artificialisation des espaces agricoles, forestiers et naturels. Alors que le SCoT prévoit d’autoriser le photovoltaïque dans plusieurs zones du département, la « forêt métallique » pourrait se répandre jusqu’à Fourques. En effet, la société Sun Agri a pour projet d’y installer une centrale photovoltaïque sur les terres agricoles. Une situation que dénonce le collectif Sauvegarde des Aspres : « Nous avons des terres et des vignes que nous mettons en fermage. Nous nous sommes rendu compte qu’au jour d’aujourd’hui, un système assez juteux a été mis en place. Sur ces terrains agricoles, tout est arraché et à la place de la biodiversité, des structures métalliques, des ombrières et des panneaux solaires sont installés. »
« Nous ne sommes pas contre les panneaux solaires, bien évidemment. Si l’on peut les installer sur nos toitures et sur nos biens immobiliers, mais pas au-dessus d’une plante qui a besoin d’une photosynthèse pour pousser et se développer, c’est une hérésie. » Le porte-parole brandit le quotidien local. « 86 médailles ont été décernées au salon de l’agriculture pour nos vignes, mais de l’autre côté, Sun Agri nous dit qu’ils vont nous aider à produire plus de vin. Nous n’en avons pas besoin ! Cette région regorge de qualité. » Les militants appellent à un rassemblement devant le foyer rural de Fourques, le samedi 9 mars à 14h, pour dire non à l’agrivoltaïsme.
Le collectif écologiste Citoyens pour le Climat répond à vos questions
Le collectif Citoyens pour le Climat rassemble les opposants aux projets du SCoT. Les militants appellent chacun à participer à la concertation publique via ce lien. Pour plus d’informations, la page Facebook du collectif apporte plusieurs éclairages.
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