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Entre sécheresse et tensions agricoles, les premiers bras de fer juridiques

Entre sécheresse et tensions agricoles, les premiers bras de fer juridiques

Article mis à jour le 26 janvier 2023 à 16:48

Réchauffement climatique oblige, l’eau devient bel et bien de l’or bleu. C’est une réalité actuelle. Et les Pyrénées-Orientales sont en première ligne face à une sécheresse historique. Été comme hiver, les restrictions sont toujours là. Et pour la première fois, la question s’attarde dans les instances judiciaires sur un différend entre la préfecture de Perpignan, France Nature Environnement et des agriculteurs réunis en syndicats. Ces derniers appellent à la manifestation ce mardi 24 janvier ; le rendez-vous est à 9 heures 30 au parc des expositions pour un cortège vers la préfecture.

« En droit, les prélèvements d’eau ne doivent pas remettre en cause les écosystèmes »

Le Tribunal administratif de Montpellier a donné raison à l’association France Nature Environnement le 29 novembre 2022. L’histoire remonte à 2017, lorsque Philippe Vignes, alors préfet de Perpignan, autorise les agriculteurs à prélever davantage d’eau dans le Têt. Le bureau Languedoc-Roussillon de l’Association conteste et obtient gain de cause ; une décision des juges qui s’appuie sur une étude l’Agence de l’Eau.

Son argumentaire : «La Têt, plus long fleuve du département des Pyrénées-Orientales, abrite plusieurs espèces emblématiques de poissons, telles que la Truite Fario, ou le Barbeau Méridional. Pour vivre, ces poissons ont besoin d’une quantité d’oxygène minimale, et d’une température maximale qui n’est permise que lorsque le débit du fleuve est suffisant. En deçà de ces limites, le risque de mortalité s’accroît rapidement. Depuis 2010, le bassin versant de la Têt est identifié comme étant en déséquilibre quantitatif, car les prélèvements d’eau sont trop importants pour garantir un fonctionnement satisfaisant des écosystèmes.»

Et France Nature Environnement, se félicitant de sa victoire au Tribunal, de rappeler : «En droit français, les prélèvements d’eau pour les usages humains ne doivent pas remettre en cause le fonctionnement des écosystèmes aquatiques.»

Sécheresse et tensions agricoles : les premiers bras de fer juridiques

Vers un débit minimum doublé pour pouvoir faire des prélèvements agricoles ?

Dans son verdict du 29 novembre 2022, concernant ces dérogations préfectorales de 2017, le Tribunal de Montpellier estime que le débit minimal du fleuve n’est pas respecté. Depuis 2017, la préfecture a fixé un seuil minimal à 600 litres/seconde pour pouvoir faire des prélèvements agricoles. Le Tribunal demande à le relever à 1500 litres/seconde, dès ce printemps, et après s’être basé sur une étude de la Têt réalisée entre 2009 et 2012 par l’État.

Fabienne Bonnet, présidente de la Chambre d’Agriculture 66, qualifie de dogmatique la décision du Tribunal; dans un article de Radio France. D’après elle, 6000 hectares de fruits et légumes seraient menacés, et 1500 agriculteurs seraient impactés.

Une goutte de trop dans les tensions liées aux irrigations et à la rareté de l’eau ? La Maison des Vignerons, les Jeunes Agriculteurs 66 et la Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants des Pyrénées-Orientales appellent à la mobilisation générale ce mardi 24 janvier.

Un cortège doit partir à 9 heures 30 du palais des expositions de Perpignan, pour rejoindre la préfecture. Le slogan ? «Eau secours : la ruralité sacrifiée ! Toute la vie d’un territoire menacée. L’État doit réagir !»

Des conséquences économiques et agricoles à terme dans les Pyrénées-Orientales ?

Les organisateurs communiquent sur plusieurs menaces potentielles, et qu’ils pensent que la décision provoquerait. De citer : la baisse de l’alimentation des nappes phréatiques, se nourrissant du débit des petits canaux ; la baisse du niveau d’eau du barrage des Bouillouses, servant à la production d’électricité, et de neige de culture pour les stations de Cerdagne-Capcir.

Ils assurent notamment que «la vie biologique du fleuve Têt est de bonne qualité ; les poissons sont présents en nombre malgré la sécheresse de 2022
«L’État doit faire appel de cette décision, conclut le communiqué. Il en va de la survie de la Vallée de la TêtRodrigue Furcy, l’actuel préfet des Pyrénées-Orientales, ayant jusqu’à la fin de ce mois de janvier pour faire appel.


Sécheresse dans les Pyrénées-Orientales : « Nous sommes en alerte renforcée, c’est la crise, la situation est très critique »

Nicolas Garcia – premier vice-président du Conseil Départemental, président du Syndicat Mixte pour la protection et la gestion des nappes de la plaine du Roussillon, et maire d’Elne – est d’avis de rappeler «que la situation de la sécheresse dans le département est très critique. Le printemps 2022 a été pluvieux et nous avons eu de la chance par rapport à d’autres départements voisins. Mais depuis août 2022, on a un niveau de sécheresse jamais atteint.»

Et il alarme : «Nous sommes en alerte renforcée et c’est la crise. Nous avons des restrictions en plein mois de janvier ; ce n’était jamais arrivé. Et nous n’avons aucune promesse de pluie pour ce printemps 2023. Qu’est-ce qu’on fait ? Le constat est fait. Certains agriculteurs ou communes diront qu’ils ont fait des économies ; mais s’il ne pleut pas, c’est la catastrophe

Quid de la décision du Tribunal et de la mobilisation générale de mardi 24 janvier ? «Je soutiens la manifestation. Pas pour être contre les écolos ; mais plutôt au bénéfice de solutions pour l’eau. Aussi, le préfet, en 2017, n’a pas fait une décision hasardeuse : il a consulté les différents services et les syndicats. Je trouve que ce verdict du Tribunal de Montpellier est un dogme. La décision a été prise à partir de textes trop généraux.»

Le 13 janvier dernier, le journal Libération publiait un article sur la situation catastrophique de l’Aude et des Pyrénées-Orientales. Il rappelait que l’année 2022 a correspondu à un climat semi-aride ; avec un indice d’humidité des sols proche de zéro en janvier, et seulement 306,7 mm de pluie tombée (-55% de la normale).

2022 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée en France, mais aussi l’une des plus sèches. Deux facteurs aux importantes répercussions sur l’agriculture, la biodiversité et la production d’énergie.

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Idhir Baha