Article mis à jour le 26 novembre 2024 à 18:25
Ce mardi 26 novembre 2024, les agriculteurs des Pyrénées-Orientales ont déposé les panneaux des communes, subtilisés en octobre dernier, devant la préfecture. Loin de rendre les armes, ils ont une nouvelle fois crié leur colère à l’occasion d’un « convoi funéraire », organisé par la FDSEA 66* (syndicat agricole) et les Jeunes agriculteurs.
« Ce qui nous arrive sur la vallée de l’Agly, c’est unique en France. Si ça arrive ailleurs, le message qu’on est en train d’envoyer, c’est qu’il ne faut compter sur personne », gronde Gérard Majoral, arboriculteur à Thuir et président de la commission fruits de la FDSEA. En octobre dernier, la ministre de l’agriculture Annie Genevard déclarait dans la vallée de l’Agly, où il ne pleut plus depuis trois ans, que les Pyrénées-Orientales étaient « un laboratoire en matière de résilience d’eau. »
Quelles annonces pour les agriculteurs des Pyrénées-Orientales ?
Si l’arboriculteur s’est longtemps demandé quelle était sa place dans ce laboratoire, il semble avoir trouvé la réponse lors de son rendez-vous à la préfecture. « J’ai compris que j’étais le rat », lâche-t-il non sans ironie. « Et il me semble qu’aujourd’hui, au lieu d’être un exemple pour les autres, nous sommes juste devenus des rats sur lesquels on va peut-être expérimenter quelque chose qui nous permettra d’arriver à vivre. »
Hissés sur la remorque de leur tracteur, Bruno Vila (FDSEA des Pyrénées-Orientales), Jean Henric (Jeunes Agriculteurs), Fabienne Bonet (Chambre d’agriculture) et Gérard Majoral annoncent que trois mesures ont été proposées à l’issue de leur entretien avec le préfet, Thierry Bonnier.
Pour commencer, les agriculteurs bénéficieront d’une exonération totale du foncier sur les propriétés non bâties. « La deuxième annonce qui nous a été faite, c’est que les Pyrénées-Orientales seront un territoire expérimental, sur la question de la gestion de l’eau. » Aujourd’hui, les dossiers financés par l’agence de l’eau ne portent que sur l’économie et la substitution (retenue d’eau destinée au stockage). « On ne sera plus dans ce cadre-là, car des projets pour trouver une nouvelle ressource en eau vont être financés », avertit Bruno Vila.
Mais les requêtes des agriculteurs n’ont pas toutes étaient satisfaites, loin s’en faut. « Nous avons besoin d’annonces spécifiques pour la problématique de sécheresse que l’on traverse. Le ministère n’a pas travaillé sur le dossier des Pyrénées-Orientales, rien n’a avancé sur les fonds européens, sur les fonds nationaux pour nous accompagner ! », gronde le président de la FDSEA. Une situation jugée inacceptable par les agriculteurs.
Une enveloppe climatique sous-estimée à 190 000 euros sur des millions demandés
Mais ce n’est pas la seule annonce qui a laissé un goût amer aux syndicalistes. En effet, comble de l’ironie, les statistiques des pertes agricoles du département n’auraient pas été prises en compte par la caisse régionale. Une enveloppe pourtant nécessaire à la survie des exploitations. « Aujourd’hui, on est en train de crever », lâche Jean Henric, président des Jeunes agriculteurs. « La MSA (mutuelle sociale agricole) n’a pas fait remonter nos doléances ! »
« La Chambre d’Agriculture a fait le chiffrage des pertes, dès cet été. La présidente de la MSA et le directeur de la MSA Grand Sud sont venus sur le terrain, auprès des exploitations. Mais il n’y a eu aucun relais par la suite ! », confirme Fabienne Bonet.
Cette année, une demande de quatre millions d’euros avait été formulée, basée sur les pertes réelles des filières du département. Alors qu’aucune remontée de ces chiffres n’a été faite, une enveloppe de 190 000 euros a été allouée par le ministère. « Elle devrait désormais atteindre 280 000 euros, autant dire rien du tout », déplore la présidente de la Chambre d’agriculture. En comparaison, le département de l’Aude a bénéficié de 700 000 euros d’aide.
Un énième coup de massue pour les agriculteurs des Pyrénées-Orientales
Cette année, aucun fonds d’urgence pour soutenir les agriculteurs ne sera déclenché au niveau national. « Les prêts de trésorerie, ça ne suffit plus », affirment-ils. Si un fonds d’urgence existe pour les aléas climatiques au niveau de l’Europe, la sécheresse n’est pas prise en compte.
« Localement, le gros sujet c’est l’eau. Cela fait plus de trois ans que l’on dénonce la gestion inexistante de la ressource », souligne Pierre Hylari, membre des Jeunes agriculteurs. « Il est tombé plus de 150 mm d’eau dans le département, tout ruisselle vers la mer, alors que c’est de l’eau qui pourrait être stockée. »
Face aux épisodes de sécheresse qui touchent le littoral occitan, la Région annonce une étude pour sécuriser l’accès à l’eau vient d’être lancée par la Région. Cette étude, qui durera 18 mois, consistera à analyser les demandes en eau des territoires en tension à horizon 2070 et les options pour sécuriser leur accès à l’eau, en tenant compte de l’accélération des effets du changement climatique.
Les panneaux des communes à la dérive…
Une chose est sûre, la réponse donnée aux agriculteurs est loin d’être suffisante. Rassemblés en nombre devant la préfecture, maraîchers, éleveurs, céréaliers, viticulteurs… ont laissé éclater leur colère. En attendant, les panneaux rendus à la préfecture ont presque tous terminé dans la Basse. Une signalétique estimée à 400 000 euros, qui a vogué sur l’eau ce mardi midi.
Le cortège a poursuivi sa route jusqu’à la mutualité sociale agricole, où des pneus ont été incendiés, ainsi que le contenu de leur benne. En fin d’après-midi, les agriculteurs ont regagné le péage sud de Perpignan. Selon nos informations, les services du département ont procédé à la fermeture de l’échangeur, qui lui donne accès.