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Extinction Rebellion cible et bloque le cimentier Lafarge à Perpignan

Extinction Rebellion cible le cimentier Lafarge à Perpignan

Article mis à jour le 26 juin 2023 à 17:26

Au petit matin, ce vendredi 23 juin, une vingtaine d’activistes d’Extinction Rebellion bloquait l’entrée des camions venus remplir leur toupie auprès de l’usine de béton Lafarge de Perpignan. Une action de désobéissance civile qui s’est déroulée dans le calme et qui lance le début d’une fronde nationale «l’Eau rage gronde» pour dénoncer l’inaction des pouvoirs publics dans la lutte contre le dérèglement climatique.

À 5h45, plusieurs «rebelles» attendaient sous un pont d’avoir le «go» pour prendre rapidement position devant la grille du cimentier Lafarge installé au bord du fleuve Têt. Dès 6 heures, les militants et militantes ont sorti du coffre d’une voiture l’attirail complet pour tenir un siège devant l’usine qu’ils accusent de polluer l’eau et de contribuer à l’artificialisation des sols. Banderoles, chaînes, mais aussi café, gâteaux et protection solaire pour tenir au moins jusqu’en début d’après-midi. L’objectif étant de bloquer l’approvisionnement des camions. Cette action particulièrement forte intervient après plusieurs actes perpétrés ces derniers jours. Outre le blocage du cimentier, il s’agit aussi de marquer les esprits de tous à l’heure où le ministre de l’Intérieur choisit de hausser le ton et de dissoudre le collectif les Soulèvements de la Terre.

«Qui sème le béton aura bientôt la dalle» 

Thibaut, Mathilde, Grabuge ou Colibri (prénoms d’emprunts) sont assis en tailleur et forment une chaîne humaine pour empêcher les véhicules d’entrer ou sortir de l’usine de béton. Pour se donner du courage, ils répondent en chœur «Rebellion» quant Thibaut crie «Extinction».

Pourquoi cibler l’usine Lafarge de Perpignan ? Selon Extinction Rebellion, les cimentiers – et plus partiellement Lafarge – seraient à l’origine de la pollution des fleuves, des nappes… mais seraient aussi de gros consommateurs d’eau. «Nous faisons cette action symbolique sur un lieu symbolique du département.» En effet, l’usine en bord de rivière menacerait selon eux le principal forage d’eau potable pour les habitants de la cité catalane.

Dès qu’un véhicule s’avance pour pénétrer dans le site, une équipe de médiateur d’Extinction Rebellion est affecté au dialogue. Bien avant 7 heures, le premier employé de Lafarge s’avance dans sa Peugeot blanche et semble agacé à la vue du barrage. Le militant s’explique, «bonjour, on fait partie d’Extinction Rebellion». Dans sa voiture, l’employé dit comprendre l’action des activistes mais répond : «ça va pas le faire, j’ai beaucoup de boulot aujourd’hui.» Gentiment le «rebelle» répond, «notre action est symbolique et non violente.» L’employé de plaider la cause de son employeur, «justement, on travaille là-dessus pour que le béton soit plus écologique et plus vert. Ça fait plus d’un an que Lafarge mène une réflexion sur la consommation d’eau.»

Extinction Rebellion, la désobéissance civile pour défendre le vivant

Thibaut, 21 ans, est étudiant en production horticole. Anxieux du réchauffement climatique, il s’est engagé auprès du groupe Extinction Rebellion de Perpignan. Selon le jeune homme enchaîné au portail de l’usine de béton Lafarge, la culture régénératrice fait partie des principes du collectif extinction Rebellion. «Dans le groupe, nous apprenons à prendre soin de nous avant de prendre soin du monde. Par exemple, en ce moment on donne de l’eau et à manger aux bloqueurs. Nous devons cultiver ce volet régénérateur, car si on ne se sent pas bien, on ne peut pas tenir ce genre d’actions sur la durée.»

Plainte et incompréhension du côté du groupe Lafarge

Alors que les gendarmes attendaient que le responsable du site dépose plainte, le service de communication se disait dans l’incompréhension face à ces agissements. Pour le responsable communication, le groupe français a tenté de nouer le dialogue et explique que «cette unité de production de béton opérait avec les meilleurs standards de la profession.» Selon le message de Lafarge, le site de Saint-Estève fabrique «des produits bas carbone et à base de sable et de cailloux recyclés. Ces produits alimentent les chantiers de la région, ceux des particuliers mais aussi des chantiers d’utilité publique : logements sociaux, écoles… Notre premier souci reste la sécurité de ces personnes, il s’agit d’un site industriel dont l’accès nécessite une formation et des équipements de sécurité. Nous avons bien entendu déposé plainte auprès de la gendarmerie.»

Lafarge a également tenu à rajouter que le site est «particulièrement attentif à sa consommation d’eau qui est en réduction importante depuis plusieurs années. Elle applique une politique drastique d’économie et sa consommation d’eau est aujourd’hui bien en dessous des volumes autorisés par l’administration légitimement très vigilante sur ces questions.»

Selon le capitaine de gendarmerie dépêché sur place dès 7 heures du matin, aucune infraction ne pouvait être retenue. En effet, la seule infraction possible, après plainte du responsable de Lafarge, était celle d’occupation d’un espace privé.

«Éco béton, Éco-Terrorisme, Et, conneries»

Sébastien Bonafous, responsable de l’entreprise du même nom était également en colère. «Nous louons les camions avec chauffeur qui transportent le béton depuis l’usine Lafarge vers les chantiers de construction. Cette action retarde les chantiers, mais on les renvoie vers d’autres centrales pour qu’ils puissent faire leur journée. Cela engendre des coûts supplémentaires, mais ça n’empêchera pas le béton de se faire.» Quant au message diffusé par Extinction Rebellion, Stéphane Bonafous se dit interpellé par la question, mais déclare, «le jour où fera du béton entièrement bio, on sera content. Mais en attendant on fait avec ce que l’on a et ce qui existe. Comme on ne vit pas dans des maisons en paille ou en bois, on fait avec ça.»

Une jeune militante écoute sagement ce discours défaitiste du patron, mais n’en pense pas moins. «Évidemment qu’il y existe d’autres solutions ! Et notamment la rénovation des bâtiments». Le communiqué diffusé par le collectif fait état de 2.776 logements vacants (16%) à Perpignan. Idem à Argelès-sur-mer et Saint-Laurent-de-la-Salanque où respectivement 455 et 358 logements sont vacants. Le collectif cite l’Ademe qui estime que la construction de logements neufs utilise 80% de matériaux de plus que la rénovation, et réclame «une politique ambitieuse à l’échelle nationale facilitant la rénovation de logements neufs ou vacants.»

La dissolution des Soulèvements de la Terre galvanise les militants et militantes

Comme Thibault, ou Kalia, la dissolution des Soulèvements de la Terre décidée mercredi en Conseil des ministres est loin d’apaiser les consciences. Au contraire, les militants et militantes expriment désormais une plus grande colère par rapport à un discours politique jugé insincère. «Maintenant, je suis encore plus motivé, et j’ai une plus grande rage en moi pour défendre la nature et le vivant.» 

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