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Exposition | Le musée d’Art Moderne de Collioure consacre le surréalisme

La nouvelle exposition au musée d'Art Moderne de Collioure consacrée au surréalisme

Article mis à jour le 25 février 2024 à 09:00

Le musée d’Art Moderne de Collioure dévoile sa nouvelle exposition. Intitulée Front de mer 1940, elle rassemble des œuvres d’artistes qui ont posé leurs valises sur la côte catalane pour diverses raisons. Ils étaient tous animés par la même motivation : témoigner de cette époque si particulière durant laquelle la côte, de Canet à Banyuls, devient un territoire en lutte.

À travers cette exposition visible du 3 juin au 8 octobre, le musée « plonge dans les eaux troubles d’une année sombre qui transforme ce front de mer en véritable front de guerre ».

Point de départ : Canet et la villa Le Crépuscule

Jacques Hérold et Óscar Domínguez sont les premiers peintres surréalistes à être accueillis à Perpignan chez la mère du poète Robert Rius, puis à Canet, faute de place dans la maison. Ils s’installent alors dans la villa Le Crépuscule et sont rapidement rejoints par d’autres dont Victor Brauner, Remedios Varo, Benjamin Péret, Victor Serge, Henri Goetz ou encore Christine Boumeester.

Óscar Domínguez Tête de taureau, 1941 Huile sur toile, 50 × 65 cm Collection Domínguez TEA Tenerife Espace des Arts TEA 2019-001 ©Archive documentaire TEA ©ADAGP, Paris, 2023

Óscar DomínguezTête de taureau, 1941
Huile sur toile, 50 × 65 cm. Collection Domínguez TEA Tenerife Espace des Arts TEA 2019-001.
©Archive documentaire TEA, ©ADAGP, Paris, 2023.

Tous n’ont qu’une seule envie : fuir l’Europe en passant par l’Espagne. Suite à la fermeture des frontières par Franco, il faut trouver une autre solution. C’est ainsi que s’organise une filière menée par Varian Fry pour sauver des artistes et intellectuels européens en les faisant émigrer clandestinement vers le continent américain. La villa Le Crépuscule se vide à la fin de l’été. Le surréalisme réussit son pari : renverser l’ordre établi par le pinceau, la plume ou le fusil.

Le cas Victor Brauner

Victor Brauner n’a pas vécu les meilleures années de sa vie dans le département des Pyrénées-Orientales. Pourtant, c’est le seul artiste surréaliste qui a fait le choix de rester à la villa Le Crépuscule. Son statut de Juif étranger l’assigne à résidence en 1941 à Saint-Féliu-d’Amont à la villa Jeanette. Il travaille dans une fabrique et souffre de l’isolement. Ses nombreux séjours à Marseille ne suffiront pas à lui accorder un visa pour émigrer. Début 1942, il est à Banyuls, à proximité de la maison d’Aristide Maillol. Brauner s’inspire des lieux pour donner vie à ses œuvres. Dans la nuit du 23 au 24 juillet 1941, à Saint-Féliu-d’Amont, c’est un rêve qui le poussera à créer une figure clé de son travail plastique et ésotérique, Le Congloméros.

Perpignan – Canet

Robert Rius et Henri Espinouze, deux artistes originaires de Perpignan, s’imposent comme les talents les plus prometteurs du surréalisme des années 1930. Rius devient poète et invente le jeu du « dessin communiqué » avec Benjamin Péret. Dans le même temps, il collabore avec André Breton à l’Anthologie de l’humour noir. Une fois ce dernier parti vers les États-Unis, c’est Robert Rius qui prend les rênes du surréalisme. Il commence par publier son premier recueil puis créé la revue La Main à Plume, avec pour ambition de poursuivre le surréalisme sous la double exigence de Karl Marx et d’Arthur Rimbaud. Lui aussi estime que, écrire et dessiner, signifient résister.

Banyuls – Collioure

En 1940, le col de Banyuls devient une voie d’accès vers la liberté car il donne sur l’Espagne puis le Portugal. D’août à septembre de la même année, Dina Vierny, vêtue de sa robe rouge, guide les réfugiés vers le sommet de la montagne, là où l’Espagne apparaît. Sa seconde activité est de poser pour Maillol, lui qui aime la solitude et le calme de son atelier de Banyuls. Dina Vierny sera incarcérée à la prison de Fresnes, ce qui empêche le sculpteur de finir son œuvre Harmonie. L’œuvre restera inachevée.

Saint-Cyprien – Argelès

En février 1939, pour faire face aux milliers de républicains fuyant le coup d’État de Franco, l’Etat français ordonne la construction à la hâte de camps. Les plages du département sont ainsi exploitées pour abriter des baraquements dans lesquels s’entassent des réfugiés. Gerardo Lizarraga en fait partie. Interné à Argelès-sur-Mer, il produit des dessins surréalistes, symboles de visions cauchemardesques de ce monde de sable. Libéré en 1940, il emporte ses dessins, qui sont, pour lui, les œuvres les plus fortes qu’il lui ait été donné de créer. 

Gerardo Lizarraga
Image virtuelle du cauchemar d’Argelès, 1939
Graphite sur papier, 31 × 24 cm
Collection privée, succession Gerardo Lizarraga Institut navarrais de la mémoire
En dépôt au musée de Navarre, Pampelune (Espagne) © Droits réservés

Gerardo Lizarraga – Image virtuelle du cauchemar d’Argelès, 1939
Graphite sur papier, 31 × 24 cm. Collection privée, succession Gerardo Lizarraga. Institut navarrais de la mémoire. En dépôt au musée de Navarre, Pampelune (Espagne) © Droits réservés.

Carl Rabus, peintre, est interné à Saint-Cyprien en compagnie d’autres ressortissants allemands. Ses dessins se lisent comme une chronique d’un quotidien où la frontière entre résignation et désespoir est infime. Il s’échappe en 1941 puis réalise une série de gravures sur bois à la Libération. Ses planches sont d’une rare expressivité. Le dessin s’impose comme un outil qui permet de se confronter et de dépasser les années d’horreur.

Collioure

Nombreux sont les artistes qui se réfugient à Collioure pour se protéger du fracas du monde ou quitter le pays. Albert Marquet arrive en juin 1940 à Céret, puis Collioure, et décide de rejoindre Alger depuis Port-Vendres en septembre de la même année. Raoul Dufy se réfugie à Céret, puis Perpignan et tombe amoureux de Collioure, ville à laquelle il dédiera une tapisserie. Les artistes s’inspirent de Collioure, lieu où il fait bon vivre.

Un peu de contemporanéité

Une partie de l’exposition sera consacrée à des artistes contemporains de différentes nationalités qui trouvent refuge sur ce front de mer. Ils témoignent de leur temps à travers des langages plastiques, visuels et sonores, fondés sur le récit. Les histoires singulières se mêlent à l’histoire collective. Ces artistes, grâce à leurs récits intimes et historiques, permettent de ne pas oublier l’histoire officielle.

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Pauline Garnier