Article mis à jour le 28 octobre 2024 à 13:37
Nous l’avions quitté au soir du 1er tour de l’élection municipale, nous retrouvons Olivier Amiel dans les rayons des librairies. Ancien élu à la mairie de Perpignan, Olivier Amiel a souhaité évoquer dans cet ouvrage la cancel culture. Ce phénomène né aux États-Unis peut être traduit par la « culture de l’annulation ». Favorisée par les réseaux sociaux, cette pratique consiste à ruiner la carrière d’une personnalité publique accusée – à tort ou à raison – de comportements moralement ou judiciairement répréhensibles.
À travers l’œuvre de l’un de ses auteurs fétiches, Bret Easton Ellis, Olivier Amiel dénonce cette cancel culture. BEE, comme l’appelle amicalement Olivier Amiel, avait dans un tweet étrillé les adeptes de ce politiquement correct.
Pour la fête du livre et de la rose, Olivier Amiel s’est prêté à l’exercice de l’interview face caméra. Installé sur un canapé à l’Hôtel Pams, l’auteur a enregistré une capsule littéraire pour présenter « Voir le pire » aux éditions Les Presses Littéraires.
♦ « J’ai voulu faire un livre sous le prisme de l’altérité »
Pour Bret Easton Ellis, « nous vivons en ce moment une sorte d’épidémie de la pensée morale ». Olivier Amiel d’insister, « une pensée unique qui s’impose dans la culture et au niveau politique. Mais aussi dans l’ensemble de la société ». Pour l’avocat de formation, cette pensée unique « fragmente et polarise » la société occidentale. La cancel culture est « une volonté de bannir, d’effacer les œuvres culturelles ou des individus qui ne pensent pas comme une l’idéologie dominante ».
Celui qui devrait reprendre le chemin du barreau perpignanais reprend à son compte les propos de son auteur fétiche. Olivier Amiel rappelle que Bret Easton Ellis a été victime lui-même de cette tentative de bannissement de l’espace public.
« En 1991, avec American Psycho, on a voulu confondre le personnage et son auteur. Il y a eu toute une campagne de dénigrement et de boycott contre son œuvre ». Alors que selon Olivier Amiel, il n’a eu de cesse « de défendre l’altérité et la liberté d’expression à travers ses écrits ».
♦ Les millénials, des chochottes ?
« La cancel culture concerne essentiellement les personnes stupides qui se sentent si mal dans leur peau qu’elles doivent s’exclamer : [Je dois interpeller quelqu’un de pire que moi, Je dois interpeller quelqu’un de pire que moi, Je dois interpeller quelqu’un de pire que moi].
BEE va même jusqu’à qualifier les millénials de chochottes. Selon l’auteur américain, la génération née dans les années 2000, friande de ce phénomène, est empreinte de bons sentiments. Cette génération « face à la contestation de leur monde idéalisé, agit comme un enfant gâté qui n’a pas ce qu’il veut et qui tape du pied et se roule par terre ».
Olivier Amiel se targue de faire la différence entre l’œuvre et son auteur. Ainsi, il faudrait faire la différence entre les films de Roman Polanski et l’auteur accusé de pédophilie et jamais jugé pour ces faits parce qu’il a fui les lieux de son méfait ? Faudrait-il continuer à lire les livres de Gabriel Mazdnef, alors que celui-ci n’a même pas fait amende des faits de viols sur mineurs qu’il qualifie d’amour ? Vaste débat.
♦ Le débat apaisé est-il encore possible dans l’ère 2.0 ?
Olivier Amiel dénonce une société polarisée par cette « épidémie de pensée unique » ; alors même que son mentor n’avait de cesse de prôner un principe d’altérité. Bret Easton Ellis défendait une volonté de dialogue et de débat. Un débat aujourd’hui confisqué par l’anonymat et l’agressivité des propos échangés sous des publications parfois sciemment polémiques.
Le phénomène de la cancel culture se nourrit du terreau des réseaux sociaux, ce vaste café du commerce où tout un chacun se croit investit du droit de donner son avis publiquement. Cet environnement où des responsables politiques garants de leur propre pensée unique commanditent des raids sur leurs contradicteurs.
Un difficile numéro de funambule où Olivier Amiel tente de trouver l’équilibre au-dessus de l’abîme de la cancel culture à l’encontre de personnes qui ont commis des actes légalement répréhensibles et du politiquement correct.
Un livre qui pose les bases d’un échange et d’un débat apaisé autour de l’œuvre de Bret Easton Ellis. Sans oublier le superbe travail d’illustration de la Une du livre, réalisé par l’artiste éclectique Steve Golliot-Villers.
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