Article mis à jour le 27 mai 2024 à 17:32
Ce jeudi 21 mars 2024, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, est attendu au tournant dans les Pyrénées-Orientales. En visite au Salon des Maires puis dans un camping à Torreilles, l’ancien maire d’Angers s’est entretenu avec les élus locaux et décideurs publics sur la gestion de l’eau mais aussi du très controversé golf de Villeneuve-de-la-Raho.
La venue de Christophe Béchu dans les Pyrénées-Orientales semble avoir calmé les ardeurs des élus locaux, préoccupés par la sécheresse historique que traverse le département. Et pour cause, le ministre de l’environnement n’est pas venu les mains vides. Au cours de ces dernières semaines, les chambres consulaires et les syndicats ont soumis à l’État un florilège de projets. Parmi lesquels, la construction du « mythique » tuyau du Rhône est revenue sur le tapis. Ce réseau hydraulique, censé acheminer l’eau jusqu’à Barcelone, est un projet vieux de 20 ans. Aujourd’hui, la Région Occitanie lance une étude pour savoir si cet apport de l’eau du Rhône, via Narbonne, sur le territoire des Pyrénées-Orientales est possible et financièrement envisageable.
Un « Monsieur eau » pour les Pyrénées-Orientales
Aux manettes de ces petits, moyens et grands projets, Christophe Béchu a annoncé l’affectation d’un « monsieur eau« , un « cadre de haut niveau » auprès du préfet, Thierry Bonnier, qui suivra la gestion de ces 50 dossiers à la loupe. Selon le ministre, ce super coordinateur de l’eau sera nommé dans quelques jours et restera à la manœuvre pour au moins trois ans.
« La profession agricole a pris la parole, le représentant de l’hôtellerie de plein air, et beaucoup d’élus m’ont fait part de leur situation. Sur cette cinquantaine de projets retenus, nous en identifions six ou sept qui pourraient être lancés très rapidement », annonce le ministre, sans donner plus de précisions.
Au-delà des propositions, le ministre a aussi insisté sur « le nombre de structures qui gèrent l’eau ». Dans le département, 200 ASA (Association Syndicale Autorisée) régissent le réseau de canaux. « Beaucoup de communes gèrent leur eau potable avec des risques de rupture, et donc des sous-investissements qui sont aussi le fait de cette organisation territoriale. Nous avons aussi, dans certains endroits, un sujet du prix de l’eau, qui reflète le fait que nous n’avons pas avancé les travaux pour lutter contre les fuites », rappelle le politique. Pour remédier à ces problématiques, l’État s’engage à participer au financement d’une partie de ces projets.
Les « signaux positifs » de Béchu
« Je trouve que le ministre a apporté des signaux positifs. Il est venu avec des messages d’engagement, de financement, des projets prêts ou émergents », avance Lauriane Josende, sénatrice des Pyrénées-Orientales. La veille, la représentante des collectivités territoriales avait sèchement interpellé le gouvernement au Sénat sur le problème de l’eau dans les Pyrénées-Orientales. Un des seuls départements que l’organisme chargé de contrôler l’état des nappes plaçait en rouge écarlate sur la carte de France.
« Le tuyau qui achemine l’eau du Rhône dépasse l’échelle du département et demande à ce que l’on travaille avec les deux Régions Occitanie et Auvergne-Rhône-Alpes. » Un investissement qui pourrait atteindre les 500 millions d’euros, même si le montant n’est pas encore confirmé. « Je vais suivre ce dossier de près. Nous avons besoin d’avancer assez rapidement et d’envoyer un message positif à nos habitants et aux personnes qui veulent venir dans le département pour y vivre, y séjourner ou y passer des vacances », souligne la sénatrice.
De son coté, Agnès Langevine, vice-présidente chargée de l’écologie à la Région Occitanie voit dans cette visite ministérielle la preuve de la nécessité de travailler en partenariat, de mobiliser tous les moyens et de montrer sa détermination dans l’adaptation au changement climatique. « Ici, à Torreilles, il s’agit d’un projet global de territoire. Le ministre est venu appuyer cette initiative et peut-être faire en sorte que ça puisse être essaimé, parce qu’il faut vraiment accélérer. Collectivement, nous ne pouvons pas détourner le regard, il nous faut avancer et agir vite. »
Quand les usages de l’eau s’opposent
Station balnéaire ou de ski, le département est fortement dépendant des saisons touristiques. Les pistes enneigées et les piscines, tous consomment une grande quantité d’eau et viennent directement en concurrence des usages agricoles et sanitaires pour la population. Si le ministre de l’Écologie salue le travail de la préfecture qui a pris les devants en instaurant de nombreux arrêtés de restriction, il admet : « Le plan que l’on va bâtir vient réparer les choses que l’on aurait dû faire par le passé, mais il vient aussi nous préparer tous collectivement à ce qui nous attend. » Sous entendu, une diminution de l’eau en été, dans un contexte où le dérèglement climatique fait que la ressource disponible se raréfie.
Sur la plage de Torreilles, Christophe Béchu s’est entretenu avec les représentants des secteurs de l’hôtellerie de plein air. Paul Bessoles, président de la FHPA66, présentait notamment la systématisation des eaux grises vers les sanitaires des toilettes de tous ses mobil-homes. Pour le ministre, ce genre d’initiative mise en œuvre aujourd’hui au niveau des campings pourrait bien être généralisé à l’échelle des villes.
Vers de la réal-écologie ?
Lors du point presse à l’issue de sa visite dans les Pyrénées-Orientales, le ministre de la Transition écologique a insisté sur sa volonté d’un discours de vérité à l’égard des Français. « Il faut nous préparer à vivre dans un pays dont la température moyenne peut augmenter de 4 degrés. La conséquence d’une augmentation des températures, c’est une diminution de l’eau disponible. Il faut aussi expliquer que nous allons vers davantage de canicules et de sécheresses. » Mais pour éviter d’alimenter l’éco-anxiété, le ministre a tenu à rassurer sur l’avenir : « Il faut que l’on montre qu’il y a des gens qui ont commencé à se préparer. Qu’il y a des solutions mises en œuvre, et que nous sommes en lutte contre le gaspillage de l’eau à tous les étages. »
Hausse des tarifs de l’eau, réglementation plus stricte, le ministre a dévoilé à demi-mot que si les acteurs faisaient appel à la solidarité nationale, l’État allait poser quelques exigences. « On a eu par le passé ici des forages sauvages sans autorisation, des dispositifs sans compteur, qui ne permettent pas de mesurer la consommation d’eau », précise Christophe Béchu. « Si nous devons faire des efforts et mobiliser des moyens, il ne faut pas qu’on se retrouve avec des passagers clandestins qui continuent à bénéficier du dispositif. »
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