Article mis à jour le 11 août 2023 à 15:25
Mi-novembre, l’association Rivages de France en partenariat avec le Parc Naturel Marin du Golfe du Lion organisait un atelier pour encourager les collectivités à pratiquer « un nettoyage plus raisonné des plages ». Les communes d’Argelès-sur-Mer et Elne – gestionnaire d’une plage naturelle de moins d’un kilomètre – participaient à cette sensibilisation.
Chaque été, le balai des engins laisse son lot de traces sur le sable des plages des Pyrénées-Orientales. Ce nettoyage en profondeur des plages rendu nécessaire en raison des pratiques touristiques est particulièrement agressif pour le littoral, aggrave l’érosion et fait reculer le trait de côte de manière accélérée.
Vers un changement du mode de nettoyage des plages ?
Les 15 et 16 novembre derniers, les agents de la Communauté de communes Albères-Côté Vermeille-Ilibéris ont suivi l’atelier organisé par Rivages de France. Pour le service environnement et agriculture de la commune d’Elne, représenté par Raphaël Michau, « il s’agit de faire le diagnostic de ce que nous faisons aujourd’hui en termes de gestion et de nettoyage de la plage ; et de voir ce qui peut se faire pour mettre en place un nettoyage plus doux, moins impactant pour la nature ».
Même si jusqu’à présent, une petite partie de la plage est nettoyée par les tracteurs de Saint-Cyprien. La seconde partie – majoritaire – est incluse dans la réserve naturelle du Mas Larrieu ; le nettoyage est donc effectué via une mobilisation citoyenne.
Laisser la nature tranquille ou nettoyer manuellement ? Rivages de France préconise l’abandon des engins de tamisage
Selon l’association Rivages de France « un nettoyage trop intense transforme les plages en milieux stériles. (…) Le nettoyage mécanique régulier entraîne une accélération de l’érosion des dunes du fait de l’absence de laisses de mer ». Pour rappel, la laisse de mer est cette accumulation de débris naturels (coquillages, tests d’oursin, algues arrachées…). Rivages de France dénonce au passage une volonté de « donner à la plage une image de carte postale ».
Pourtant, insiste l’association, « les laisses de mer jouent un rôle primordial dans la conservation de la biodiversité des plages et de résistance souple à l’érosion. Elles servent d’abri, de nourriture pour la faune, de reproduction, freinent l’érosion, favorisent le développement des végétaux… »
L’adjointe déléguée à la transition écologique d’Elne, Annie Pezin, de rajouter, « chaque nettoyage mécanique fluidifie le sable et le fragilise ».
Vers un littoral plus sauvage ?
À la faveur d’un accord datant du Moyen-Âge, la commune d’Elne bénéficie d’un accès à la mer via une plage d’environ 800 mètres à droite de l’embouchure du Tech. Selon Annie Pezin, cette plage n’est pas aménagée. Raphaël Michau de rajouter « les gens qui viennent sur la plage d’Elne, viennent sur une plage naturelle, et sont donc déjà sensibilisés à ce sujet et sont dans une logique de préservation. D’ailleurs, lors des opérations de nettoyages, il y a peu de déchets type pots de crèmes solaires. Nous retrouvons plutôt des déchets déstructurés et érodés, vraisemblablement charriés par la rivière ».
Alors pourquoi intervenir sur cet écosystème naturel ? Une des réflexions serait de ne plus interagir avec cette plage. Mais au fil des ans, la plage disparaîtrait sous l’accumulation de débris et l’érosion naturelle. « Plus on nettoie, plus on risque de déstructurer la plage, comme pour toutes les plages menacées par le recul du trait de côte insiste l’élue. D’ici à 2050, le littoral aura beaucoup changé. Mais laisser des végétaux transportés par le fleuve se fixer sur le sable consoliderait un peu les dunes. Bref, laisser un peu plus la nature faire permettrait peut-être de reculer le délai ».
Raphaël Michau précise que pour certains déchets, notamment les mégots, une action manuelle était indispensable. « Les mégots de cigarettes ne sont pas des déchets issus des gens qui pratiquent la plage mais des déchets souvent lessivés qui arrivent depuis la rivière ou depuis la mer et qui arrivent là pendant les épisodes de tempête ».
L’état du littoral français
Bien qu’ils représentent un véritable atout pour les territoires concernés concernant la croissance démographique et la fréquentation touristique, les écosystèmes littoraux sont fragiles et menacés. Ils peuvent être altérés par la pollution – de différentes natures -, par une urbanisation intense et une artificialisation, par de mauvaises pratiques, notamment un nettoyage inadapté.
Avec ses 20.000 kilomètres de linéaire côtier et plus de 11 millions de km² de domaine maritime (le 2e au monde), le littoral français est diversifié et riche. Cette interface entre la terre et la mer est un espace de rencontre entre plusieurs milieux : la plage, les falaises, les marais, les étangs, les mangroves… Mais cet espace reste fragile et menacé par le changement climatique. L’association Rivages de France cherche donc à mettre en œuvre des actions pour préserver le patrimoine littoral et maritime.
Rivages de France dénonce et propose des alternatives
L’association Rivages de France dénonce nettoyage mal réalisé des plages. Car un mauvais nettoyage aura de lourdes conséquences sur le littoral. Actuellement, différents modes d’entretien sont utilisés pour les plages : mécanique (cribleuse-tamiseuse, goémonier), manuel, passages réguliers en période estivale réalisés ou par des prestataires.
La solution serait donc de procéder à un nettoyage manuel, indissociable de la gestion courante de la plage, et qui fonctionne grâce à une mobilisation citoyenne. Il permet de préserver le littoral et même de réaliser des économies. En effet, du fait des coûts du carburant, de l’entretien des machines et de l’amortissement, le nettoyage mécanique coûte plus cher que le nettoyage manuel.
Le principe du nettoyage raisonné
L’association Rivages de France a créé un guide méthodologique destiné aux collectivités littorales intervenant dans la gestion des plages. Le nettoyage raisonné contribue à préserver les plages de façon durable. Le but est de concilier accueil du public et conservation du milieu. Pour y parvenir, il est essentiel de développer la collecte manuelle sur le rivage, en particulier sur les zones sensibles à forts intérêts écologiques (enlèvement des déchets anthropiques et maintien de la laisse de mer et du sable) et de limiter l’utilisation des engins mécaniques aux plages les plus fréquentées.
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