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Clotilde Ripoull – Les grands entretiens politiques des Municipales à Perpignan

Clotilde Ripoull interview 2020 campagne municipales Perpignan

Article mis à jour le 5 juillet 2023 à 10:39

Avant l’élection des 15 et 22 mars prochain, la rédaction a fait le choix de rencontrer un à un chacun des candidats. Ces entretiens seront publiés simultanément deux par deux. Nous avions choisi l’ordre alphabétique. Un choix sur lequel nous avons dû revenir faute de disponibilité de certains candidats. Vous pouvez retrouver, dans nos précédents articles, la présentation de Louis Aliot, Olivier Amiel, Alexandre Bolo, Caroline Forges, Romain Grau, Agnès Langevine, Jean-Marc Pujol, Clotilde Ripoull.

♦ Clotilde Ripoull, pourriez-vous nous rappeler votre parcours ?

Sur le plan professionnel, je suis agrégée d’économie et de gestion. J’ai été enseignante durant 20 ans, et depuis, je suis indépendante. Je dirige toujours l’Association Nationale des Élus d’Opposition (AELO). Depuis 2015, l’AELO a décroché son agrément pour faire de la formation auprès des élus. Nous avons dispensé plus de 300 formations en France et en Outre-mer. Je dirige une entreprise dans l’économie sociale et solidaire. Nous avons deux salariés et nous faisons intervenir une dizaine de formateurs.

Je m’occupe aussi de forêts dans l’Aveyron. Présidente du syndicat des forestiers privés de l’Aveyron, je suis aussi membre du conseil d’administration d’une coopérative Sylva Bois. Et je participe aussi à l’élaboration de manuels scolaires (Éditions Nathan) pour les élèves de première, terminale et BTS. Et puis, je préside toujours l’association Perpignan Équilibre que j’ai créée en 2014 [NDLR au lendemain des élections municipales].

J’ai démarré mon parcours politique en tant que simple militante en 1996 avec l’UDF. À l’époque du Parti Populaire pour la Démocratie Française (PPDF). L’UDF [NDLR parti centriste] était un conglomérat de petits partis.

Nous nous sommes installés à Perpignan en 2004. Mon engagement dans la vie municipale de Perpignan est né en 2007 avec le fameux 4e pont. Je me suis intéressée aux affaires de la commune à travers cette infrastructure routière. Dans le même temps, je me suis engagée dans la campagne présidentielle de François Bayrou. J’étais enthousiasmée par cette campagne que je trouvais différente, dynamique, avec un vrai projet et de vrais questionnements.

♦ Vous avez porté les couleurs du Modem pour les élections municipales de 2008

Quand François Bayrou a créé le modem, j’ai demandé l’investiture pour les élections municipales de 2008 à Perpignan. C’était ma première campagne en tant que tête de liste.

J’avais remporté la primaire de haute lutte face à Chantal Gombert. D’ailleurs, elle m’en veut toujours. Quand bien même elle est aujourd’hui maire adjointe de Jean-Marc Pujol. C’est ce qu’il y a de drôle dans la politique. Ces gens qui vous en veulent ; alors qu’on pourrait qualifier sa carrière de plus brillante que la mienne. Mais elle n’a jamais digéré ma victoire.

J’ai été élue à l’issue d’une alliance, j’ai fait 8,5%. Je suis arrivée 5e après Jean-Paul Alduy, Jacqueline Amiel-Donat, Jean Codognés et Louis Aliot. Mon objectif déjà à l’époque était très clair ; je souhaitais l’alternance pour Perpignan. J’avais même créé bien en amont, avec Nicolas Caudeville, un blog qui s’appelait « Objectif Alternance. Pour moi, la démocratie doit permettre des temps de respiration avec notamment des alternances.

Entre les deux tours, j’ai fait une alliance avec la liste socialiste conduite par Jacqueline Amiel-Dont et celle divers gauche de Jean Codognés. Nous avons été élus dans l’opposition au conseil municipal de Perpignan.

Puis il y a eu l’épisode des chaussettes* et l’élection partielle. J’ai été réélue en 2009 et donc élue d’opposition entre 2008 et 2014.

J’ai quitté le Modem pare que je reste convaincue que l’investissement municipal est le seul lieu où l’on doit s’extraire de cette logique de parti. Et pouvoir ainsi mener une politique municipale libre et indépendante. Une politique dans le sens de l’intérêt général et qui se fait en rassemblant un maximum de personnes autour de soi.

J’en avais assez d’être mise en contradiction entre ce que je faisais sur le terrain et ce que promettait le Modem. Dans ma vie locale, je devais aussi me justifier d’initiatives que j’avais ou que je n’avais pas. Je trouve le fonctionnement des partis politiques peu compatibles avec l’investissement local. Et d’ailleurs, en France, la majorité des communes sont dirigées par des élus sans étiquette et ça n’est pas plus mal !

♦ Il y a aussi eu l’épisode avec le parti Convergence démocratique de Catalogne ?

Oui, en 2010. Jordi Vera du CDC m’avait proposé de faire un groupe centriste catalan au sein du Conseil municipal. La démarche d’alliance et celle du transfrontalier me paraissaient, et me paraissent toujours, intéressantes. Et puis ce n’est pas un parti national, il s’agissait bien de défendre des intérêts locaux dans une stratégie d’opposition. Cet épisode m’a permis de tisser des liens en Catalogne. J’ai notamment rencontré Carles Puigdemont, ancien président de la Généralitat, à l’époque maire de Gérone.

Cela m’a aussi incité à apprendre le catalan car pour moi cette ouverture vers le sud me semble très importante. C’est là que je me suis aperçue que l’enseignement du catalan à Perpignan n’est pas adapté. Autant en termes d’horaires que de contenu. C’est bien gentil d’apprendre les couleurs, le nom des fruits et des légumes. Mais j’avais envie de pouvoir comprendre un article de la presse locale ou pouvoir échanger avec les entrepreneurs.

♦ Clotilde Ripoull, avez-vous sollicité l’investiture En Marche pour les législatives de 2017 ?

Non pas du tout ! Je ne vous ai jamais dit cela. Quand j’ai vu émerger la démarche de Monsieur Macron, j’ai cru retrouver la même démarche qui avait été la mienne en 2014. Mais ça, c’était la version Macron avant 2017 ! On voit l’évolution aujourd’hui… On assiste vraiment à de la politique version très ancien monde.

Quand Emmanuel Macron a émergé, il nous a promis une rénovation de la vie publique. C’était affiché en tant que tel sur son programme. Quand on voit aujourd’hui le résultat, la rénovation n’est pas vraiment au rendez-vous de La République En Marche (LaRem).

LaREM devait être horizontale, c’est hyper vertical. Ça devait être transparent, c’est très opaque. Et les législatives de 2017 ont été un bel exemple ! Idem pour les investitures pour les municipales…

♦ Que pensez-vous du fonctionnement des partis et de leur importance ?

Le fonctionnement des partis n’a pas beaucoup changé. Au contraire, c’est encore plus verrouillé. Parce que notre démocratie s’est rigidifiée. Faire de la politique en dehors des partis est très compliqué ! Vous êtes de fait exclus de nombre d’élections, comme les Européennes ou les Régionales, et pour les municipales. Ça devient compliqué.

Dans une grande ville comme Perpignan, quand vous voyez qu’une partie du système médiatique ignore systématiquement les candidats qui n’ont pas d’étiquette. Tout simplement parce que ça ne rentre pas dans leurs radars… Ils ne voient la politique qu’à travers les étiquettes.

Je parle des médias parisiens et nationaux. Ils vont parler d’un candidat en rupture de ban d’un parti politique, et pas de moi, parce que je n’ai pas d’étiquette ! Alors que j’étais à 80 voix du second tour lors de la dernière élection… Si je regarde objectivement les choses, personne ne peut exclure que je sois au second tour des prochaines municipales ! Quant au débat prévu à Montpellier avec seulement 4 candidats, c’est le paroxysme de ce type de comportements !

♦ Clotilde Ripoull, pourquoi pensez-vous que cette campagne sera la bonne ?

Je crois qu’il y a plusieurs paramètres à prendre en compte. En 2014, par exemple, j’ai fait une erreur d’analyse. J’ai vraiment pris conscience de la différence qu’implique de se présenter sur son propre nom, sans étiquette. Je croyais naïvement que tout le monde connaissait mon nom parce que j’avais été dans l’opposition depuis 2008.

Alors qu’en fait en 2014, je suis partie de zéro. La notoriété ne se construit pas du jour au lendemain, à l’inverse d’une étiquette inscrite dans le paysage politique depuis toujours. En 2008, quand je me suis présentée, j’étais portée par l’image du Modem.

Aujourd’hui, j’ai beaucoup travaillé sur le terrain. Et cette notoriété, je l’ai acquise. On peut douter de beaucoup de choses dans les sondages. Mais quand on classe les personnalités par leur notoriété, je suis au même niveau que la présidente de la Région Carole Delga. Ce n’est pas négligeable ! Et c’est plus commode de partir à une élection quand on est un peu connue.

Après, je crois que nous sommes en plein chamboulement politique.

L’arrivée de LaREM dans le paysage a tout bousculé. Nous n’avons plus le duel gauche/droite, et on ne sait pas comment vont se fixer les nouveaux équilibres politiques. Nous ne pouvons pas savoir comment LaREM va capitaliser ce qu’il se passe au niveau national.

Tout cela créé de la confusion ! Et au milieu de tout ce flou, je suis un élément de stabilité pour l’électorat. Ils connaissent mon parcours et les gens m’identifient dans le paysage politique. Même si je représente un changement, je fais de la politique depuis 12 ans. Et il y a une constance dans mes prises de position et dans ce que je fais. J’ai toujours dit que Perpignan était ma priorité, et je fais ce que je dis !

Donc je pense qu’on va franchir une marche. Je suis arrivée 5e la première fois, 4e la 2e, je pense être en capacité d’être 3e cette fois-ci.

♦ Est-ce la raison pour laquelle vous n’avez pas fait de liste commune avec Romain Grau malgré les nombreuses incitations ?

Aujourd’hui, il faut savoir ce que l’on veut pour Perpignan. Et moi, je veux jouer un rôle dans la revitalisation de Perpignan. Ma seule réflexion est par rapport aux Perpignanais. Ce que j’entends, ce sont des gens mécontents, ils ont envie de changement. Ils ont des problématiques très concrètes. Et j’ai envie d’y répondre, et je vais choisir la meilleure stratégie pour y parvenir.

Vous savez, je serai au second tour ! Et je ne fais pas partie de ces candidats qui vous expliquent que, s’ils ne sont pas placés comme-ci ou comme ça, ils vont se retirer. LaREM a clairement expliqué que si Romain Grau n’était pas second, il devait se retirer. Je crois que ces décisions ne doivent pas être prises par les partis.

Nous, nous faisons une proposition à l’électorat et l’objectif est de gagner. Et on peut gagner dans des configurations très diverses.

Je suis persuadée d’une chose, les Perpignanais veulent du changement. Ils ne veulent plus de l’équipe en place. Et je pense qu’il faut proposer une troisième alternative aux Perpignanais que ce duel annoncé entre Jean-Marc Pujol et Louis Aliot.

Si on veut éviter que cette ville ne bascule au Rassemblement National, nous devons être en capacité d’apporter aux Perpignanais une offre alternative. De toute façon, il y aura une triangulaire à Perpignan et gagnera celui qui sera en capacité de représenter une véritable offre de changement crédible, intéressante, cohérente.

♦ Si vous accédez au second tour des Municipales, allez-vous changer votre liste durant l’entre-deux tours ?

Je pense qu’il faudra rassembler à un moment ou un autre, et plus largement que son camp. Dans cette campagne, tous mes coéquipiers et moi-même savons qu’il faudra rassembler plus largement, pour aller au-delà de ce que l’on représente seuls. Concrètement le rassemblement se fait autour d’un projet, avec des gens, autour d’une dynamique et sur une proposition positive pour les Perpignanais. C’est parce qu’on parviendra à capter leur attention autour d’un rassemblement large que l’on gagnera. Si on parle du grand méchant loup, ça ne marchera pas.

Je n’ai aucun problème à travailler avec tout le monde à partir du moment où on est d’accord sur le contenu ; sur le projet, sur la dynamique, sur les objectifs. Les seuls que je ne recycle pas, ce sont ceux qui ont passé, à un moment ou à un autre, la ligne du RN. Ce n’est pas une question de personnes, mais plus une question d’éthique. Un parti d’extrême droite n’est pas un parti comme les autres. Je n’ai pas les mêmes valeurs que le RN, avec ou sans étiquette.

Mais l’idée du barrage pour empêcher l’élection du RN est la plus mauvaise idée qui soit. Les gens en ont assez du barrage, ils ne veulent plus cela. Mais ils votent pour un projet, pour une cohérence, pour une équipe, pour des compétences.

♦ Comment vous perçoit le monde économique ?

J’ai eu des soucis basés sur mes combats par rapport aux grandes surfaces. À partir de ce combat, les acteurs du monde économique m’ont reproché d’être « contre tout ». Mais c’est un résumé un peu facile ! Je serais contre tout parce que j’ai des positions très fermes sur ces dossiers-là ? Et que je les ai menés jusqu’au bout ? Y compris jusqu’à l’obtention d’un certain nombre de victoires avec Perpignan Équilibre.

En 2014, au débat organisé par un syndicat patronal, nombreux sont venus me féliciter pour ma prestation et ma connaissance des dossiers. Mais, ils m’ont aussi dit qu’ils ne voteraient pas pour moi, parce qu’ils ne faisaient pas un choix de compétence. Et je déplore que le monde économique ait fait ce choix, en allant vers le pouvoir plutôt que vers la compétence.

Car j’entends dans beaucoup de réunions des gens se plaindre de tout ce qui n’est pas fait. Aujourd’hui, je leur dis que, s’ils veulent de la volonté politique, ils doivent choisir quelqu’un qui a la volonté et la capacité d’agir. S’ils veulent que ça change, il faut qu’ils arrêtent de soutenir ceux qui font que rien ne change !

♦ Vous proposez 100 mesures, mais avez-vous un axe, une vision pour Perpignan ?

Il y a 2 niveaux dans notre approche. La première est de rendre Perpignan aux Perpignanais. Parce qu’on a le sentiment quand on se promène que les gens ne se sentent plus écoutés. C’est un sentiment général, ils ont des problèmes au quotidien et parfois importants.

Nous nous sommes partis du terrain ; et notre point de départ a été notre enquête. Nous sentions un réel besoin d’attention, et du reste, nous avons eu beaucoup de retours. De cette consultation, a émergé un certain nombre de problématiques. Et nous avons aussi nourri notre réflexion grâce à des réunions thématiques avec des experts.

En parallèle, notre constat est que Perpignan n’est plus une capitale dans la Région Occitanie. On peut reprocher beaucoup de choses à Jean-Paul Alduy, mais il avait donné une dimension régionale à Perpignan. Une place dans l’organisation de notre pays. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Perpignan est noyée dans la grande région, elle n’est plus attractive, y compris localement.

Les classes moyennes, les retraités aisés préfèrent Cabestany, Saint-Estève ou Bompas. Parce que Perpignan n’apporte plus ce que doit apporter une ville. La sécurité, la dynamique économique, le rayonnement, une éducation, une formation. Aujourd’hui, on ne sait plus qu’elle est la plus-value de Perpignan.

Vous avez de nombreux Perpignanais pris au piège de leur quartier parce que leur bien immobilier a perdu toute leur valeur. Ils sont otage de la ville, et ce n’est pas admissible ! Nous voulons donner une attractivité, une dynamique et un rôle de capitale régionale à Perpignan. Lui donner une trajectoire à la hauteur de ce qu’elle est en droit d’exiger.

♦ Que pouvez-vous faire pour Perpignan sans l’appui d’un parti ?

Sur un certain nombre de sujets, sans parti et toute seule à Perpignan, j’ai agi. Le dernier épisode en date est celui de l’hélicoptère pour l’hôpital de Perpignan. J’ai écrit à la ministre, elle m’a répondu et tout ça contribue à attirer l’attention de pouvoirs publics.

Dans le cas de l’hélicoptère, ça va fonctionner parce que je n’en ai pas fait un combat politique. Contrairement au train des primeurs… Là ce n’est pas Madame Buzin contre la CGT qui est de mèche avec l’extrême gauche. Je ne fais pas de la politique, je ne suis pas dans le rapport de force avec LaREM. Quand je gagne, c’est l’intérêt général qui gagne et non pas un adversaire politique.

Comme je ne suis pas dans un parti, je ne mets pas la Ministre en porte-à-faux par rapport à une politique menée par son gouvernement.

Dans le cas du train primeur, on a un ensemble de partis et de syndicats qui se battent les uns contre les autres. Et ils font payer les déboires qu’ils ont dans le dossier de la SNCF ou celui des retraites, etc… Résultat, comme personne ne veut faire gagner l’autre, c’est l’intérêt général qui perd.

Moi je veux travailler pour l’intérêt général des Perpignanais, Je ne suis pas là pour faire gagner tel ou tel parti politique.

Dans le cas de l’îlot du Puig de Saint-Jacques, il faudra nommer un Monsieur Saint-Jacques. Il s’agit d’une personnalité extérieure au monde politique, un spécialiste du patrimoine sans attaches partisanes. Il sera en capacité de mettre autour de la table tous les acteurs pour sortir de cette situation de précarité sociale, tout en tenant compte des contraintes d’un secteur sauvegardé.

Emmanuel Macron a bien nommé Stéphane Bern Monsieur patrimoine. Il est libre de dire ce qui ne va pas. Moi, j’ai déjà mon Monsieur Saint Jacques qui aura des objectifs et des moyens pour sortir de cette situation le plus vite possible !

*L’épisode de la fraude à la chaussette : Lors du dépouillement du second tour de l’élection municipale de 2008, le président du bureau N°4 est surpris en possession de bulletins de vote au nom de Jean-Paul Alduy, cachés dans ses chaussettes. Les élus d’opposition contestent l’élection de Jean-Paul Alduy, et le tribunal administratif de Montpellier invalide l’élection en octobre 2008. Le maire sortant sera à nouveau élu à l’issue du nouveau scrutin de juin 2009.

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