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La place Arago de Perpignan : Entre mouvements sociaux et douceur de vivre

PLACE ARAGO PERPIGNAN

Article mis à jour le 5 août 2024 à 11:04

À Perpignan, la place Arago fait partie des lieux culte de l’histoire de la ville. De la Résistance sous l’occupation à mai 68, la place fait parler d’elle au fil du temps. Elle porte le nom du célèbre astronome et homme politique français François Arago. Située dans l’hypercentre de Perpignan, l’esplanade est aujourd’hui un lieu de détente pour ceux qui s’y attablent à l’ombre des palmiers.

Traversée par la Basse, elle est l’une des places les plus prisées des Perpignanais, et ouvre une porte d’entrée sur le cœur de ville. La statue de François Arago trône face au Palais de Justice, tandis que la voirie sépare les cafés du célèbre Palmarium. Les natifs et visiteurs peuvent y flâner, verre à la main, à toute heure et à toute période de l’année.

La Place Arago : témoin de l’histoire de Perpignan

La place Arago est créée en 1863, mais diffère considérablement de son apparence actuelle. À cette époque, elle est le parvis du tribunal de Justice érigé en 1866. Dix ans plus tard, en 1876, elle prendra le nom de François Arago. Et en 1879, le bronze, représentant l’homme de sciences, prendra place en son centre.

L’endroit a été un symbole fort des batailles sociales et politiques dans le département. « Deux places sont importantes pour les manifestations à Perpignan : la place Catalogne et la place Arago » explique Camille Otero, propriétaire du café Vienne. L’histoire raconte que durant l’occupation, les Allemands réquisitionnèrent les statues pour leurs usines d’armements. La statue de François Arago fut épargnée grâce à la mobilisation des habitants du quartier. Ils avaient réuni l’équivalent du poids de la statue en acier, soit 1600 kg, pour les fournir aux Allemands. En échange, les soldats acceptèrent de restituer la statue.

PLACE ARAGO PERPIGNAN

En juillet 1942, la place Arago fut le lieu de la première « manifestation d’union de la résistance ». Près de 300 personnes défilèrent pour condamner le régime de Vichy. Et 62 d’entre elle, accusées de communisme, furent arrêtées.

Quant aux mobilisations de mai 68, elles réunirent 5 000 personnes sur la place le 13 mai. Aux pieds de la statue, et derrière la banderole « Étudiants, enseignants, travailleurs, tous unis », les grévistes revendiquaient plus de liberté. Plus récemment, la place fut le théâtre de l’expression de la colère des agriculteurs des Pyrénées-Orientales.

François Arago : figure marquante des Pyrénées-Orientales

Au point de départ de la rue Alsace-Lorraine, la statue de François Arago surplombe fièrement la place, pointant le doigt vers le ciel. Elle fut réalisée par Antonin Mercié. Et inaugurée le 21 septembre 1879 en présence du représentant du président de la République et de Jules Ferry, ministre de l’Éducation. Selon Guy Jacques, spécialiste de la famille Arago, la statue installée à Perpignan est la première du physicien. Celles installées, respectivement à Paris et à Estagel, construites pendant la Seconde Guerre mondiale, l’ont été à la demande des Allemands, confie l’auteur de « François Arago : l’oublié ».

Construits par l’architecte Paul Pujol, trois bas-reliefs ornent le socle de la statue. Ces gravures relatent chacune, un des événements marquants de la carrière de l’astronome. D’abord, de 1798 à 1801, sa scolarité au lycée qui porte aujourd’hui son nom. Il intègre ensuite le lycée polytechnique, où il enseignera quelques années plus tard. Le deuxième bas-relief met en scène sa carrière politique. De 1931 à 1946, il fut réélu à six reprises en tant que député.  Le 16 mai 1840, il se fait particulièrement remarquer, à la suite de son discours sur le suffrage universel et l’abolition de l’esclavage. Enfin, la troisième scène rappelle la fin de vie d’Arago, et présente un homme âgé et fatigué. Cette figure tutélaire de Perpignan décède le 2 octobre 1863 à 67 ans.

Le Palmarium, cette « tortue posée sur la basse ».

Le Palmarium, situé au centre de la place Arago est l’une des silhouettes emblématiques de la ville « au même titre que le Castillet ou la cathédrale Saint-Jean » précise Philippe Latger, fondateur de l’association Perpignan Art-Déco. Un bâtiment construit par-dessus la rivière Basse. De plus l’édifice offre une vue de la ville avec le Canigou en arrière-plan.

L’architecte Comet fonde l’édifice en 1905. Une première version de style « art nouveau » dont il ne reste presque rien aujourd’hui. Le Palmarium prend une nouvelle forme en 1947 sous la supervision de l’architecte Férid Muchir, « l’architecte qui a le plus travaillé à Perpignan ». « C’est un peu notre Gaudi à nous » en rit Philippe Latger. Le créateur utilise la poudre de Cayrou qui donne au bâtiment sa couleur rouge.

Après avoir été le siège de l’office du tourisme, ce lieu est aujourd’hui scindé entre une pizzeria, une chaîne de restauration et un poste de police municipale. Pour le passionné d’urbanisme, ce bâtiment mériterait une plus belle mise en valeur. Notamment par un éclairage nocturne plus adéquat.

La place Arago est aujourd’hui un lieu de vie prisé des habitants et des visiteurs

Outre le Palmarium, la physionomie de la place, bordée de hautes allées de palmiers, en fair un endroit très prisé des Perpignanais. Un lieu de repos, mais aussi de passage, si le flux de population n’est à ce jour pas documenté, le responsable du café Vienne dresse chaque jour 300 couverts. Un indice sur le nombre de personnes qui peuvent circuler sous les palmiers de la place Arago. Chacun peut venir boire un verre ou se reposer toute la semaine. « Quand vous avez des invités, vous savez que vous pouvez toujours vous rendre sur la place Arago » s’enthousiasme Philippe Latger.

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Des figures historiques, comme Pablo Picasso, ont aussi foulé les pavés de la place. En 1946, le peintre Raoul Dufy y installe son atelier. Au 2 rue de l’Ange, depuis ses fenêtres, il croquera plusieurs toiles montrant la vie de cette place emblématique. La place est depuis la fin du XIXe siècle, un lieu de rencontre pour les familles, les personnalités politiques ou judiciaires. « Dans les années 80, la piétonnisation a participé à rendre le lieu plus convivial » se rappelle Camille Otero. Si les autorités avaient, un temps, prévu le déménagement du palais de Justice, il est désormais acté que le tribunal restera bel et bien sur la place Arago.

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Florian Salvat