Article mis à jour le 7 mars 2023 à 09:16
«Perpignan 50 degrés», une journée pour comprendre comment le climat va changer nos vies. Conférences, débats, expositions se tiendront le 11 mars autour de l’eau, la biodiversité et le changement climatique à l’auditorium de l’Université de Perpignan en centre-ville. Programme complet et échanges avec les organisateurs et conférenciers.
Combien d’eau pour demain ? Wolfgang Ludwig* et Guillaume Lacquement**, enseignants-chercheurs à l’université ont étudié le bassin versant de la Têt.
Le premier est professeur en géosciences et hydrologie, le second en géographie. Et ils ont uni leurs compétences pour réaliser une étude inédite sur la ressource en eau, les projections et les retours d’expérience des exploitants agricoles sur le territoire. Quelles stratégies d’adaptation à la sécheresse ont-ils mis en place et pour quels résultats ?
Guillaume Lacquement de préciser : «Nos disciplines se sont intéressées, d’un côté au risque que le changement entraîne sur la disponibilité de la ressource en eau ; et de l’autre à la manière dont les acteurs socio-économiques, les individus et la société se mettent en capacité de réagir, de s’adapter aux conséquences du changement climatique, et ses conséquences sur la disponibilité de la ressource en eau.»
Wolfgang Ludwig de rajouter : «notre unité de recherche s’intéresse à l’impact du changement climatique sur le fonctionnement des fleuves côtiers dans la région, les ressources d’eau, les débits. Nous nous sommes aussi focalisés sur le bassin versant de la Têt et la qualité de l’eau. Et nous avons trouvé intéressant de coupler nos recherches sur les fonctionnements hydro climatiques avec l’évolution du monde agricole. Un monde en crise face à une ressource en eau en baisse.»
Cette approche géographique permet aussi de tenir compte du contexte d’ensemble. «L’activité agricole s’inscrit dans un contexte territorial où il y a d’autres activités. Des activités touristiques saisonnières et qui consomment aussi de l’eau, mais aussi des activités quotidiennes de consommation d’eau potable.»
Existe-t-il des solutions et des stratégies d’adaptation à la sécheresse dans les Pyrénées-Orientales ?
Questionné sur les solutions, le géographe de rétorquer qu’il n’existe pas une, mais des solutions. «Les êtres humains sont capables d’inventer des techniques nouvelles ou de développer des techniques existantes mais qu’ils n’utilisaient pas auparavant. Mais tout va dépendre de la manière dont les sociétés mettent en place ou privilégient ces solutions.»
Et concrètement ? «Ce que montre notre approche basée sur l’étude individuelle de chaque exploitation c’est qu’il n’y a pas une solution – par exemple celle des bassines – qui serait à créer partout, mais des solutions qui dépendent de deux facteurs, le temps et dans l’espace. Chaque exploitation a une histoire : quels sont les systèmes de culture qu’elle a développés, la manière de produire etc ; elle est aussi sur un territoire où il a plus ou moins accès à l’eau, forage, canaux.»
Les études et les modélisations montrent clairement qu’il y a déjà moins d’eau et qu’il y en aura de moins en moins. Wolfgang Ludwig confie, «nous devons faire collectivement un choix sociétal. Je pense que nous avons compris que l’agriculture est un enjeu très important. Parce que nous avons besoin de nous nourrir et nous devons donc préserver aussi la ressource agricole. C’est une question de sécurité alimentaire. Et nous ne pouvons pas uniquement laisser cette responsabilité aux agricultures, nous devons les accompagner !»
Plusieurs thèses sont issues de cette étude : celle en sciences de l’environnement de Camille Labrousse publiée en 2021, et celle de Vassili Kypreos en géographie à paraître en 2023.
Quel programme pour «Perpignan 50 degrés» ?
De 10h – 12h – «Parlons Climat : chaque mot compte, chaque année compte, chaque action compte» avec Christophe Cassou, Climatologue, Directeur de recherche au CNRS (Toulouse), Co-auteur du 6ème rapport du GIEC. «Le 6e et dernier rapport du GIEC publié en 2021-2022 est un rappel à la réalité, une claque. Le constat scientifique est sans équivoque : le changement climatique est une menace pour le bien-être humain et la santé planétaire.»
De 14h à 15h – «Biodiversité et changement climatique : entre vulnérabilité, résilience et adaptation» avec Isabelle Chuine, Chercheuse en écologie, Directrice de recherche au CNRS (Montpellier). «La biodiversité, qui représente la diversité biologique, ou diversité du monde vivant, depuis les gènes jusqu’aux écosystèmes et paysages, est le fruit de milliards d’années d’évolution. Elle offre des contributions incommensurables au bien-être des populations humaines et elle est nécessaire au maintien de la vie sur Terre. Or elle subit, de façon croissante depuis l’apparition de l’homme moderne, des pressions qui l’amènent au 21e siècle au bord de sa sixième crise d’extinction.»
De 15h à 16h – «Combien d’eau pour demain ?» L’impact du changement climatique sur les ressources en eau et vulnérabilité du domaine agricole avec Wolfgang Ludwig, Professeur des universités en géosciences, Directeur du CEFREM (Perpignan), et Guillaume Lacquement, Professeur des universités en géographie, membre de l’UMR Art-Dev (Perpignan).
De 16h à 17h – «Justice environnementale et justice sociale : enjeux d’une conciliation» avec Emmanuel Combet, Economiste sénior à l’ADEME. «Les bases de notre contrat social sont aujourd’hui menacées par des conflits répétés entre des impératifs différents : énergétiques, sociaux, économiques. On l’a vu avec l’épisode des « gilets jaunes », on le retrouve avec les chocs sur les prix des énergies. Or ces conflits vont se multiplier.»
De 17h à 18h – Table ronde Perpignan 50°C : «il est encore temps d’agir sur notre ville.»
Qu’est-ce que «La Fabrique de l’action politique» organisatrice de «Perpignan 50 degrés» ?
Jean-Baptiste Llati, avocat et investi politiquement dans une gauche écologiste nous répond. «Nous sommes quatre initiateurs*** à avoir lancé cette association loi 1901. Nous sommes d’horizons professionnels différents mais assez proches au niveau des valeurs. Notre dénominateur est d’être des passionnés de la politique, d’où le nom de l’association. Des passionnés, mais paradoxalement pas enclin à rejoindre un parti. Personnellement, je les trouve utiles, mais peut-être un peu sclérosants. Nous nous avions envie d’agir pour le bien commun en dehors des partis qui, je crois, ont oublié le fond des idées.»
Concrètement pourquoi cette association ? «Notre objectif est de rassembler des gens d’horizons divers, de profiter de leur expérience, de leur vécu et de leur proposer des réflexions dans des débats ambitieux. Personnellement, je n’en peux plus de ces émissions ou tout le monde parle comme s’il était compétent sur tout, de l’Ukraine au Covid en passant par Pierre Palmade et l’énergie !» Quelles actions après la journée Perpignan 50 degrés ? «L’idée est de refaire régulièrement ce genre d’événements, avec peut-être un prochain rendez-vous au début de l’été. Et les sujets ne manquent pas. Cela pourrait se décliner autour de l’alimentation, l’agriculture, les approvisionnements, le bio, la sécurité alimentaire.»
*Wolfgang Ludwig est professeur des universités en géosciences, Directeur du CEFREM à Perpignan.
** Guillaume Lacquement est professeur des universités en géographie, membre de l’UMR Art-Dev à Perpignan.
***Les initiateurs de la Fabrique de l’action politique sont : Jean-Baptiste Llati, avocat, Éric Remy et Nicolas Lebourg chercheurs, ainsi qu’Agnès Langevine, vice-présidente de la Région Occitanie en charge du climat, du pacte vert et de l’habitat durable.
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