Article mis à jour le 11 juillet 2023 à 10:07
De la journée du 21 novembre – avec les initiatives virtuelles du collectif #NousToutes – à la journée internationale du 25 novembre pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, en passant par la marche militante de la chorale féministe et antifasciste ; retour sur les actions et rassemblements à Perpignan.
Funeste rappel, en France, 152 femmes sont tombées sous les coups de leur conjoint ou leur ex-conjoint en 2019 ; dont 17 en Occitanie, et 5 pour notre seul département des Pyrénées-Orientales. Depuis début 2020, on dénombre déjà 87 fémicides en France.
♦ Armées de chansons, les femmes se réapproprient l’espace public perpignanais
Des rues vides, littéralement froides, voire glauques en ces temps de confinement. Pourtant, muni de pancartes, un groupe de femmes bat le pavé ce mardi soir. Elles viennent de collectifs et d’associations variés, comme la Jove Moviment Feminista Perpinyà par exemple, mais se retrouvent régulièrement pour former une chorale militante. Le petit cortège est parti de la place Gambetta, en passant par l’Hôtel de ville, et à destination des quartiers de Saint-Jacques et Saint-Mathieu.
Parmi les revendications scandées par la vingtaine de participantes : la réappropriation de l’espace publique, pour les femmes, et la lutte antifasciste.
Si la manifestation n’a pas été déclarée, le groupe s’y est préparé dans la bonne humeur et la complicité. Cette dynamique féministe et antifasciste est née cet été suite à l’élection du nouveau maire Rassemblement National Louis Aliot. Sa devise « faire barrière à l’extrême droite, et aux oppressions quotidiennes, dont peuvent être victimes les femmes ». En guise d’arc, une chorale. Mardi soir, les flèches décochées s’intitulent « Je suis fille », « Cancion sin Miedo », « Cant de Lluita », « Noi siamo stufe », « Keçe Kurdan », ou encore « L’hymne des femmes ».
♦ Le cortège, exclusivement féminin pour l’occasion, et tout de noir vêtu, fait des pauses pour chanter en cercle.
Les femmes présentes sont de générations et d’horizons divers. Annie, enseignante du troisième âge et militante féministe de la première heure, se confie entre deux chants . « Pour une femme seule, c’est dur de se balader dans les rues la nuit ».
Originaire de Bretagne, Annie a lutté avec le Mouvement de Libération des Femmes, créé à Paris en 1970. Ce mouvement a longtemps fait figure de pionnier, notamment de par son organisation interne, et inspire les Perpignanaises. Alice présente à la marche nocturne détaille « les membres du Collectif proposent des initiatives à tour de rôle. On se gère. C’est un groupe monté officieusement« .
Cécile, la trentaine, évoque le dress code noir qui « rappelle les sorcières. Ces femmes représentaient la liberté« . Comme ces femmes prétendument démoniaques, la ronde en chanson dérange la sérénité d’un certain voisinage. Sur les dernières chansons, les militantes choristes esquivent un œuf. À moins que celui-ci ait été une offrande destinée à prédire l’avenir.
Jove Moviment Feminista Perpinyà est très actif sur les réseaux sociaux ; et plus spécifiquement sur Facebook. Le groupe appelle les internautes à la contribution artistique. Les informations internationales et locales y sont relayées ; comme l’actualité en Pologne ou l’appel au rassemblement du 25 novembre place de la Victoire.
♦ Une place de la Victoire rebaptisée « Place des 145 victimes de féminicides en 2019 »
Mercredi 25 novembre, à la nuit tombée devant le Castillet, confinées entre la grande roue et les attractions de Noël, quelques centaines de femmes et hommes se sont donnés rendez-vous. Différents drapeaux de partis politiques de gauche, syndicats, et associations locales flottent dans l’air frais.
La majorité des présents sont réunis à l’appel de Droits des Femmes 66 : « Un collectif féministe d’associations (APEX / ASTI / ATTAC / Femmes Solidaires / LDH / MRAP / MFPF / LGBT / Idemgenre), partis (EELV / NPA / PCF / PG) et syndicats (FSU / Solidaires / CGT / CNT)« .
Karine Tartas, représentante de la CGT au sein de Droits des Femmes 66, se veut rassurante sur la question de conflits politiques et idéologiques, au sein de ce mélange des forces : « Les oppositions sont oubliées pour plancher sur cet enjeu social et sociétal. On se retrouve chaque mois et suivons une charte commune« .
La syndicaliste alarme notamment sur la dangerosité que peut représenter le lieu de travail : « Nous savons tous qu’une femme victime pourra toujours y être retrouvée par son agresseur. C’est une énorme problématique. Nous nous devons de protéger les travailleuses dans ce sens-là« .
♦ Le cortège s’élance jusqu’à la place Arago
En route, Nadine et Marie, amies sexagénaires habituées du rendez-vous, se confient : « Le chiffre des victimes augmente chaque année. Il faut dire que les femmes n’hésitent plus à révéler les souffrances qu’elles subissent au sein de leur famille. Les soutiens extérieurs aujourd’hui sont multiples, heureusement ; mais on est loin de certains pays : c’est encore aux femmes de quitter le domicile. »
« Dans notre jeunesse, nous avions un sentiment de progrès au sujet de cette lutte sociale. Or, aujourd’hui, on a un sentiment de régression. Nous restons des subalternes. Regardez en particulier le monde professionnel ».
« Rappelons-nous le premier confinement : les femmes étaient en première ligne, dans les services de première nécessité, et au bénéfice du lien social« .
Nadine et Marie
« En voyant aujourd’hui ces jeunes, ces vieux, femmes et hommes, j’en ai des frissons » partage, émue, Sylvie, la quarantaine et impliquée au quotidien dans des milieux associatifs variés. Nous colmatons certaines brèches et carences de l’État. Cet événement extériorise les blessures. On peut se rendre compte qu’on n’est pas seul, isolé, à lutter. C’est une problématique qui rassemble« .
La manifestation se dissipe devant le tribunal ; non sans quelques chants internationaux, des vocalises de la chorale féministe et antifasciste, et des prises de parole; notamment autour de l’impact des confinements successifs.
♦ La cause des femmes soutenue par tous les bords politiques
L’antenne locale du Parti communiste français appelait à rejoindre la manifestation ; et réclamait, à l’instar de nombreuses associations et collectifs féministes, « 1 milliard pour lutter contre les violences faites aux femmes » et une « loi-cadre sur les violences qui rassemblerait l’ensemble des problématiques dont le travail éducatif de prévention et d’accompagnement ».
Dans un communiqué de presse, la Mairie de Perpignan apportait son soutien à la journée internationale des violences faites aux femmes. La mairie souligne également son aide à l’association Soroptimist et sa participation à l’action « Orangez le monde » ; une opération lancée en 2015 par ONU Femmes.
La présidente socialiste d’Occitanie rappelait quant à elle l’action de la Région dans la lutte contre les stéréotypes de genre. « En cette journée de mobilisation internationale, je réaffirme mon engagement pour l’élimination des violences à l’égard des femmes. Inscrite dans la durée mais aussi sur tous les territoires, cette volonté guide notre projet régional, en particulier en direction de la jeunesse avec des actions concrètes, à l’image de notre programme « Génération égalité ». La situation est alarmante, il est plus que jamais nécessaire d’agir ! ».
Que sais-je sur les violences sexistes et sexuelles faites aux femmes ?
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