Selon une étude de France Stratégie, en France, c’est l’origine sociale qui pèse le plus sur les trajectoires des élèves, et non le genre et l’ascendance migratoire. C’est pourtant en partie à l’école que se construisent les individus, une école dont le caractère inégalitaire fait l’objet d’un consensus scientifique et politique.
Chaque étape de la scolarité participe à la fabrique des inégalités, qui se creusent, année après année. Quel est le poids des héritages dans les parcours scolaires ?
L’origine sociale pèse lourdement sur le parcours scolaire
En France, la forte dépendance de la réussite scolaire au milieu socioéconomique et culturel des élèves se construit depuis leurs premières années de vie et s’observe tout au long de la scolarité.
Dès 2 ans, les enfants vivant dans un milieu socialement et/ou culturellement favorisé maîtrisent davantage de compétences utiles pour l’acquisition ultérieure des savoirs scolaires que les enfants des milieux défavorisés. L’entrée à l’école primaire confirme ce constat : les élèves des milieux favorisés obtiennent de meilleurs résultats tandis que les élèves des milieux défavorisés accusent déjà un retard significatif. Au cours de la scolarité, les écarts se poursuivent : en fin de 3e, seuls 10% des enfants de cadres et professions intellectuelles supérieures figurent parmi le quart des élèves qui réussissent le moins bien, contre environ un tiers des enfants d’ouvriers.
L’origine sociale a également une incidence non négligeable sur les choix dans la trajectoire scolaire. À notes équivalentes, les élèves, leurs familles et/ou les équipes éducatives opèrent des choix différents. La faute à la construction progressive d’aspirations et de projections sur les capacités de réussite future selon les catégories sociales.
En outre, des phénomènes de compensation contribuent à renforcer le poids du déterminisme social dans les divergences de parcours. Les enfants d’origine défavorisée en difficulté précoce ont tendance à y rester tandis que ceux d’origine favorisée qui se trouvent dans la même situation affichent des progrès.
Le type et niveau de diplôme obtenu dépendent donc fortement de l’origine sociale. Toutes voies confondues, environ deux tiers des enfants d’ouvriers obtiennent leur baccalauréat contre plus de 90% des enfants de cadres et d’enseignants. Des résultats qui témoignent de deux inégalités : celle d’accès à la Terminale et celle de réussite à l’examen.
Filles et garçons : des différences dans le parcours scolaire qui se reflètent sur le marché du travail
En France, les écarts de performances entre filles et garçons sont moins prononcés que ceux liés à l’origine sociale. Toutefois, les résultats moyens des filles sont supérieurs à ceux des garçons, et ce, de manière constante. De ce fait, filles et garçons ne suivent pas les mêmes parcours, ce qui se traduit par des débouchés extrêmement différents.
À 4-5 ans, les filles disposent déjà d’un socle de compétences plus solide que les garçons. La supériorité des filles sur les garçons dans la maîtrise moyenne des attendus scolaires se poursuit au cours des années du primaire et du collège. Les parcours des filles est plus fluide ; elles redoublent moins, sortent moins souvent précocement du système scolaire et sont plus nombreuses dans la filière générale et dans l’enseignement supérieur. En effet, 38,8% des filles entrées en 6e en 2007 étaient en Terminale en 2013-2014, contre 26,9% des garçons. L’année suivante, elles sont 48,3% dans l’enseignement supérieur, contre 36,7% des garçons.
Pourtant, bien qu’elles soient davantage diplômées que les garçons, les filles sont pénalisées par la spécialisation genrée de leurs diplômes, car ils sont moins rentables sur le marché du travail. Elles font des choix qui les conduisent à leur nette sous-représentation dans les classes préparatoires et dans les filières scientifiques et industrielles.
Les enfants d’immigrés : à égalité avec les autres ou davantage pénalisés ?
Les trajectoires des enfants d’immigrés sont moins favorables que celles des enfants sans ascendance migratoire. Cependant, les écarts sont plus réduits que ceux qui différencient les filles des garçons et a fortiori ceux en lien avec l’origine sociale. Par contre, les origines géographiques ont des conséquences sur le parcours scolaire.
Les enfants d’immigrés redoublent davantage, sont un peu surreprésentés dans les filières spécialisées au collège et optent plutôt pour une filière technologie qu’une filière générale. Ils accèdent moins au baccalauréat et sont plus nombreux que les autres élèves à quitter le système scolaire sans aucun diplôme. Ces enfants d’immigrés sont aussi moins nombreux à suivre des études supérieures, au profit de cursus moins longs et moins prestigieux.
Mais, à origine sociale et familiale et contexte de scolarisation comparables, les désavantages des enfants d’immigrés en termes de performances s’estompent, voire disparaissent. Dans la voie générale, ils suivent des trajectoires similaires à celles des autres enfants des mêmes catégories sociales. Cela confirme le fait que c’est bel et bien l’origine sociale qui agit en premier sur le parcours scolaire des enfants d’immigrés et des autres enfants.
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