Article mis à jour le 3 novembre 2023 à 17:16
Manon Billaut a pris ses fonctions de directrice de l’Institut Jean Vigo au début du mois de septembre dernier. La nouvelle arrivée défend une programmation enrichie de rencontres et débats autour des films de la collection, et souhaite attirer de nouveaux publics à l’Arsenal.
« S’attaquer à d’autres collections »
Ce qui a motivé Manon Billaut à rejoindre la tête de la cinémathèque de Perpignan, c’est d’abord l’envie d’explorer un autre territoire, et de « s’attaquer à d’autres collections ». La jeune femme de trente-quatre ans travaillait depuis six ans au sein de la fondation Jérôme Seydoux Pathé à Paris quand l’opportunité de rejoindre l’Institut Jean-Vigo s’est présentée.
« Ça m’intéressait de changer de type de structure. Ce que je trouve intéressant à Perpignan, c’est l’attrait de la région Occitanie, le fait que ce soit une plus petite ville avec d’autres problématiques, d’autres publics, d’autres besoins et préoccupations. C’est une des plus importantes cinémathèques de France, elle mérite de rayonner davantage.»
L’ambition de cette historienne du cinéma, qui a fait une thèse sur André Antoine (homme de théâtre et metteur en scène du cinéma muet), est de revaloriser la riche collection dont dispose l’Institut Jean Vigo (notamment 8000 films et 70 000 affiches). « Les collections sont très variées, il y a du film amateur, du film d’exploitation courante, des documents de tournage, des scénarios, des affiches… L’idée c’est de créer des axes, trouver un sens qui résonne avec des préoccupations actuelles pour mettre en valeur une partie de la collection ».
Les équipes ont donc choisi un fil conducteur pendant l’année autour des scénarios du Fonds Max Douy, avec une exposition des scénarios et story-board, une présentation de film en 35mm, « pour montrer qu’on ne conserve pas que des films, voir comment on peut réfléchir autour du scénario, et ça pourra donner lieu par la suite à des publications. L’idée c’est de créer un dynamisme autour de ces archives.»
Autre volonté de la nouvelle directrice : attirer de nouveaux publics, qui ne vivent pas forcément dans le centre-ville de Perpignan
Et pour cela, Manon Billaut croit à l’importance de soigner « l’avant et l’après séance. On sait qu’aller au cinéma ça coûte cher. On essaye d’avoir un prix attractif (6€ la séance en tarif plein, 95€ pour l’abonnement à l’année, ndlr) et d’enrichir les séances de débats. Montrer qu’être dans une salle de cinéma c’est autre chose que de voir un film chez soi. Notre singularité c’est d’avoir un accompagnement différent, des invités extérieurs, et projeter de la matière unique avec les films en 35mm. »
Montrer aussi aux plus jeunes générations que « la production actuelle résonne avec celle du passé. La série existait dans les années 1920, la 3D a été utilisée par Méliès et les frères Lumière». La directrice espère aussi pouvoir à terme améliorer l’espace d’accueil du public au sein de l’Arsenal, et rendre la cinémathèque plus visible. « Il y a aussi un enjeu politique à bien faire tourner cette cinémathèque dans le territoire : redorer l’image du quartier, attirer de nouvelles personnes vers l’Arsenal, faire se mélanger les publics, ça a un sens. »
Tous ces projets se réalisent dans un contexte global d’érosion des subventions dans le monde culturel et de forte concurrence. Manon Billaut veut faire de ces contraintes financières une opportunité pour changer la manière de proposer des rendez-vous au public « Il faut qu’on arrive à créer un besoin et une envie chez les gens, et que donc nos événements répondent à ce besoin. Faire moins mais mieux. Il y a aussi une dimension écologique à prendre en compte. Allumer une salle de projection, faire tourner un projecteur, passer un film en numérique, conserver un film, ce n’est pas anodin. »